Vincent Van Gogh (Exposé – Art – Collège/Lycée)
Publié le 15/11/2018
Extrait du document
AU CINÉMA
• La Vie passionnée de Vincent Van Gogh (Lust for Life, 1956), de Vincente Minnelli, avec Kirk Douglas dans le rôle-titre, Anthony Quinn interprétant Gauguin. Une vision magnifique, exaltée, haute en couleur comme il se doit, de la vie de l'artiste tourmenté.
• Rêves (Dreams, 1990) d'Akira Kurosawa, avec Martin Scorsese dans le rôle de Van Gogh : par le biais d'un conte poétique, on «entre» dans un tableau de l'artiste.
• Von Gogh (1991), de Maurice Pialat, avec un remarquable Jacques Dutronc dans le rôle-titre. Évocation sensible, vibrante, des derniers jours de la vie de l'artiste à Auvers-sur-Oise, dans la maison du Dr Gachet.
VIOLENCE EN COULEUR
Si aujourd'hui les reproductions de ses Tournesols ou de ses Iris ornent les murs de nombreux foyers, après que ses toiles ont battu des records de prix, Vincent Van Gogh (18531890) a été de son vivant tout à fait méconnu. Sa vie fut une épreuve à tous égards, financièrement bien sûr, mais surtout psychologiquement, puisqu'elle s'est achevée en suicide. Il n'a pas fait école, aucun mouvement pictural ne porte son nom, et pourtant sa manière de «s'exprimer fortement» a influencé la peinture d'avant-garde au xx\" siècle. Précurseur des fauves et des expressionnistes, le « rouquin fou» est à présent reconnu comme un génie.
UNE JEUNESSE SOMBRE, FROIDE, STÉRILE
• Le 30 mars 1853, Vincent Willem Van Gogh vient au monde à Groot Zundert, une localité située dans le nord du Brabant hollandais, à trente kilomètres de la ville belge d'Anvers. Son père, Theodorus Van Gogh (1822-1885), est un austère pasteur protestant - comme son propre père -, doté de dix frères (dont trois sont marchands d'art). Sa mère, Anna Cornelia Carbentus (18191907), est la fille d'un relieur à la cour de La Haye.
• Quand on sait qu'un an avant, jour pour jour, l'enfant premier-né du couple, prénommé Vincent, est mort à sa naissance, la coïncidence de la date ajoutée au même prénom semble destiner le nouveau-né à un rôle de substitut au sein de sa famille.
• Celle-ci, comme l’artiste s'en plaindra plus tard, est dominée par la bigoterie, l'étroitesse d'esprit, l'autoritarisme du père, un homme irritable, dur, qui jamais n’exprimera la moindre tendresse ni compréhension envers Vincent.
• Cinq autres enfants vont naître : en 1855, Anna Cornelia; le 1“ mai 1857, Theodorus, dit Théo, qui deviendra marchand d'art - une sorte de tradition familiale, quand on ne devient pas pasteur; en 1859, Elisabetha Huberta ; en 1862, Wilhelmina Jacoba, qui finira ses jours en 1941 dans un asile d'aliénés; enfin, en 1867, Cornélius Vincent, qui se suicidera à l'âge de trente-trois ans.
• De 1864 à 1866, Vincent va au collège à Zevenbergen, puis, jusqu'en mars 1868, il fréquente l'institut technique, à Tilburg. Il interrompt alors ses études et retourne à Groot Zundert Déjà, depuis au moins l'âge de neuf ans, il dessine beaucoup.
• En 1869, à seize ans, il part pour La Haye où, grâce à l'appui de son oncle paternel Vincent («oncle Cent»), marchand d'art, il devient commis à la filiale de la maison d'art Goupil & Cie de Paris. Dans le cadre de cette entreprise, pendant des années, lui passeront entre les mains toutes sortes de reproductions artistiques qui façonneront son esprit.
• En 1871, le père de Vincent est nommé pasteur à Helvoirt.
• En 1872, Van Gogh passe les vacances chez ses parents. Au mois d'août, Théo le rejoint À partir de ce moment commence une abondante correspondance (publiée sous le titre Lettres à Théo) entre les deux frères; grâce à cet échange épistolaire, où Vincent se confie avec beaucoup de sincérité et de spontanéité, on en sait beaucoup aujourd'hui sur l'artiste, tant sur ses tourments psychologiques que sur sa conception de l'art.
• En janvier 1873, à Bruxelles, Théo entre à son tour chez Goupil & Cie, tandis qu'au mois de juin Vincent est envoyé à la filiale de Londres, où il restera deux ans et fera l'expérience d’une affreuse solitude. Amoureux malheureux d'Eugénie (ou Ursula, selon les sources) Loyer, la fille de sa logeuse - à moins que ce ne soit d'une Hollandaise nommée Caroline Haanebeek -, il devient dépressif et se jette dans le mysticisme.
• Au cours de séjours à Bruxelles et à Paris, il visite néanmoins le Salon, le Louvre et le musée du Luxembourg, où il est touché par la peinture réaliste française du début du XIXe siècle et l'école de Barbizon.
• En mai 1875, Vincent revient à Paris, mais il se montre peu assidu chez Goupil, préférant hanter les musées. Il s'enthousiasme pour Corot et les peintres hollandais du xvue siècle.
La crise mystique
• En avril 1876, Van Gogh est renvoyé de la maison Goupil ; il part pour Ramsgate, près de Londres, où il devient répétiteur dans l'école du pasteur William Port Stokes, puis prédicateur assistant et instituteur auprès du révérend T. Slade Jones, un pasteur méthodiste. Fin octobre,
La découverte des impressionnistes
• Désormais à l'abri du besoin grâce à l'hospitalité de Théo, à Pigalle puis à Montmartre, et stabilisé par sa relation affectueuse avec son frère, Vincent se lie, toujours grâce à Théo, avec Toulouse-Lautrec et Émile Bernard, qui peint un portrait de Théo en 1888; il rencontre aussi Monet, Sisley, Pissarro, Degas, Renoir, Seurat, Signac. Il se frotte à l'art contemporain, et sa palette s'éclaire
«
à
ce contact- c'est l'époque des
premiers Tournesols-, et il va «sur le
motif», à l'Instar des impressionnistes,
peindre des vues urbaines (Le Pont
d'Asnières, Le Boulevard de Clichy) et
des paysages des bords de Seine :
Asnières, Bougival, Chatou, Argenteuil,
etc.
Quelque deux cent trente peintures
réalisées en deux ans à Paris
témoignent de l'évolution de sa
peinture vers les couleurs vives et de
son état d'esprit plus gai et comme
apaisé.
LE GOOr DES JAPONAJ5ERIE5
• Il se prend d'une véritable passion
pour l'art japonais, alors très en vogue,
et collectionne les estampes.
On en voit
d'ailleurs à
Tanguy
(1887-
1888), un
marchand
de couleurs
et mécène que fréquentent Vincent et
ses amis, le groupe dit du «Petit
Boulevard» (par opposition au «Grand
Boulevard», ceux qui exposent dans la
galerie de Théo : Monet, Sisley,
Pissarro, Degas, Seurat).
• Van Gogh se lie avec Agostina Segatori,
111•11!1••••1 patronne
du
cabaret
Tam bourin,
et elle pose
pour lui
(L'Itll lienne,
1887), même
pour des nus,
les rares que
le peintre ait
réalisés.
• Pendant l'hiver 1887, Van Gogh se lie
d'amitié avec Paul Gauguin (1848-
1903).
Il expose quelques-uns de ses
tableaux dans le magasin du Père
Tanguy.
• Irascible, dépressif, intoxiqué
d'absinthe, une boisson destructrice qui
n'est pas pour rien dans l'altération de
son comportement, Van Gogh se rend
odieux envers Théo, et leurs relations
se détériorent au point que Vincent
décide de quitter Paris.
SOUS LE SOLEIL EXACTEMENT
À ARLES
• En 1888, il s'installe à Arles, d'abord
au restaurant Carrel, puis, à l'entrée
de la ville, dans une «maison jaune»
qui semble faire écho à la «haute note
jaune» qu'inspire à sa palette l'intense
soleil provençal.
On la trouve tant dans les
multiples variations sur les
Tournesols, dans les Meules de foin et
Le Pont de Langlois que dans le ciel
d'un Mas aux Saintes-Mories, dans
le fond du portrait de L'Arlésienne
(Mme Ginoux) ou à la terrasse d'un
Café, le soir.
• Théo verse à nouveau à son frère une
rente pour qu'il ne meure pas de faim
et s'occupe d'exposer dans la capitale,
au Salon des artistes indépendants,
deux vues de Paris et une nature morte.
AVEC GAUGUIN
• Désireux de fonder sur le modèle
japonais une communauté d'artistes,
un «atelier du Sud» dont Gauguin serait
l' « abbé», Van Gogh -qui a hérité de
l'oncle Cent-invite celui-d à le
rejoindre à Arles.
Gauguin arrive le
22 octobre 1888.
• Ils cohabitent dans la maison jaune, et
cette période est très productive pour
chacun.
C'est alors que Vincent peint sa
Chambre en tons chauds et lumineux :
« ...
simplement la couleur doit ici faire
la chose e� en donnant par sa
simplification un style plus grand aux
choses, être suggestive ici du repos ou
du sommeil en général.
Enfin, la vue
du tableau doit reposer la tête ou plutôt
l'imagination.» • Le tempérament des deux artistes
est diamétralement opposé : autant
Gauguin est serein, sûr de lui, autant
Van Gogh est angoissé, brouillon,
instable.
Bientô� la belle amitié vire au
cauchemar.
Vincent est sujet à des crises
de fureur soudaines et injustifiées.
• Le soir du 23 décembre 1888, après
seulement deux mois de cohabitation,
Gauguin subit un accès de colère
particulièrement violent-Vincent le
menace de son rasoir -aussi, exaspéré,
va-t-il dormir à l'hôtel.
Van Gogh ne se
domine plus et tourne sa violence
contre lui-même : il se mutile en se
tranchant à ras (dixit Gauguin) l'oreille
gauche, ou seulement le lobe.
Il emballe
la chose dans un papier et l'apporte, on
ne sait trop pourquoi, à une prostituée
prénommée Rachel, connue des deux
artistes, puis il rentre se coucher,
inondant son linge de sang.
• Selon certains biographes de l'artiste,
toute cette histoire serait sujette à
caution, et la blessure aurait en fait été
accidentelle, au cours d'une bagarre
entre les deux hommes.
• Tandis que Gauguin, qui n'en peut plus, part
dés le lendemain matin pour Paris,
la maréchaussée, alertée par Rachel, se
charge d'hospitaliser Vincent à Arles.
• Deux autopot1l'aits datés de janvier
et février 1889 montrent Van Gogh avec
un bandage (du côté droit, car le peintre
s'est regardé dans un miroir pour
réaliser ces toiles).
lf.U.I!ii LE MAL·hRE
• Un sentiment de culpabilité ancré
depuis la petite enfance, la conviction
d'avoir déçu ses parents, les échecs
amoureux répétés, la solitude affective,
la difficulté d'établir des rapports
sociaux faciles et durables, un sentiment
d'exclusion pour «le dernier des
derniers», qui ne vend même pas sa
peinture, et de dépendance à l'égard
de Théo :tout cela participe au tableau
clinique de l'état de Vincent Van Gogh.
S'y ajouten� selon les médecins qui
l'ont examiné à l'hôpital et à l'asile,
peut-être l'épilepsie, voire la
schizophrénie, deux maux aggravés par
l'abus d'absinthe, une véritable drogue
surnommée «fée verte», ou «muse
verte» chez les artistes- Toulouse
Lautrec, Gauguin, Daumier, Modigliani,
en sont gros consommateurs,
Baudelaire l'apprécie, Manet et Degas
en tirent des sujets de tableaux -, et qui
fait alors des ravages.
• Secouru une nouvelle fois par le fidèle
Théo, jamais découragé, qui s'est
précipité auprès de lui, Van Gogh
revient à la maison jaune au début de
l'année 1889.11 est aidé par le facteur
Roulin et sa femme (devenus des amis
du peintre dès le début de son séjour en
Provence, ils lui ont servi plusieurs fois
de modèles) et par un pasteur nommé
Frédéric Salles.
• Interné de nouveau à l'hôpital, après
une période de crise aiguë, il revient
chaque jour dans la maison jaune pour
peindre.
LE «ROUQUIN FOU»
• En mars, une pétition est adressée au
maire d'Arles, réclamant l'internement
du «rouquin fou».
Malgré la
protestation de ses amis, qui arguent
qu'il ne fait de mal à personne, sauf
à lui-même, mais que cela n'est pas
un crime, Van Gogh est reconduit à
l'hôpital sur ordre de la police.
• En avril, Théo épouse en Hollande
Johanna Bonger.
Le couple vit à Paris.
·Le 8 mai 1889, Vincent se sent si mal
qu'il demande lui-même à être interné
à l'asile Saint-Paul-de-Mausole, près de
Saint-Rémy-de-Provence, dirigé par le
Dr Peyron.
• Dans les périodes où sa maladie le lui
permet, il «s'acharne à [son] travail»,
avec le sentiment que le temps presse,
qu'il faut lutter, car« une crise plus
violente peut détruire à tout jamais [sa] capacité
de peindre».
Outre Le Portrait
du surveillant en chef, M.
Trobuc (sept.
1889), il peint notammen� en plein air,
la Nuit étoilée et les Cyprés Gu in 1889),
Les
Oliviers
(del
oronge)
(nov.
1889),
Hôpital
Saint
Pau/à
Saint
Rémy
et Les
paveurs (boulevard de Saint-Rémy)
(déc.
1889) :lignes tourmentées,
couleurs épaisses, violentes, appliquées
d'un geste brutal, flashs et tourbillons
de lumière dans le ciel, végétation torse,
tempétueuse, trahissent son état
émotionnel.
• De nouvelles interprétations de sa
Chambre, dans des tons froids, éteints,
témoignent en septembre 1889 du
changement psychologique de l'artiste.
Il exécute aussi des copies de Doré,
Daumier, Millet et Delacroix.
• Grâce à Théo, deux tableaux de
Vincent sont exposés au Salon des
artistes indépendants, à Paris.
• En novembre 1889, invité à la huitième
exposition des Vingt (XX), à Bruxelles,
Vincent envoie six toiles.
• C'est alors que Les Vignes rouges
(datées de nov.
1888) sont achetées
400 francs par Anne Boch, la sœur
d'Eugène Boch, un peintre que Vincent
a rencontré à Arles.
C'est là le seul et
unique tableau qui a été vendu du
vivant de l'artiste.
·À la fin du mois de décembre 1889,
lors d'une crise aiguë, Vincent tente
d'avaler des couleurs.
Puis, comme
chaque fois, il va un peu mieux et
reprend espoir :.
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