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Carpentier (Alejo)

Publié le 03/01/2012

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1. Le romancier cubain Alejo Carpentier, l'un des écrivains les plus doués et les plus significatifs de l'Amérique latine contemporaine, s'est surtout penché sur les influences et les civilisations multiples qui se sont superposées dans cette partie du monde. Né en 1904, un an avant l'indépendance cubaine, d'un père français, il était bien placé pour vivre la rencontre des vieux atavismes et des idées nouvelles.

2. Alejo Carpentier a produit peu et tard. Il avait atteint la quarantaine quand il attira l'attention en publiant cc Le Royaume de ce Monde ", " Le Partage des Eaux" (Prix français du meilleur roman étranger en 1956), "Chasse à l'Homme .. et "Le Siècle des Lumières "· Comme les meilleurs écrivains des Tropiques, il écrit une prose somptueuse, riche en métaphores.

« Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)ALE JO CARPENTIER né en 1904 « LA grandeur de l'homme consiste à vouloir améliorer le monde, à s'imposer des tâches.

Voilà pourquoi, écrasé par les douleurs et les tâches, beau dans sa misère, capable d'amour au milieu des malheurs, l'homme seul peut trouver sa grandeur, sa plus haute mesure dans le royaume de ce monde.

» Serait-il excessif de trouver, dans ces quelques lignes, comme une définition, par Alejo Carpentier lui-même, de son art, de l'esprit qui préside à son œuvre? Elles sont extraites de son premier livre traduit en français, le Royaume de ce monde.

Et ce titre pourrait couvrir l'œuvre, la dominer comme une flamme.

Il est peu d'écrivains qui, de nos jours, aient un tel souci de voir l'homme régnant sur un monde total, un tel désir de voir se renouer les liens d'une entente entre l'homme et la somptuosité de la terre.

Que l'homme soit sans cesse menacé d'être privé de la « jouissance >> de merveilles à lui seul destinées, voilà sans doute l'un des constats de l'œuvre et le départ d'une protestation singu­ lièrement généreuse.

Relisons le chef-d'œuvre d' Alejo Carpentier, ce Partage des Eaux (Los pasos perdidos) qui l'imposa comme l'un des plus hauts écrivains de ce temps.

Le narrateur y dénonce avec lassitude son existence - ou plutôt son inexistence - dans une ville géante des U.S.A.

Il est rouage parmi les autres, il se perd dans une« mécanisation» générale.

Il a conscience d'être dans « l'ère de l'homme-abeille, de l'homme-néant, où les âmes ne se vendent pas au diable, mais au comptable ou au garde-chiourme», et il s'écrie :«Vide! Je suis vide!».

La chance veut qu'on lui confie une mission en des terres lointaines où des Indiens habitent.

Il va remonter un grand fleuve- et ce sera pour lui une remontée aux sources.

Un soir, il voit un feu de camp sur la berge.

Et soudain la vérité se démasque : il comprend que lui, l'homme esclave de l'auto­ matisme, n'a pas vu de feu « réel », de feu « vivant » depuis longtemps.

Loin du néon, il lui faut les lumières naturelles : le soleil, la lune, le brasier, l'éclair.

Il va vivre chez les Indiens.

Certes, la « civilisation » le rappellera, et, quand il s'en dégagera une seconde fois, ce sera un échec, le paradis entrevu ne se retrouvera plus.

Pourtant, ce qui est « authentique » aura pris une revanche.

L'option politique d'Alejo Carpentier s'accorde à cette volonté de rétablir l'homme dans son royaume de ce monde.

Le peuple cubain ne lutte pas seulement pour« sa »liberté, il lutte pour « la » liberté, donnant une leçon à des nations trop enclines à se résigner.

Or, les problèmes politiques - et particulièrement celui de la lutte contre les tyrannies, « toutes >> les tyrannies - inspirent non moins l'œuvre.

Les livres d' Alejo Carpentier dénoncent les spoliations, glorifient l'inaliénable.

La Liberté est ici-bas.

Cette « morale » n'est pas extérieure à l'œuvre.

Spontanément, elle se confond avec le fait d'écrire.

Jamais nous n'avons le sentiment d'une démonstration - et c'est ici que se manifeste la qualité de l'écrivain.

Dans la puissante coulée du récit se voient entraînées des connaissances multiples, qui déposent en nous, après la crue de la lecture, de denses alluvions.

La plus riche culture nous enrichit, qui embrasse l'Histoire, l'ethnographie, le folklore, la botanique, les sciences humaines, la philosophie, la musicologie, la musique.

Cet embrassement ne nuit jamais à l'action, au rebondissement des situations, à une invention romanesque constante.

De l'œuvre entier naît le charme d'un vaste poème.

Poème qui est, redisons-le, celui de l'homme redevenu souverain de son royaume, le monde.. »

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