Picabia, Francis - vie et oeuvre du peintre.
Publié le 15/05/2013
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5 « DADA LUI NE SENT RIEN, IL N’EST RIEN, RIEN, RIEN.
»
Francis Picabia va fréquemment à Barcelone où il retrouve ses amis Marie Laurencin ou Albert Gleizes et où il commence à écrire de la poésie ( Cinquante-deux miroirs, 1917 ).
Il crée la revue 391 (1917-1924), au ton résolument nihiliste et dadaïste
— inspirée de la galerie et de la revue de Stieglitz, 291 .
De retour à Paris, il a une santé fragile, et l’année suivante, en Suisse, les médecins lui recommandent le plus grand repos et lui interdisent de peindre.
Il se met alors à écrire Poèmes et dessins
de la fille née sans mère (1918), ainsi que des sortes tableaux-poèmes graphiques faits d’inscriptions ( le Double monde, 1919). Francis Picabia, qui était déjà depuis 1913 avec Marcel Duchamp dans la mouvance dada à New York, se rapproche du
mouvement Dada européen, et entre en contact avec Tristan Tzara en 1919 à Zurich.
À partir de 1920, tous deux animent à Paris les activités du groupe.
Francis Picabia écrit de nombreux textes dans la revue d’André Breton Littératures , dans la
revue Dada ( notamment le Manifeste cannibale dada, 1920) , dans 391, puis dans la revue Cannibale, qu’il fonde en 1920.
Son œuvre picturale fait dans un premier temps grand effet à Paris, et a un parfum de scandale.
Mais très vite, la France est
séduite par l’ère dada, menée par Breton, Tzara et Picabia.
De provocation en agitation, Francis Picabia raille l’art en présentant le Portrait de Cézanne , figurant un singe empaillé sur une toile sur laquelle sont inscrit des noms de peintres (Renoir,
Rembrandt) et des genres artistiques (nature morte) qu’il entend tourner en dérision.
Il écrit également beaucoup, notamment Jésus-Christ Rastaquouère (livre-manifeste écrit en 1920) et Unique Eunuque (livre poétique aléatoire qui se lit à l’envers
et à l’endroit publié en 1920).
Des dissensions au sein du groupe le font se séparer de ses acolytes qu’il juge finalement trop « conformistes ».
Dans ses adieux au mouvement, il explique que « l’esprit dada n’a vraiment existé qu’entre 1913 et 1918…
En voulant se prolonger, Dada s’est enfermé en lui-même… Dada, voyez-vous, n’était pas sérieux… si quelques-uns maintenant le prennent au sérieux, c’est parce qu’il est mort ! »
6 DES OPTOPHONES ET DES MONSTRES AUX TRANSPARENCES
En 1923, au salon des Indépendants, Francis Picabia présente des œuvres optiques (séries Volucelle, Volumètre et Optophone ).
Outre quelques échappées dans la peinture figurative classique (série d’ Espagnoles réalistes qu’il peint depuis toujours),
son œuvre (notamment ses collages et ses tableaux au Ripolin) poursuit jusqu’au milieu des années 1920 l’exploration d’une anti-peinture radicale (série des Monstres, 1923-1925).
Toujours insaisissable pour les critiques, il s’oppose à tout, au
surréalisme, qu’il considère artificiel, ou même à lui-même, refusant toute étiquette tout conformisme.
En 1925, il quitte Paris pour la Côte d’Azur, mais continue à vivre une existence mondaine intense.
Il s’assagit cependant et revient à une peinture
citant les maîtres du passé, en mêlant les motifs qu’il leur emprunte ( les Trois Grâces inspirées de Rubens, v.
1924-1927 ; la Femme au chien d’après des gravures de Dürer, 1924-1926 ; Nu fantastique ou « le Rechiré », d’après une fresque de
Michel-Ange, 1924) et en les superposant (série « sur-impressionniste » des Transparences, 1925-1937).
Son art se diversifie et après une courte période abstraite, il peint pendant la guerre des scènes de nus inspirées par la photographie érotique.
Après la guerre, de retour à Paris, et jusqu’à sa mort, il développe une forme d’abstraction en haute pâte, incluant des motifs archaïques peu explicites.
Son atelier devient alors un lieu de rencontre pour de jeunes peintres comme Pierre Soulages,
Hans Hartung, Raoul Ubac, Jean-Michel Atlan, etc.
En 1949, sa carrière est couronnée par une rétrospective, « 50 ans de plaisir », à la Galerie René Drouin, à Paris.
7 « UN ESPRIT LIBRE PREND DES LIBERTÉS MÊME À L'ÉGARD DE LA LIBERTÉ »
Artiste et écrivain éclectique, enfant de la liberté à tout prix (tant dans sa vie mondaine que dans sa démarche artistique), Francis Picabia a toujours été au fait de l’avant-garde, devançant les courants, les adaptant ou les rejetant, tout en poursuivant
sa voie, solitaire et rebelle.
Tour à tour impressionniste, fauve, dadaïste, tantôt peintre figuratif, tantôt peintre de l’abstraction, il a exploré tous les médiums (peinture, dessin, gravure, collage, happening, photographie, etc.) en éternel chercheur,
toujours en mouvement.
Également écrivain, il n’a eu de cesse de multiplier les expériences, comme poète, romancier, auteur d’aphorismes, critique, polémiste, directeur de revue, créateur de ballet (« la Queue du chien » dans Relâche, ballet
instantanéiste avec Jean Börlin, 1924), scénariste ( Entr’acte de René Clair, 1924), etc.
Il a également écrit en 1924 une autobiographie romancée, Caravansérail , qui n’a été publiée qu’en 1974.
Considéré comme le « Christophe Colomb de l’art » par
Jean Arp ou « le Léonard de Vinci » du surréalisme par Gertrude Stein, il n’a eu de cesse d’être en avance sur son temps et de ne jamais suspendre son vol.
À ses funérailles, André Breton a salué « une œuvre fondée sur la souveraineté du caprice,
sur le refus de suivre, toute entière axée sur la liberté, même de déplaire ».
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