PELLIOT
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
Entre temps, il avait été nommé en 1911 titulaire de la chaire d'histoire de l'Asie centrale au Collège de France. Pendant la guerre de 1914, il fut envoyé aux Dardanelles puis auprès de la légation de France à Pékin, avec le titre d'attaché militaire. Grand ami de Philippe Berthelot, il fit un utile travail diplomatique, puis fut envoyé en Sibérie où il rejoignit la mission Jeannin, et rentra en France à la fin de la guerre. Il fut élu en 1921 membre de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres; ...
«
nous étions arrêtés.
Mais à peine avions-nous regagné notre campement que les trois coups de
canon qui annoncent la sortie du mandarin de son yamen se faisaient entendre.
Ting, notre
'serviteur interprète, s'écria : «Voilà le mandarin qui arrive.» Nous n'avions rien prévu pour le
recevoir.
Au seuil du logis, Pelliot l'accueille, se confond en excuses et l'introduit dans la pièce de
réception.
Après les congratulations d'usage, nous nous asseyons et tâchons de ne pas manifester
l'anxiété que nous ressentons.
Nous voyons alors arriver des tasses de thé, des plateaux chargés de
tranches de melon et de pastèque ou couverts de pâtisseries.
L'on goûte à tous ces excellents mets
et le mandarin ne manque pas de dire à Pelliot : «Vraiment, vous autres Européens, vous savez
voyager.
J'admire qu'en cours de route vous puissiez organiser semblable réception.
Votre déli
catesse
m'honore profondément.
» Quand il fut parti, Pelliot se disposait à féliciter notre Ting
d'avoir su si bien se débrouiller, mais celui-ci fit aussitôt remarquer : « Moi rien faire du tout, les
serviteurs
du yamen ont tout apporté.
»
Les premières recherches avaient commencé dans la région de Kachgar, mais ne donnèrent
pas de résultats importants.
C'est alors que Pelliot se dirigea vers Qoutchar en passant par Maral
bachi, Toumchouq, Aqsou et Bai.
Arrivant à Toumchouq, il visita les ruines d'un mazar musul
man que Sven Hedin avait signalé.
Pelliot raconte comment, ayant mis pied à terre et grattant
le sol du bout de son fouet, alors qu'il se promenait parmi les ruines, il retourna parmi les pierres
une figurine dont le style était nettement gréco-bouddhique.
Il organisa immédiatement le
déblaiement de l'édifice; ce travail fut terminé au bout de six semaines; le bilan était encoura
geant, mais ne satisfit pas no~ chercheurs.
L'hiver arrivait; ils partirent et arrivèrent le 2 janvier
à Qoutchar.
Ils y restèrent huit mois.
La région de Qoutchar est célèbre par ses ming-uï («mille
maisons») qui sont des grottes artificielles creusées dans les falaises et aménagées en sanctuaires
bouddhiques; malheureusement pour eux, les sanctuaires avaient été fouillés par les expéditions
allemandes, russes et
même japonaises; restait seulement l'espoir de découvrir des temples en plein
air,
car ceux-ci n'avaient pas attiré les chercheurs étrangers.
Pelliot comprit aussitôt le parti
qu'on pouvait en tirer et s'attacha à leur recherche; il découvrit à l'ouest de Qoutchar les ruines
d'un temple où se trouvaient d'importantes liasses de manuscrits de toutes langues, mais dont
une grande partie avait été rendue inutilisable par l'humidité.
Pendant ce temps, le Dr Vaillant
levait la carte de l'oasis et Nouette photographiait les sanctuaires rupestres de la région.
Pelliot,
voulant vérifier les dires des historiens chinois, tentait le passage des T'ien-chan, droit au nord de
Qoutchar, et parvenait après divers essais infructueux, à découvrir deux passes nouvelles à près
de 4000 mètres, qui avaient été utilisées à l'époque des T'ang.
La mission quitta Qoutchar en septembre 1907 et se dirigea vers Ouroumtchi où elle parvint
un mois après.
Le Dr Vaillant relevait l'itinéraire au prix de fatigues écrasantes, faisant une partie
de la route à pied car, la caravane marchant de nuit, il ne pouvait compter les pas de son cheval
et devait par suite compter les siens.
Ils restèrent à Ouroumtchi pendant près de trois mois.
L'accueil
que le prince Lan, cousin germain de l'empereur, exilé dans cette ville, fit à Pelliot et à ses compa
gnons, les visites qu'il leur rendit, les invitations qu'il leur fit et les fêtes qu'il donna en leur hon
neur, tout cela contribua à augmenter la réputation de Pelliot auprès des lettrés qui étaient aussi
exilés.
Le prince Lan offrit alors à Pelliot un manuscrit que celui-ci reconnut comme datant du
vme siècle; ce manuscrit provenait, aux dires du prince Lan, du Ts'ien-fo-tong de T'ouen-houang
(«Grottes des Mille Bouddhas»).
On rapportait qu'un moine de T'ouen-houang avait découvert
une grotte de manuscrits.
Pelliot, se rendant compte de l'importance de la trouvaille, n'eut de
cesse de partir.
La mission partit donc pour T'ouen-houang en passant par Tourfan et Qomoul.
Aussitôt arrivé, il se mit en rapport avec le moine taoïste auteur de la découverte.
Après des
négociations menées avec
prudence et grâce à sa connaissance parfaite de la langue, Pelliot
obtint enfin accès à la grotte aux manuscrits.
Celle-ci avait dû être murée dans le courant du
xe siècle.
La trouvaille était d'importance; là se trouvaient entassés près de quinze mille manus
crits écrits dans les langues les plus diverses; ils contenaient des textes bouddhiques, historiques,
215.
»
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