Serge Diaghilev et les Ballets russes

« "Quelque chose de tout à fait merveilleux".

Le 18 mai 1909 (ou le lendemain selon une autre source), le rideau se lève pour la première des danseurs russes, au théâtre du Châtelet à Paris.

Au programme, les Danses polovstiennes du Prince Igor, dans une chorégraphie de Michel Fokine; "Le Festin", suite de danses sur la musique de Glinka, Tchaïkovski, Moussorgski, Rimski-Korsakov, une chorégraphie de Fokine, avec des décors de Léon Bakst et Alexandre Benois; "Le Pavillon d’Armide", ballet d’Alexandre Benois.

La comtesse de Noailles, poétesse et amatrice de ballets, s’enthousiasme: "Je pris tout de suite conscience que quelque chose de tout à fait merveilleux se produisait, que j’assistais à quelque chose d’absolument unique.

Tout ce que pouvait impressionner, enchanter et captiver l’imagination, semblait être réuni sur scène". Devant les spectateurs éblouis du Châtelet s’accomplirent la renaissance et le renouveau de l’un des arts les plus anciens de l’humanité.

Art qui sort de sa torpeur après des dizaines d’années d’un formalisme routinier et révèle désormais sa vitalité originelle et sa force dramatique, grâce au génie des plus grands danseurs, musiciens et metteurs en scène russes. Parmi les meilleurs interprètes, citons Anna Pavlova, Michel Fokine, Tamara Karsavina et Vaslav Nijinski, âgé de 20 ans, qui se produit pour la première fois sur une scène d’Europe occidentale et déclenche des tonnerres d’applaudissements. Nijinski, le génie.

On attribue à Nijinski des qualités presque incroyables: "Son adresse à s’élever dans les airs, était immense.

Il donnait l’impression de n’être ni pressé, ni préparé; il s’élançait sans effort apparent, léger comme un oiseau qui s’envole", écrit le critique Cyril Beaumont.

Julie Sazonova, critique également, écrit quant à elle: "La collaboration de Diaghilev et Nijinski fut l’une des plus réussies de l’histoire du théâtre".

Dès l’École impériale de Saint-Pétersbourg où Nijinski entre en 1900, il se distingue par sa faculté d’expression, alliance de technique et d’élan vital.

Diaghilev fait de lui, dès 1909, l’étoile de ses ballets.

Il l’encouragera également à devenir chorégraphe.

Le 29 mai 1912, il interprète lui-même sa première chorégraphie, "L’Après-midi d’un faune". En 1910, Diaghilev entame une seconde tournée de ballets à Paris.

Cette fois-ci, le ballet de Fokine, "Schéhérazade", sur une musique de Rimski-Korsakov, constitue le centre du programme.

Avec les décors de Léon Bakst et la participation de Nijinski qui danse en esclave noir, "Schéhérazade" déclenche un enthousiasme sans précédent et devient le plus gros succès des Ballets russes. Nouveau début à Monte Carlo.

Diaghilev fait un pas décisif et fonde sa propre compagnie.

Nijinski et d’autres danseurs rompent leurs contrats avec le théâtre Mariinski de Saint- Pétersbourg, ce qui provoque un scandale.

Dès le début de l’année 1911, on joue à Monte Carlo, où Diaghilev domicilie sa troupe.

Grâce à Misia Sert, qui recherche de jeunes artistes français pour son ami depuis la représentation de Boris Godounov, il obtient bientôt de précieuses collaborations pour les décors et la musique: Georges Auric, Jean Cocteau, Pablo Picasso, Francis Poulenc, Erik Satie et beaucoup d’autres.

La première représentation de la nouvelle saison 1911 comporte "Le Spectre de la Rose", d’après Carl Maria von Weber, sur une 2. »