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Velàzquez peint la famille de Philippe IV: LES MÉNINES

Publié le 14/09/2014

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Pour exécuter cette oeuvre, Velàzquez s'est placé devant l'infante et sa suite. Le roi et la reine étaient derrière lui, à moins qu'il n'ait placé un portrait de ces derniers de telle sorte qu'il se reflète dans le miroir disposé au fond. Mais, en même temps, le peintre s'est repré­senté à l'intérieur de la toile. Cela signifie que les Ménines, oeuvre décidément complexe, n'est finalement ni un portrait masqué du roi et de la reine, ni une représentation de l'infante, mais, essentiellement, un autopor­trait de l'artiste exécutant une oeuvre.
Exécutée par Velàzquez en 1656, les Menines, ou la Famille de Philippe 1V (selon l'ancienne appel­lation du tableau), est une huile sur toile de 310 cm de haut sur 276 cm de large.
Entrée directement à l'Alcazar de Madrid, l'ceuvre est demeurée dans le palais des rois d'Espagne jusqu'en 1819, date de son entrée au musée du Prado.

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« Exécutée par Velazquez en 1656, les Mén ines , ou la Famille de Phili ppe IV (selon l'ancienne appel­ lation du tableau ), est une huile sur toile de 310 cm de haut sur 276 cm de large .

Entrée directement à !' Al ca zar de Madrid , l'œuv re est demeurée dans le palais des rois d'Es pagne jusqu'en 18 19 , date de son entrée au musée du Prad o.

compagnie - les •ménines • (d'un mot portu ­ gais qui désigne aussi les pages ), qui donnent leur nom au tableau, Maria Agustina Sarmiento et clona Isabel de Velasco -, des bouffons des­ tinés à amuser l'enfant Oa naine macrocéphale Maribarbola et le jeune nain italien Nicolas de Pertusato ), un gros chien paisible qui s'est allongé aussitôt , plus un homme vêtu de noir, à peir.e visible car plongé dans la pénombre (un garde du corps, sans doute ), ainsi que la •sur ­ veillante • des demoiselles d'honneur , clona Marcela de Ulloa.

La visite dure ass ez de temps pour qu'une des ménines propose à la petite fille un rafraîchissement , en s'agenouillant près d'elle, comme le veut la coutume.

Ma i s un autre visiteur, déjà, pénètre dans la pièce par la porte du fond : le majordome José Nieto Velazquez (qui n'a aucun lien de parenté avec l'artiste) vient parler , sans doute , de problèmes d'intendance avec le couple royal.

l'image dans le miroir L'idée de représen ter non plus les modèles eux-mêmes, avec ou sans le peintre en train de travailler face à eux, mais l'atelier où est créé le tableau , et les visiteurs qui défilent dans la pièce, est entièrement nouvelle.

Elle vient probablement de l' artiste , mais le roi dut y adhérer pleinement, puisque les Ménines furent accrochées dans les appartements pri­ vés de Philippe IV, au rez-de-chaussée nord de l' Alcazar, là où le souverain aimait à se retire r, une fois ses fonctions officielles accomplies.

Le tableau tient de la scène de genre, puisqu'il montre des gens se livrant à des activités quo­ tidiennes dans leur demeure.

Il mélange des personnages de rangs extrêmement diffé­ rents : les membres de la famille royale , leu r s serviteurs et le peintre.

C'est la transposition des scènes d 'intérieur flam andes conçues pour des bourgeois en scènes de la cour madrilène, qui exige solennité autant qu'intimité.

Cette influence explique sans aucun doute la manière de traiter l'espace, et l'idée même de suggérer par un reflet dans un miroir la pré­ sence du couple royal , le roi et la reine se trouvant placés dans une partie de la pièce que le tableau ne représente pas.

Les Ménines , en effet, font penser aux tableaux flamands du xv• siècle, et en particulier au portrait des Époux Arno/fini de Van Eyck , qui se trouvait alors dans les collections royales de Madrid.

Les deux œuvres représentent un portrait de groupe, montrent une pièce qui prend la forme d 'un vaste parallélépipède éclairé sur un côté, et toutes deux, surtout , comportent dans le fond un miroir reflétant la présence de person­ nages hors de notre champ de vision.

Dans les M é nines , ces personnages sont les parents de la petite Marguerite : le roi Philippe IV et sa femme Marie-Anna.

L'attention du spectateur est attirée sur eux par la présence d'un rideau rouge dont le miroir porte le reflet.

La petite taille des silhouettes reflétées suggère que les modèles sont placés assez loin en avant du tableau: intrigué, le spectateur cherche à déterminer leur place exacte dans l'espace.

Il s'aperçoit alors qu'il est lui-m ême situé entre le peintre et le couple royal, c'est-à-dire, en quelque sorte, englobé dans l'espace du tableau.

Portrait de l'artiste en gentilhomme Pour exécuter cette œuvre, Velazquez s'est placé devant l'infante et sa suite.

Le roi et la reine étaient derrière lui, à moins qu'il n'ait placé un portrait de ces derniers de telle sorte qu'il se reflète dans le miroir disposé au fond.

Mais , en même temps , le peintre s'est repré­ senté à l ' intérieur de la toile.

Cela signifie que les Mé nin es, œuvre décidément complexe, n'est finalement ni un portrait masqué du roi et de la reine, ni une représentation de l'infante, mais, essentiellement, un autopor­ trait de 11 artiste exécutant une œuvre.

Or, le peintre s'est représent é le pinceau à la main, en train, non d'appliquer la couleur sur la toile, mais de considérer son sujet - de réflé­ chir sur la meilleure manière de le représenter.

Ce choix est tout à fait réfléchi et significatif.

Il évoque celui du peintre français Poussin qui, sept ans auparavant, dans son ultime autopor­ trait (Paris, musée du Louvre), se montre, sans aucun outil de travail, devant des toiles ache ­ vées.

Ici, le pinceau, la palette , l'appui-main de Velazquez ( cette sorte de canne sur laquelle repose sa main gauche ) sont présents , mais le peintre, vêtu élégamment d 'un costume noir aux vastes manches de soie grise, ressemble à un gentilhomme plutôt qu'à un artiste, et le lieu où il travaille est un salon davantage qu'un atelier.

Une réflexion sur l'art de peindre Cette répugnance à insister sur les aspects matériels du métier de peintre est caractéristique de l'époque.

Au fond de la toile , au-dessus du miroir, deux peintures , à peine visibles et néanmoins déchif­ frables, donnent la clé de l' œuvre.

Elles illus­ trent deux épisodes de la légende de Minerve et Arachné, d'une part, d'Apollon et de Pan d'autre part , qui démontrent la supériorité de l'art, d'i nspiration divine, sur l es activ i tés manuelles .

Or, au XVII' siècle, dans un milieu qui reste néoplatonicien, c'est-à-dire convaincu de la supériorité des idées sur la pratique, les peintres se préoccupent de démontrer que leur art est avant tout intellectuel, qu'il consiste à imaginer, inventer, incarner une idée , l'exécu­ tion étant auss i secondaire que les traits de plume pour le poète.

En 1556 , Velazque z veut obtenir du roi une des plus hautes récompenses du pays : l'ordre de Saint-Jacques.

Les Ménine s servent cette ambition, en prouvant au souve ­ rain qu'une telle faveu r récompenserait l'intelli­ gence d'un créateur, et non un simple savoir­ faire.

La complexité de la composition, l'insistance sur la réflexion du peintre plutôt que sur sa pratique, vont pourtant de pair avec une technique admirable : quelques taches de rouge placées ici et là animent un tableau éla­ boré délibérément dans des teintes atténuées pour éviter un excès de sensualité; les pigments sont posés avec un art consommé, la pâte pictu­ rale se faisant fine pour rendre la transparence de l'air dans cette pièce vaste plongée dans une demi-pénombre , ou s'opacifiant pou r évoquer la brillance et l'épaisseur d 'un riche tissu.

Tout cela sans aucun repentir , l a rapidité , la sûreté d'exécution accompagnant la liberté d'une pens ée artistique infiniment nouvelle.

Lorsque l' œuvre fut achevée, le peintre accéda effectivement au mérite qu'il demandait.

La croix rouge portée sur son vêtement est celle de l'ordre de Saint-Jacques, et c'est auss i la seule partie des Ménine s qui ne soit pas de la ma i n du peint r e.

La lég ende veut que le roi Philippe IV lui­ même l'ait ajoutée sur le tableau, après la mort de Velazquez.

-> Voir aussi : p.

98-99 (Les Épo ux Arno lfini); p.

192-193 (L'Autoporu ait de Poussin).. »

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