Whistler: LA MÈRE DE L'ARTISTE
Publié le 14/09/2014
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«
Le Radeau de la Méduse, Géricault (Paris, musée du Louvre) .
Ensemble et (pag e de gauche) détail .
représenter la mort, Géricault s'astreint à la
côtoyer en peignant, à l'hôpital Beaujon , des
têtes de moribonds ou, dans son atelier , des
membres coupés dont il étudie la dégradation.
Rien n'échappe au souci d'authenticité, pas
même le décor de l'action : en mars 1819 , le
peintre étudie les paysages marins du Havre, ren
dant plausibles sur sa toile les lueurs matinales
du ciel ou les lames qui menacent l'embarcation.
Préparé par ce travail de laborat oire, l'effet est
sais issant, d'autant qu'il est accentué par une
composition expressive.
•Ün se croit déjà un
pied dans l'eau •, note Delacroix , pensant à
!'équilibre précaire du radeau, qui forme une
diagonale hissée vers le bateau qui , au loin ,
distille une note d'espoir.
Une allégorie du malheur
La scène ainsi restituée suscite l'émotion : on ne
manque point d'exploiter celle-ci dans une
vigoureuse polémique.
Beaucoup voient s'expri
mer là une position antimonarchiste, fustigeant
l'incompétence du capitaine de la Méduse, un
ancien émigré nommé à ce poste par protec
tion.
C'es t oublier que Géricault a volontaire
ment éliminé du titre de son œuvre tous les élé
ments qui feraient trop explicitement allusion à
l '
accident.
Il veut, certes, traiter d'un sujet
Théodore Géricault
Né à Rouen en 1791, Géricault étudie
d 'abord chez Carle Vernet.
Il y affirme la
passion du cheva l qui semble guider sa
vie et son œuvre .
Il passe ensuite dans l'atelier de Guérin et fréquente assidû
ment le Louvre .
En 1812 , il obtient son
prem ier succès au Salon, avec /'Officier de chasseurs à cheval chargeant (aujourd'hui au musée du Louvre ).
Un séjour en It alie , en 1816-1817 , est pour lui l'occasion d 'une réfle xio n sur les œuvres classiques, influe nce sensible dans les différentes versions de la Course des chevaux barbes.
Ce travail précède l'élaboration en
moins d'u n an du monumental Radeau
moderne, mais il le fait tout en ménageant la
noblesse de l'expression, en éliminant le pitto
resque et!' anecdote.
Les lithographies publiées
dans les journaux pour illustrer l'événement
l'inspirent moins que les grandes œuvres de
ses aînés : l'enchevêtrement des corps à demi
nus rappelle le jugement dernier de Michel-Ange
et surtout la Chute des damnés de Ruben s.
La
figure méditative du père retenant le cadavre
de son fils, au premier p lan , est digne de
l'antique; enfin, l'exposition des malades et
des mourants est proche de celle d'une toile
fameuse de Gros, les Pestiférés de Jaffa (180 4).
Les études qui se succèdent montrent comment
de la Mé duse , occasion au Salon de
1819
de q uelques remous politiques .
La
présentation de l 'œuv re en Angleterre
est saluée d'un succès plus franc tandis ,
que l 'artis te y cultive son intérêt pour les sujets modernes (le Derby d'Epsom, 1821, musée du Louvre) .
Le ré alism e sci en ti fique de Géricault , déjà présent dans les études qu 'il mène à l 'hô pital Beaujon pour le Radeau, trouve son expression ult ime dans les cinq Portraits d'aliénés , où l'artis te se livre à l'observation clinique de la monomanie.
Gé ricault meu rt à 33 ans , en 1824 ,
après une longue agonie consécutive à plusieurs accidents de cheval.
Géricault épure progressivement son sujet : les
uniformes identifiables dans certains dessins
disparaissent ici au profit de nudités intempo
relles.
•L'auteur n'a pas cru devoir indiquer la
nation ni la condition de ses personnages.
Sont
ils grecs ou romains? Sont-ils turcs ou français ?
Sous quel ciel naviguent-ils? • s'interroge un cri
tique, mal à propos.
La misère de l'homme,
rendue plus pesante par les tons sourds du colo
ris, est le motif du tableau .
Est-ce pour indiquer
son caractère universel que Géricault place un
nègre au somme t de la pyramide formée par
l'accum ulation des corps? Voilà une précision
lourde de symbole, alors peu remarquée..
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