Suzanne VALADON: FEMME NUE A LA DRAPERIE
Publié le 22/02/2012
Extrait du document
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chiens, des chats, sa vieille mère, son fils, Maurice Utrillo (comme elle, fécond en génie et en malheurs), des fleurs,des fruits.
Suzanne les cerne d'un infaillible trait, qui fait penser au mot de Géricault rêvant d'enfermer toute forme,comme dans les bras d'un mâle amour, dans un impérieux tracé : “ Le trait, je le voudrais en fil de fer ! ” Le volume,en deçà du trait, de cette prison aux murs flexibles, Suzanne Valadon l'emplit de ses couleurs portées au maximumde leur intensité, toujours ardemment caressantes, marquant des plans de lumière ou bien, en touchers longs etronds, faisant se bomber une cuisse, un sein se gonfler, fuser l'épanouissement explosif d'une corolle.
L'âge n'estjamais parvenu, chez Suzanne Valadon, à calmer son incoercible soif de vivre et de créer les brûlants simulacres dela vie.
Je l'ai vue ce soir mourante et demain se jeter sur ses pinceaux comme d'autres sur leur fiole de morphine.Certaines de ses toiles sont apparues comme violentes.
Elles chantaient, si l'on peut dire, sur un mode aux sonoritéspresque trop éclatantes.
Mais Suzanne s'en référait à ceux des grands artistes qui, dans les périodes puissantes,ont osé faire rutiler leur palette.
Elle savait aussi que le temps descend les tons ; donc que les harmoniser avec tropde prudence au départ a pour effet de les anémier à mesure que l'oeuvre prend de l'âge.
“ Ses compositions, a ditGustave Coquiot, un de ses admirateurs les plus fervents et les plus perspicaces, se comptent par centaines et ellessont héroïques.
Il y a une force illimitée et d'une qualité nerveuse extravagante dans cette femme à l'aspect menuet frêle.
” “ Elle préfère, dit-il encore, une sorte de rudesse à la jolie expression qu'elle ne veut pas subir.
” Il luiétait aussi impossible qu'à un Jean Fouquet de “ flatter ” son modèle.
A ses yeux, le seul fait que la fleur ou levisage qu'elle représentait participait de la vie, excluait toute notion de beauté ou de laideur.
La beauté, pour ellecomme pour les Primitifs, était dans la vie et c'est cette vie, donc cette beauté, dont elle donnait, dans son dessinet sur sa toile, un équivalent passionné.
Suzanne Valadon, pour peu que l'État eût su employer un talent siabondant et si expansif, aurait accompli de merveilleuses décorations murales.
Sa grande composition : “ lesLanceurs de filets ”, que je fis entrer dans les collections nationales peu de temps avant sa mort, l'attestenthautement.
L'état de santé de son fils, Maurice Utrillo, dont les toiles sécrètent une poésie spleenétique et souvent déchirante,compliqua l'existence de Suzanne Valadon.
On a fait trop de littérature à propos du déplorable penchant d'Utrillopour la boisson ; penchant qui le conduisit maintes fois au seuil de la démence.
Or, jusqu'à son dernier jour, SuzanneValadon eut à veiller sur cet enfant génial et parfois terrible.
La gloire lui était venue, la gloire en même temps que l'argent.
Mais elle n'avait pas le temps de penser à la gloire etsemait à tout vent son argent.
Elle oubliait de payer son gaz, son électricité, son eau, qu'on lui coupait ; car elle nesavait plus à la fin du jour, ce qu'était devenue la liasse qu'on lui avait apportée le matin.
Extraordinairement émotive, les ans n'avaient point apaisé cette âme constamment vibrante.
Au moindre chocd'enthousiasme ou de colère, son regard, demeuré étonnamment jeune dans un masque tourmenté, brasillait delarmes généreuses.
Elle avait épousé, peu de temps avant la guerre de 1914, le peintre André Utter, ami de son fils Maurice.
Les temps vont opérer sur les oeuvres de nos contemporains un sérieux travail de décantation.
Celles de SuzanneValadon paraîtront alors plus allègres et plus robustes que jamais.
Sauf pendant une période relativement courte de sa vie, Suzanne Valadon ne s'était guère éloignée de ses logismontmartrois : celui, si pittoresquement vétuste de la rue Cortot ; celui, plus “ moderne ”, de la récente avenueJunot.
Suzanne Valadon, cette grande artiste, qui aurait pu s'intituler, variant à peine le mot du vieil Hokousaï : “ la femmefolle de dessin ”, s'éteignit le 7 avril 1938 dans une clinique à Paris.
Suzanne VALADON 1865-1938• Femme nue à la draperie, Nu à la draperie• Huile sur toile 73 cm x 60 cm• Peint vers 1919• Signé en bas, à droite• Localisation : Genève, musée du.
Petit Palais.
LE TABLEAUSuzanne Valadon nous a laissé de nombreux portraits de femmes dans leur plus simple appareil.
Elle peignait souventses nus sur un fond de draperie à l'aspect très décoratif.
Avec la jambe gauche qui s'avance de manière presqueagressive, le corps occupe massivement le tableau.
Le contour des formes est franc, renforçant l'aspect sculpturaldu modèle.
Les couleurs vives, traitées à la manière de Gauguin, ajoutent à l'ensemble une note voluptueuse.
LA CRITIQUES'arrêtant devant un nu de Suzanne Valadon, le poète Guillaume Apollinaire y nota comme un air « désabusé ».
Lecritique Tristan Klingsor, quant à lui, écrit: «Elle ne craint pas une sorte ce canaillerie de la couleur et de la ligne.Son réalisme est franc.
Ses nus aisément dessinés et cernés.
Ce cerne, vous le reconnaissez.
Il vient de Manet, ilvient aussi de Cézanne.
Suzanne Valadon l'emploie à la manière d'un décorateur pour soutenir ses tons, et même à.
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