Mickiewicz, Adam
Publié le 17/01/2022
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Poète, auteur dramatique, écrivain politique et militant démocratique polonais né près de Nowogrodek, mort à Constantinople (1798-1855). Déporté en Russie, en tant que membre d'un mouvement patriotique d'étudiants de Wilno, il y resta de 1824 à 1829. Pendant ce temps, il fit la connaissance de Pouchkine et entra en relation avec les Décabristes. Plus tard, il effectua un voyage à travers l'Europe occidentale et, en 1832, s'établit en France. En 1839, professeur de littérature latine à Lausanne, de 1840 à 1844, professeur de littératures slaves au Collège de France à Paris. Il resta pendant quelques années sous l'influence des idées mystiques. En 1848, il se rendit à Rome, où il obtint une audience du pape Pie IX, auquel il demanda son appui pour les mouvements de libération nationale. Il fonda ensuite une légion polonaise, qui devait combattre contre l'armée autrichienne. En 1849, il prit la direction du journal Tribune des Peuples, publié à Paris, où parurent de nombreux articles signés de lui. En 1855, il se rendit en Turquie en tant qu'émissaire d'A. Czartoryski. Pensant que la guerre de Crimée et la création d'une coalition dirigée contre la Russie pouvaient profiter à la cause polonaise, il commença à organiser une armée polonaise en Turquie. Il fut alors victime d'une épidémie de choléra. La date de parution du premier volume de ses poésies marque le début de la période romantique dans la littérature polonaise.
«
rompt avec un classicisme stagnant, s'il bouleverse et renouvelle la poésie polonaise en y introdui
sant audacieusement idées et formes nouvelles, s'il y accomplit une révolution pareille à celle que
Joukovsky et le jeune Pouchkine ont accomplie en Russie, s'il oppose le sentiment et l'intuition à la
raison, il
n'en demeure pas moins ancré dans une tradition populaire et nationale, polonaise et
catholique qui reste toujours la source la plus profonde de son inspiration.
C'est ainsi que le
folklore des
Ballades et Romances (1822) et des premières parties des Ayeux (1823) a beau être stylisé,
il
ne constitue nullement un tribut à la mode, aux théories herdériennes, mais jaillit en quelque
sorte de la terre lithuanienne, le drame werthérien de Gustave se joue dans un climat profondément
chrétien, et Conrad Wallenrod (1828), le poème en apparence le plus byronien de Mickiewicz,
célèbre
non pas une passion égotiste, mais un engagement patriotique.
Quant à l'œuvre du poète mûri dans l'émigration, elle marque le dépassement progressif
du romantisme.
Dans la grandiose« improvisation »de Conrad (dernière partie des Ayeux, 1832)
qui évoque extérieurement Marifred et le Faust, mais s'apparente spirituellement aux plus saisis
santes pages
de Dostoïevski, le thème de la rébellion individualiste est épuisé et l'image du sur
homme prométhéen s'efface devant celle du messager inspiré, exécutant conscient et humble de la
volonté divine.
Dès cette époque, en effet, Mickiewicz n'obéit plus à des impératifs peu coordonnés,
à des impulsions
purement affectives; il est en possession d'une doctrine où sa religion perdue et
retrouvée, son patriotisme fervent et son culte de l'action héroïque se trouvent harmonieusement
conciliés.
L'individuel s'intègre pour lui dans Je communautaire, Je communautaire dans le pan
humain.
Il prêche la régénération par le sacrifice accepté, la souffrance sublimée en amour.
La
cause de la Pologne devient œcuménique et sacrée, car cette nation-martyre est le « Chrfst des
peuples
» et sa résurrection sera un prélude à une transfiguration glorieuse de l'humanité.
Cette doctrine messianique s'exprime dans les Livres du pèlerinage polonais (1832) et sustente
Messire Thadée (1832-1834), le suprême chef-d'œuvre de Mickiewicz et sa plus étonnante réussite.
Plus
de forme romantique ici : douze mille vers de treize syllabes chers à la vieille Pologne, où
éclate une prodigieuse richesse d'inspiration et une merveilleuse maîtrise verbale ; puissante évoca
tion
d'une Lithuanie patriarcale et seigneuriale déjà disparue, mais frémissante de vie, roman
réaliste où des passages vibrants d'un lyrisme contenu, de nostalgie poignante succèdent aux scènes
idylliques,
dramatiques ou comiques brossées avec un détachement épique; message de fidélité et
d'espoir, leçon de patriotisme éclairé, ainsi se présente cette Iliade polonaise, l'unique épopée
nationale des temps modernes.
On conçoit qu'après avoir réalisé cet exploit Mickiewicz ait abandonné l'art dont il semble
avoir atteint les limites.
En effet, comme Jean Lechon l'a remarqué récemment, dans les Ayeux
déjà on touche au miracle :Gustave-Conrad n'est pas un personnage mythique entré dans la litté
rature, mais une création poétique qui engendre un mythe.
Dans Messire Thadée, le pas suivant
est franchi :c'est le mythe d'une nation qui y prend naissance.
Une fois créé, il déterminera le destin
du poète, comme (dans une forte mesure, du moins) le devenir de son pays.
Car, ne l'oublions pas,
c'est
par la poésie surtout que la Pologne dépecée a retrouvé son âme qui survit aujourd'hui aux
pires désastres.
97.
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