ALFRED DE MUSSET
Publié le 17/01/2022
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Dans quelle catégorie classer les pièces d'A. de Musset? Le poète ne les a pas écrites pour être jouées, et elles n'appartiennent à aucun genre déterminé. Si nous en parlons au chapitre du Drame, c'est que les principales sont la réalisation la plus complète et la plus artistique du programme romantique.
Musset avait voulu faire du théâtre. Le ter décembre 1831, l'Odéon représentait la Nuit vénitienne, comédie en un acte et en prose, qui fut sifflée. Heureuse chute! Musset, dépité, renonça à travailler pour la scène, et donna librement carrière à sa fantaisie, dans ses essais dramatiques. Il publia, en 1832, sous ce titre : Un Spectacle dans un fauteuil, trois essais : les Marrons du feu, la Coupe et les Lèvres, A quoi rêvent les jeunes filles. En 1833, pendant un séjour à Venise, il écrivit Lorenzaccio, drame admirable par l'intensité et le relief. C'est l'histoire du meurtre d'Alexandre de Médicis par son neveu Lorenzo, d'après la chronique de Varchi. — A dater de 1833, Musset donne, dans la Revue des Deux Mondes, toutes les autres pièces réunies aujourd'hui sous le titre général de Comédies et Proverbes; les principales sont : les Caprices de Marianne, André del Sarte, Fantasio, On ne badine pas avec l'amour, Il ne faut jurer de rien; et dans le genre mondain : Un Caprice, Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermée.
Musset a écrit ses pièces sans songer qu'en un décor de bois et de toile peinte, des acteurs parlent à un public. Aucune tradition, aucune convention, aucune nécessité pratique ne l'enchaînent; il voit, il sent, il imagine, et il fixe au passage ce qui ravit ses yeux ou son coeur. Ses personnages sont variés comme la nature; il n'a pas besoin de subordonner leur diversité à un caractère dominant; et cependant ils sont très tranchés, très différents les uns des autres.
L'exemple de Musset prouve que le génie, le don, peut suppléer au métier, ou dû moins peut suggérer au poète par intuition tout ce que le métier apprend aux autres. Mais cet exemple est unique dans l'histoire de notre théâtre.

«
Pourtant son théâtre sort de 1 'ombre (U n caprice
remporte un grand succès en 1847) et sa situation
s'améliore par l'obtention d'une charge de biblio
thécaire.
Il
n'en va pas de même, hélas, pour sa
santé usée par les multiples dérèglements de sa vie.
En quelques années, Musset a donc épuisé
tout le soufRe qui l'habitait.
Personnalité corn- plexe
et souvent déroutante, il apparaît d'abord
comme un homme de contrastes auquel parais
sent s
'appliquer ces vers de Namouna :
Il était très joyeux , et pourtant très maussade [ ...
]
Extrêmement futile, -et pourtant très posé,
Indignement naïf, -et pourtant très blasé,
Horriblement sincère, -et pourtant très rusé.
LE DRAMATURGE
Dès 1827, Musset faisait part à Paul Foucher
de son désir « d'être Shakespeare ou Schiller ».
C'était marquer une prédilection pour le théâtre,
que même 1 'échec de La nuit vé nitienn e ne put
entamer.
D'ailleurs, « lyrique ou romancier,
Musset n'estjamais et toujours qu'un dramaturge
qui s'essaye, se cherche , se confesse, se révèle» (1).
Un théâtre à part
Musset, qui n'a jamais lancé de manifeste
comparable à ceux de Vigny ou de Hugo, ne
s'est toutefois pas privé d'exprimer ses goûts
et ses conceptions dramatiques.
Comme sa
position littéraire , son attitude à 1 'égard du
théâtre diffère de celle de ses contemporains :
s'il parle de Racine et de Shakespeare, ce n'est
plus comme Stendhal pour les opposer, mais
pour tenter une habile conciliation.
En effet,
l '
artiste
[ ...
] comme Racine et le divin Shakespeare
Monte sur le théâtre , une lampe à la main,
Et de sa plume d' or ouvre le cœur humain.
Cette admiration pour Racine l'amène à préférer
les caractères
à l'intrigue :
Qu'importe le combat, si l'éclair
de l'épée Peut nous servir dans l'ombre à voir les combat-
[tants?
Ainsi
naît un théâtre doublement original :
destiné
à la lecture, il se construit en dehors de
toute préoccupation ou de toute entrave scé
nique; composé à l'écart des théories, il échappe
à la rhétorique classique comme à l'emphase
romantique .
D'où ces décors imaginaires, ces
époques éthérées qui servent de toile de fond
aux fantoches -ces créations authentiques de
la fantaisie de Musset - comme aux héros .
Il
n'est que de se pencher sur deux pièces , aux
J.
Yves Florenne, « Préface » au Théâtre compl et de Musset, Le Livre de Poche, p.
14.
tons fort différents cependant, pour voir com
ment s'anime le théâtre de Musset.
Le drame sentimental : « On ne badine pas
avec l'amour
»
Publié en 1834, On ne badine pas avec l'amour
tient étroitement à la vie du poète et tire son
origine de la crise qui, à Venise, a brisé sa liaison
avec
George Sand.
Devenu docteur,
Perdican revient au château fami
lial où il retrouve sa cousine Camille : son empresse
ment ne rencontre que froideur chez la jeune fille.
Déçu,
le jeune homme ébauche une aventure avec
Rosette, la sœur de lait de Camille.
Cette dernière
confie d'ailleurs
à Perdican qu'elle va prendre le voile.
Apparemment indifférent, Perdican poursuit
sa cour auprès de Rosette.
Toutefois, après avoir
découvert une lettre adressée par Camille
à une
religieuse, Perdican décide de rendre sa cousine
jalouse en épousant Rosette.
Tour à tour chacun
des deux jeunes gens essaye de faire plier 1 'autre,
jusqu'au moment où s'avouant leur amour, ils
provoquent la mort de Rosette qui assistait cachée à l'entretien.
Dorénavant cette mort les sépare à jamais.
Si le
ton s'assombrit au fur et à mesure que
progresse la pièce, il serait faux de croire que le
comique en est exclu : le drame de l'orgueil et de
la jalousie que jouent Camille et Perdican a, en
effet, pour spectateurs des fantoches ridicules -
le
Baron prétentieux, Blazius et Bridaine curés
ivrognes
et goulus, Dame Pluche sèche et prude
mais savoureux par la vie mécanique et carica
turale dont Musset les a animés (1).
De plus, si le
monde de ces marionnettes et celui des premiers
rôles s'excluent,
il n'en reste pas moins vrai que
l'agitation des fantoches commente ou annonce
le drame principal.
J.
Que l'on s e reporte à l'entrée de Blazius et de Darne Pluche dont le parallélisme souligne l'aspect vide et méca nique des personnages ..
»
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