LAUTREAMONT, Isidore Ducasse, dit comte de
Publié le 22/04/2012
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Ecrivain, il est l'auteur des Chants de Maldoror et de Poésies deux fragments en prose, œuvres qui seront célébrées par les symbolistes et André Breton.
«
de l'hôtel, 23, rue Notre-Dame-des- Victoires, où il vit seul.
On ne lui connaît aucun ami,
aucune relation.
« La fin du xrxe siècle verra son poète », a-t-il écrit à la fin du Chant qu'il a publié; « il
est né sur les rives américaines, à l'embouchure de la Plata ».
Sera-t-il ce poète dont il annonce
la venue avec solennité? En r86g, il publie chez le libraire Albert Lacroix les Chants de Maldoror
par le comte de Lautréamont (Chants I, II, III, IV, VI).
Il a sans doute pris son pseudonyme
au héros d'un roman d'Eugène Sue : Latréaumont, après l'avoir légèrement modifié.
Cependant, Albert Lacroix, craignant des poursuites « à cause de certaines violences de
style qui en rendaient la publication périlleuse », suspend la vente des Chants ct demande à
l'auteur d'amender son texte.
Celui-ci s'y refuse d'abord, puis s'y résout.
II meurt avant d'avoir
complètement rempli sa promesse.
Après la faillite de Lacroix, un libraire belge, chargé de ses
intérêts, fait
brocher les exemplaires de l'édition de r86g sous une nouvelle couverture.
L'échec de la publication des Chants, en 186g, a suffisamment affecté Lautréamont pour
que.
les yeux maintenant « ouverts » il déclare vouloir « renier son passé » : «Je ne chante
plus que l'espoir» écrit-ille 21 février r87o à son imprimeur-éditeur de Belgique; «mais pour
cela il faut d'abord attaquer le doute de ce siècle (mélancolie, tristesses, douleurs, désespoirs,
hennissements lugubres, méchancetés artificielles, orgueils puérils, malédictions cocasses, etc.) ...
»
Il a fait plus que penser à ce changement d'orientation puisqu'il annonce : « Dans un ouvrage
que je porterai à Lacroix aux premiers jours de mars, je prends à part les plus belles poésies de
Lamartine, de Victor Hugo, d'Alfred de Musset, de Byron et de Baudelaire, et je les corrige
dans le sens
de l'espoir; j'indique comment il aurait fallu faire ...
» Se moque-t-il? Il revient
en tout cas à ce propos dans une lettre adressée à Darasse le r 2 mars 1870 : « La poésie du doute
(à laquelle il reconnaît avoir sacrifié) est « radicalement fausse; pour cette raison (et il souligne)
qu'on y discute les principes et qu'il ne faut pas les discuter ...
Voilà pourquoi j'ai complètement
changé de méthode, pour ne chanter exclusivement que l'espoir, l'espérance, le calme, le
bonheur, le devoir.
»
En mai r 870, sous forme de «préface à un livre futur », paraissent deux plaquettes intitulées
Poésies, signées Isidore Ducasse.
L'auteur a tenu parole ct il est significatif qu'il abandonne, en
même temps que l'inspiration des Chants, le pseudonyme de Lautréamont.
La publication passe
en tout cas complètement inaperçue et le texte s'en perd.
Remy de Gourmont le retrouve à la
Bibliothèque
nationale et le recopie.
Le jeune auteur de Poésies n'avait cependant plus que quelques mois à vivre.
En r86g
et r87o il a changé plusieurs fois de domicile : 32, faubourg Montmartre, 15, rue Vivienne,
puis
de nouveau faubourg Montmartre, au 7, où il meurt, pense-t-on, d'une maladie de poitrine.
Inhumé le 25 novembre 1870 au cimetière du Nord, il l'est à nouveau le 20 janvier 1871 dans
une concession temporaire depuis désaffectée et dont le terrain a été racheté par la ville de Paris
pour d'autres usages.
On a donc perdu également toute trace de sa dépouille.
Il est venu à nous
dans le minimum d'appareil biographique.
Une carrière aussi brève et aussi énigmatique, marquée par le coup de tonnerre à retar
dement des Chants de Maldoror et l'apparent reniement de Poésies, donnait de substantiels aliments
à la légende.
Devenu patron d'une école littéraire : le surréalisme, Lautréamont, qui a vécu
hors
de la vie littéraire de son temps et, pourrait-on croire, hors de toute vie, n'a pas tardé à
passer pour un contempteur universel :de la littérature, cela va sans dire, mais aussi de la condition
humaine en général.
Son œuvre est devenue l'incarnation de la révolte à l'état pur, tandis que
sa figure, idéalement reconstruite et environnée d'éclairs, se détache sur un ciel de soufre et de
poix.
Il est par excellence le Poète, le Révolté, le Maudit.
Blasphémateur, sacrilège, destructeur
des morales, religions, conventions, il se hausse, il hausse l'homme qu'il voulait déconsidérer,
au rang de démiurge du mal.
Produit de la folie, - on ose de moins en moins l'affirmer, - ou haut produit du génie
poétique,
les Chants de Afaldoror ne livrent pas facilement leur secret.
En analyser le contenu,
en apprécier la forme? Nul secours.
A chaque tentative de dévoilement, l'obscurité se reforme
quant au pourquoi et au comment.
Dans quelle intention Lautréamont les a-t-il écrits et, par
eux, qu'a-t-il voulu dire? Quels liens secrets, impossibles à dépister, rivent l'homme à son œuvre?
Chacun propose sa clef unique, capable selon lui d'ouvrir le saint des saints, et, chaque fois,
l'œuvre sc referme un peu plus sur son mystère.
Est-elle la « Bible de l'inconscient »? Une
« grandiose fresque dépeignant toute l'expérience humaine, depuis l'en deçà de la naissance
253.
»
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