LE PRÉSIDENT HOUPHOUET-BOIGNY
Publié le 14/12/2023
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«
LE PRÉSIDENT
HOUPHOUET-BOIGNY
L e 18 octobre 1905, le chef du Canton de Yamossoukro, en
Côte d'Ivoire, fêtait l a naissance d'un fils, qui, b a p t i s é à la Mission
catholique, reçut le p r é n o m de Félix.
E n 1959, M .
Félix Houphouet-Boigny peut, à juste titre, s'enorgueillir de son cursus honorum.
Nous ne retiendrons de celui-ci
que les promotions récentes : d é p u t é de la Côte d'Ivoire à l'Assemblée nationale française en 1946, réélu en 1951 ; ministre délégué
à la présidence du conseil de la R é p u b l i q u e française, de février 1956
à mai 1957 ; ministre d ' E t a t de juin 1957 à mai 1958, confirmé
dans le m ê m e poste par le général de Gaulle ; P r é s i d e n t de l a
R é p u b l i q u e de Côte d'Ivoire, enfin, ministre-Conseiller du gouvernement français pour les affaires de l a C o m m u n a u t é .
Cette é c l a t a n t e
carrière n'a pas son égal chez les hommes politiques africains
les plus éminents.
Comment s'est-elle faite ?
L e petit garçon de Yamossoukro eut l'enfance commune aux
petits noirs de bonne et ancienne famille.
Il r e ç u t au foyer paternel
cette éducation fondamentale qui, pour la race baoulé, se distingue
par une courtoisie n u a n c é e .
I l fut en classe chez les Pères, s'y
distingua assez pour qu'on le j u g e â t apte à poursuivre ses é t u d e s
à l'Ecole de Médecine de Dakar.
Il en sortit avec le diplôme de
médecin africain et revint au pays pour pratiquer.
Son père é t a i t
planteur.
Il le devint à son tour et hérita ses fonctions de chef
de canton.
C'est donc typiquement le notable, issu d'une bourgeoisie
agricole qui doit sa fortune au cacao et au café, par le truchement
d'un vigoureux gouverneur, Gabriel Angoulvent, qui en imposa
la culture, non sans rompre maintes résistances.
I l est bon de
rappeler l ' œ u v r e de trois gouverneurs dont l'action est à l'origine
de l a richesse actuelle de l a Côte d'Ivoire : A n t o n e t t i , qui l u i donna
LE
PRÉSIDENT
HOUPHOUET-BOIGNY
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des routes, Angoulvent ses cultures d'exportations et Reste qui,
dans l'entre-dcux-guerres, porta à un haut point de perfection
l ' é q u i p e m e n t économique et la qualité des produits.
Félix Houpliouet-Boigny créa, dès 1944, le premier syndicat
agricole africain, et c'est là sans doute qu'il lit l'apprentissage,
à un échelon modeste mais au contact du réel, de ce maniement
des hommes, ressort de sa fortune politique.
Nombreux sont
les E u r o p é e n s qui l'ont connu à cette époque et qui s'accordent
sur ce point : c'est un excellent planteur, soucieux d'amélioration
des cultures, p e r s u a d é de la nécessité d'une production digne
des m a r c h é s mondiaux.
Dans les discussions professionnelles,
il est m e s u r é mais opiniâtre dès qu'il croit avoir raison.
L a Côte d'Ivoire a durement ressenti les années de guerre.
Elle est productrice de bois, de caoutchouc, d'oléagineux, de
café, de cacao, dont le gouvernement du général de Gaulle autant
que celui du m a r é c h a l P é t a i n , a exigé une fourniture intensive,
d'ailleurs pleinement justifié.
Il va sans dire, que comme toujours
en période d'hostilités, les m é t h o d e s sont improvisées et les résultats
sans rapport avec la peine, le travail exigés.
De là, un mécontentement que Félix Houphouet-Boigny é p r o u v e comme tous ses
pareils.
E n 1944, i l a créé le Rassemblement Démocratique
africain
(R.
D .
A .
) qui est plus un mouvement qu'un parti.
E n g a g é dans
la politique, i l exercera b i e n t ô t une action profonde sur ses frères,
l'habileté chez lui prenant sa source dans un bon sens paysan
qui ne l'abandonnera jamais.
Cet homme de quarante ans, largement à son aise, donc indépendant, se trouvera naturellement porté au premier rang, quand
les territoires d'Afrique acquièrent le droit d'envoyer des députés
au Parlement français.
L e d é p u t é de la Côte d'Ivoire y fera voter
une loi abolissant le travail forcé, ce qui lui confère un titre insigne
à la gratitude des Africains.
A u x E u r o p é e n s , anxieux de ne plus
disposer de m a i n - d ' œ u v r e , i l répond : « Pas un chantier, pas une
plantation ne seront a b a n d o n n é s si les conditions de vie, de salaire
sont raisonnables ».
Il a raison.
On peut le vérifier b i e n t ô t .
Pendant
la guerre, les noirs, ont été eux aussi, privés d'achats dans les
factoreries m é d i o c r e m e n t achalandées.
Quand toutes les marchandises, ustensiles et tissus reviennent en masse, personne ne rechigne
au t r a v a i l qui permet d'acheter.
Cependant, les esprits fermentent.
L'action d'une intense
propagande alliée, qui s'est exercée par les ondes et par la « bouche
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LA
REVUE
à oreilles » des marchands ambulapts, porte ses fruits.
« L a liberté
sera l a récompense des peuples encore dominés qui, par leur effort,
auront aidé à gagner une juste guerre ».
Pour les élites de l a Côte
d'Ivoire, c'est l'indépendance promise, et i l est vraisemblable
que M .
Houphouet-Boigny à l'époque partage ce sentiment.
Mieux
informé que quiconque des ressources de son pays, i l le sait de
taille à vivre seul.
L e Rassemblement démocratique africain donne
une forme à des revendications obscures mais générales, avec
l'appui d'un gouverneur de la Côte d'Ivoire inscrit au parti communiste.
M .
Houphouet-Boigny, à la Chambre des D é p u t é s , s'est
t o u r n é vers les communistes, plus accueillants et bons professeurs
de tactique.
De là un apparentement qui peut, aujourd'hui p a r a î t r e
surprenant si l'on oublie qu'au lendemain de l a L i b é r a t i o n , le
patriotisme français des communistes paraissait indiscutable.
T o u t changea lorsque M .
Ramadier renvoya ses ministres communistes.
U n nouveau gouverneur fut d o n n é à l a Côte d'Ivoire,
M .
P ê c h o u x , homme solide, parfaitement h o n n ê t e et bien d é t e r m i n é
à maintenir l'ordre.
Cette vigoureuse reprise en main affaiblit
suffisamment le R .
D .
A .
pour qu'aux élections législatives de
1951, seul M .
Houphouet-Boigny parvint à se faire élire.
Menacé
d'arrestation, on lui p r ê t e l'intention de prendre le maquis quand
le groupe parlementaire de l ' U .
D .
S.
R .
lui offre sa caution.
C'est
là le tournant décisif dans la carrière de M .
Houphouet-Boigny.
Plus à son aise dans ce nouveau milieu qu'il ne l ' é t a i t p a r m i les
communistes, i l fait ses classes parisiennes, servi par une intelligence
aiguë, et aussi par une discrétion de ton et d'allures qui tranche
sur les manières de certains de ses collègues africains que les charmes
de la capitale fascinent.
M .
Houphouet-Boigny reste ce qu'il est d'origine, un p r o p r i é t a i r e
terrien qui se veut premier chez l u i .
L'essentiel de son activité
v a au R .
D .
A .
dont i l entend* faire u n mouvement de promotion
africaine, d é p a s s a n t les frontières territoriales.
I l a un collaborateur
p a r t i c u l i è r e m e n t efficace en Jean-Baptiste Mockey, chef de son
secrétariat, q u ' a u r é o l e n t les quatorze mois de prison subis pour
son activité politique, j u s q u ' à son acquittement en 1951.
L'organisation, la technique de propagande sont d'inspirations marxistes
ce qui, aujourd'hui, n ' é t o n n e plus personne, toutes les m é t h o d e s
d'action psychologiques ayant, plus....
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