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Piotr Ilitch Tchaïkovski

Publié le 22/02/2012

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Les parents de Tchaïkovski, estimant que la musique était nocive pour sa santé, tentèrent d'éloigner leur fils de cet art pour lequel il montrait cependant un talent évident. En 1854, Tchaïkovski fut très affecté par la mort de sa mère qu'il chérissait. En 1862, las de son emploi de fonctionnaire au ministère de la Justice, il s'inscrivit au Conservatoire de musique de Saint-Pétersbourg, puis fut nommé professeur d'harmonie au Conservatoire de Moscou. Ce compositeur infatigable connut de graves problèmes affectifs avec sa femme et un ancien élève qui lui vouaient tous deux un amour sans retour. Conscient de son ambivalence sexuelle, Tchaïkovski passa le restant de ses jours dans la frustration et la solitude, auxquelles s'ajouta un sentiment de culpabilité dû à son penchant pour son neveu. En 1876, Tchaïkovski entama une correspondance avec madame von Meck, une riche veuve, qui lui assura une rente confortable. Sans qu'aucune rencontre n'ait jamais eu lieu, cette relation remplit un vide émotionnel chez le musicien qui travailla avec acharnement afin de mériter ce soutien. Dans les dernières années de sa vie, il voyagea aux États-Unis et dirigea ses propres oeuvres devant un public ébloui. Son état psychique se détériora une fois de plus en 1890, lorsque sa protectrice interrompit brutalement sa correspondance. Il mourut au cours d'une épidémie de choléra à Saint-Pétersbourg et on dit qu'il se serait sciemment exposé à la maladie afin de mettre un terme à ses jours.

« ces soupirs, ces larmes (de tristesse ou de joie), bref, tout ce pathos et ce lyrisme romantique qui sont une descaractéristiques de sa musique.

Valeurs auxquelles ses contemporains ne pouvaient guère rester insensibles, maisqui ne peuvent aujourd'hui susciter en nous que le sentiment quelque peu attendri que nous éprouvons à la vue descrinolines de nos arrière-grand-mères.

Or ce sont en grande partie ces valeurs-là pour nous accessoires, extra ou sil'on préfère para musicales qui valurent à Tchaïkovski la gloire dont il jouit auprès de ses contemporains.

Maisaujourd'hui que ce côté de son Oeuvre ne peut plus agir sur nous avec la même puissance d'incantation qu'ilexerçait sur nos grands-parents, que reste-t-il de la musique de Tchaïkovski ? Car c'est bien de cela qu'il s'agit.

Ehbien ! avec le recul des années, la profonde originalité de son langage musical nous apparaît avec un reliefparticulier, manifestant clairement à qui veut bien se départir de tout parti pris, le génie de Piotr Ilitch Tchaïkovskiet assurant à ce musicien une place d'honneur parmi les plus grands compositeurs de la seconde moitié du XIXesiècle. Il est de fait que l'Oeuvre de Piotr Ilitch contient une part non négligeable de déchet.

A côté de pages vraimentgéniales qui le classent sans conteste parmi les compositeurs de grande race, on y trouve pas mal de remplissage,de lieux communs romantiques.

Répercussion presque fatale de certains moments de désespoir, d'aridité quialternèrent chez le compositeur tout au long de son existence sa correspondance en témoigne avec des momentsd'euphorie, voire d'exaltation extraordinaire.

Il est d'autant plus remarquable et, disons-le, méritoire, de trouverprécisément sous la plume de cet homme-là les lignes que voici : "Depuis que j'ai commencé à composer, je me suisposé pour but d'être dans mon métier ce qu'avaient été dans le leur les plus illustres maîtres, c'est-à-dire d'êtrecomme eux un artisan à la manière d'un cordonnier...

Ils ont composé leurs Oeuvres immortelles exactement commele cordonnier fait ses chaussures, c'est-à-dire de jour en jour et le plus souvent sur commande." Réserve faite donc des compositions ou de certains passages de ses Oeuvres qui décidément ne nous apportent pasgrand-chose, Tchaïkovski nous laisse une Oeuvre d'une richesse telle, d'une qualité si authentique, que l'on a peineà comprendre comment on a pu si longtemps être aveuglé à son endroit au point de le considérer tout au pluscomme une sorte de Mendelssohn de deuxième zone.

Voyons les motifs de ce désaveu posthume.

Il s'agit, nousl'avons dit, du désaveu des musiciens de toute une génération, donc d'une élite, mais qui ne devait pas tarder àgagner tout le public moyen et cela surtout en France.

Car c'est en France que l'on a été pour Tchaïkovski le plussévère.

Or être pour ou contre Tchaïkovski (d'une façon motivée, bien entendu) dénote aujourd'hui toute unementalité, toute une attitude devant l'art en général et la musique en particulier.

Si cette attitude avait au débutdu siècle des motifs passagèrement valables, si elle se justifiait alors dans une certaine mesure on cherchait tropautre chose pour apprécier ce que nous donne Tchaïkovski elle est aujourd'hui, avouons-le, nettement démodée.

Etsans avoir le moins du monde le fétichisme de l'up to date, l'on peut admettre qu'il n'y a rien de méritoire à êtredémodé. On attaque généralement Tchaïkovski sur deux points précis : on discute la qualité de son "goût" ; on conteste lecaractère authentiquement russe de sa musique. Le premier de ces griefs, d'ordinaire moins explicitement formulé que le second, se cache souvent derrière lui d'unefaçon assez sournoise.

Au fond et c'est par là que le cas Tchaïkovski prend aujourd'hui valeur de symbole il met encause non seulement l'esthétique de Piotr Ilitch lui-même, mais de toute une famille de musiciens à laquelleincontestablement il appartient.

Ainsi, de nombreux mélomanes croiraient encore déchoir en prenant plaisir à lamusique d'un Gounod, d'un Donizetti ou d'un Verdi.

Ils baisseraient immédiatement, semble-t-il, dans leur propreestime.

C'est que l'idée bien arrêtée, assez étroite et pour tout dire primaire qu'ils se font de ce qui est "noble" et dece qui ne l'est pas, de ce qui est ou n'est pas de "bon ton", de "bon goût", préside à tous leurs jugements.

C'estainsi qu'en architecture les mêmes personnes n'admettent l'Antiquité étant hors de cause, bien entendu que legothique ou le roman, mais rejettent à coup sûr le baroque et le rococo.

Pour les mêmes raisons sont frappésd'ostracisme le ballet classique, le bel canto et l'opéra italien.

Tout cela se tient. Mais il y a autre chose croyons-nous, et c'est là peut-être la clé du problème : on trouve en effet à la racine decette mentalité si répandue dans le monde intellectuel d'aujourd'hui, un indéracinable préjugé contre une certainefacilité, une certaine légèreté, une certaine élégance spontanée, une certaine qualité de grâce pour tout dire, queles Italiens ont peut-être portée avec le plus de naturel, qui fut en tout cas pendant des siècles une desconstantes de leur art.

D'où la défiance très marquée chez les représentants de cette mentalité envers ce qu'il estconvenu d'appeler "l'italianisme".

L'on tolère à la rigueur ces qualités chez les Italiens, mais on ne veut pas admettrequ'elles puissent être authentiques chez d'autres (c'est non sans réserve qu'on accepte un Weber), et l'on est portéà les juger comme inconvenantes et déplacées lorsqu'on les rencontre dans des Oeuvres de caractère dramatiqueou pathétique.

Qu'on se l'avoue ou non, c'est un alliage qu'on trouve de "mauvais goût".

(L'on oublie que le "bongoût" n'est qu'une qualité mineure, indispensable il est vrai quand on n'a pas de génie.) Or, tout cela réuni chez unRusse, comme c'est le cas pour Tchaïkovski, voilà qui dépasse toutes les bornes ! Tombant également sous le grief du "goût", il y a encore l'éclectisme de Tchaïkovski : rencontrer un thème russenettement francisé ou italianisé dans une étoffe musicale où, de plus, l'influence d'un Schumann est souventmanifeste n'est pas chose rare chez Tchaïkovski. Comme le dit Stravinski, Piotr Ilitch ne se gêne pas en effet de porter du reste avec une parfaite aisance "lachemise russe avec le haut-de-forme".

Cela suffit pour indigner les puristes qui oublient que l'art vit de rencontresimprévues, d'emprunts, de croisements, de métissages...

à condition bien sûr qu'ils soient réussis.

Pourquoil'éclectisme mot auquel on attache généralement une signification plutôt péjorative serait-il nécessairement chose. »

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