Alain-Fournier
Publié le 17/01/2022
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Le 11 août 1910 Henri-Alban Fournier ( 1886-1914) écrit de Paris à son ami Jacques Rivière et, parlant du livre qui en 1913 s'appellera Le Grand Meaulnes, il déclare : « De plus en plus mon livre est un roman d'aventures et de découvertes.« Le 20 septembre de la même année, Alain-Fournier se trouve à La Chapelle d'Angillon, petit village de cette Sologne où il a passé toute son enfance. Il écrit à sa soeur Isabelle:« Pendant quinze jours je me suis efforcé de construire artificiellement....
«
ce livre comme j'avais commencé.
Cela ne donnait pas grand
chose.
A la fin, j'ai tout plaqué et j'ai trouvé mon chemin de
Damas un beau soir.
Je me suis mis à écrire simplement, directement, comme une de mes lettres, par petits
paragraphes serrés et voluptueux, une histoire assez simple qui pourrait être la mienne.
J'ai plaqué toute cette abstraction
et cette philosophie
dont j'étais empêtré.
Et le plus épatant,
c'est qu'il y a tout quand même, tout moi et non pas
seulement une de ses idées.
» Relire Le Grand Meaulnes, quinze ou vingt ans après
l'avoir
lu pour la première fois, c'est retrouver, manifeste,
l'évolution du projet
d'Alain-Fournier; c'est ressentir le
tiraillement et l'hésitation d'un livre bâti en ellipse autour de
deux foyers contrastants, Augustin Meaulnes et François Seurel le narrateur; mais c'est aussi tenter de préciser les
articulations de ces deux côtés du texte: l'aventure et le souvenir, c'est-à-dire, pour reprendre les propes termes de
l'auteur, «l'imaginaire» et «l'humain».
Le premier de ces aspects -l'aventure -est si puissant qu'il a provoqué une spécialisation du livre, devenu un « livre pour adolescents», un de ces livres à lire après Jules Verne et en même temps que Saint-Exupéry.
Il s'agit pourtant d'un
assez pauvre roman d'aventures, statique et décevant.
S'il est
vrai qu'Augustin a la carrure d'un héros acceptable auquel le
lecteur adolescent peut s'identifier, les autres éléments du
roman
d'aventures- la princesse, le château, la carte, la fête sont, les uns après les autres, l'objet d'une dégradation
irrémédiable :
le château est abattu, la princesse meurt, la carte était inutile, la fête devient un vulgaire pique-nique, etc.
et
le bel aventurier repart en abandonnant l'ami fidèle.
Les
coïncidences sont un peu trop visibles, les personnages un
peu
trop aveugles.
La dernière phrase du livre, « et je l'imaginais, la nuit, enveloppant sa fille dans son manteau, et
partant avec elle pour de nouvelles aventures», a beau
relancer
le mouvement, le lecteur sent bien qu'Augustin n'est
pas Fantômas et que le livre n'aura pas de suite.
Livre unique,
et pas uniquement parce que la mort frappe Fournier un an
après la publication de son roman, dans lequel l'aventure
visible est
la mise en scène d'une autre aventure, celle du
passage de l'enfance à l'âge adulte (ou de son impossibilité) :
roman
de l'adolescence, donc, plutôt que roman pour
adolescents, roman d'éducation ou d'apprentissage à la façon.
»
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