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Nicolas Poussin : L'INSPIRATION DU POÈTE

Publié le 14/09/2014

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La toile connue sous le nom de l'inspiration du poète a été peinte par Nicolas Poussin probablement au tout début des années 1630.
Acquise par le cardinal Mazarin, dans les collections duquel elle est mentionnée en 1653, elle passa au xviir et au xur siècle dans diverses collections privées, en France et en Angleterre, avant d'être achetée, en 1911, par le musée du Louvre.
L'ceuvre mesure 184 cm de haut sur 214 cm de large.

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« L'inspiration du poète, Nicolas Pouss in, vus 1627 (Hanovre, Niedersii chsische Landesg alerie) .

qui vole dans le ciel en déploie deux, tandis que l'autre génie, entre la Muse et le dieu , en tient une troisième.

L'histor ien Mar c Fumaroli a récemment expliqué le sens des trois cou ­ ronnes ; ce sont les trois arts dont Poussin app elle l'union de ses vœux : la Poésie, bien sûr, mais aussi la Musique et la Peinture.

De Dionysos à Apollon La composition de la toile en fait un modèle de la peinture classique.

L' œuvre , centrée sur Apollon, est rythmée en largeur par les tro is figures de la Muse, du dieu et du poète.

Le corps de l'enfant, au premier plan , les troncs d'arbres , à l 'arrière plan , font écho à leurs sil­ houettes, en dessinant dans le tableau d'autres ligne s verticales.

Le paysage, lui, est com posé par des horizontales : les collines au fond du tableau, les nuages gris et orange.

La seule dire ction oblique est constituée par le corps du petit génie dans le ciel, qui s'apprête à couronner le poète.

Quelques années, sans doute , avant de peindre l'inspiration du Louvre, Pou ssin a exé­ cuté une première peinture sur le même thème.

L'inspiration du poète conservée à Hanovre est une œuvre bien différente de la toile parisienne.

Outre son format , beaucoup plus petit et plus large que haut , l'Inspiration d e Hanovre se distingue par une composition qui fait la part belle aux obliques.

Le Parnasse y forme une pente rude, et Apollon s'y tient à demi couché tandis que trois génies volettent dans des positions instab les.

L'atmosphère de la toile est également différente .

La lumière , atténuée, rend les contours moins nets.

L'air est imprégné d'une humidité créée par la source qui jailli t du Parnasse, !'Hippocrène, peinte en bas , sur la gauche du tableau.

La représentation du dieu , celle des génies et même celle de la Muse , est distincte dans les deux Inspirati ons.

Dans le tableau du Louvre, Apollon , vêtu, cesse un instant de jouer de la lyre pour s'adresser au poète.

La Muse, à son côté , est chastement vêtue, même si, réminis­ cence antique, son vêtement , qui a glissé sur l'épaule, dévoile un de ses seins.

Les génies, nus, ont le sexe recou vert d 'un voile.

Dans l'Inspiration du poète de Hanovre , au contraire, la Muse , dépo itraillée , s'accoude au rocher en une pose moins digne , les putti ont le corps entièrement dévêtu et , surtout , le dieu est totalement nu.

Sa lyre abandonnée gît à ses pieds, tandis que, dieu lascif et tentateur , il se penche vers le bel ad ol escent agenouillé et lui fait boire la liqueur qui lui dévoilera les mys­ tères d 'une trouble poésie .

Un poète maudit 1 La Muse que célèbre /'Inspiration du Louvre est , sans doute possible , reconnaissable.

Sous les pieds d'Apollon , en effet, Poussin a dis­ posé trois livres, avec sur leur reliure leur titre bien vis ible : l'Iliad e, l'Odys sée, l'Én éide.

Ces trois livres sont l'emblème reçu dans les trai­ tés d 'iconographie du temps pour Calliope, la Muse de la poésie épique.

Ma is le poète peint par Poussin ne reçoit pas directement de cette Muse ou d 'Apollon l'ins­ piration de son œuvre.

Le dieu et la femme sont muets , figures tutélaires qui protègent ! ' écrivain sans pourtant dicter son texte.

C'es t dans le ciel, auprès de Dieu - le Dieu chrétien - que le jeune homme , regard levé , cherche en définitive son plus précieux secours.

Par cela e ncore, l'Inspiration du poète du Louvr e diffère de l'inspiration de Hanovre.

Elle chan te les louanges d 'une poésie moralement é lev ée, sublime - alors que l'autre toile évoq u e une production plus trouble, dionysiaque, érotique.

Ma rc Fumaroli a ch er ché à deviner qui pou ­ vait être évoq u é sous les trai ts du poète de la toile parisienne.

L'étude radiographique de la peinture a révé lé, sous la couche de peinture qui donne au visage du jeune h omme sa forme définitive, une autre figure, plus enfan­ tine encore , bea ucoup plus émouvante.

L'homme que Poussin avait d'abord prévu de peindre montre une figure ronde, aux che­ veux coupé s très court , aux traits tirés, dou ­ loureux , aux yeux enfoncés sous les arcades sourcilières.

Or, six ans environ avant que l'artisçe ne comme nce cette peinture, en 1624, éta it mort de tuberculose , à Ro me , un poète de vingt-h uit ans , Virginio Cesarini.

Protégé par le pape Urba in VIII, célébré par l'élite Poussin Nicola s Poussin est né aux Andelys , en Normandie , en 1594 , dans une famille de la petite noblesse qui lui fit faire de sérieuses étu des classique s.

Sa voca tion artisti que, née contre le gré de ses parents , est liée à une grande admiration pour le monde antique, autant qu'à un goût prononcé pour la peinture it alienne.

Formé d'abord à Rouen , pui s à Paris à partir de 1612 , où il ren ­ contre un premier protecteur dans la personne d'un poète italien Giam­ battista Marin dit le ..

cavalier Mar in", Pou ssin tente un premier voya ge en Italie , vers 1617, qu'il doit interrompre pour de s raisons de sa nté.

Il repart en 1623 , séjourne à Venise , puis s 'établit finalement , de façon définitive, à Rome en 1624 .

Après avoir travaillé un temps pour des comma ndes officielles , il s'en tient finalement à la réalisation de tableaux de chevalet de dimen­ sions moyennes , qu 'il exécute pour des collectionneurs privés .

L e cardinal de Richelieu compte parmi ces acheteu r s.

En 1640 , sollicité par le roi Louis XIII et son ministre , il se rend en France.

Il y est accueilli avec honneur , mais le type de tr a­ vail qu 'on lui demande - de grands cycles décoratifs -ne lui convient pas, et les artistes français, qu i crai ­ gnent de lui voi r prendre trop de place , complotent cont re lui.

Il revient à Rome en 1642 : Il y demeurera jusqu 'à sa mort , en 1665 .

romaine, le jeune homme avait lutté en faveur d'un art et d'une poésie •sublimes •, accordés à la grandeur d e la foi de l'Église.

Mais ce poète eut le tort, un an avant sa mort , de publier le Saggiatore de Caillée - un traité qui défendait , contre le ~stème cosmique de Ptolémée soutenu par l'Eglise , l'idée que les plan ètes, et la Terre, tournent autour du Soleil.

La position d 'Apollon , au cen tr e de l'in spira ­ tion du poète de Paris, avec , gravitant autour de lui, la Muse et le poète d'une part, les deux génies de l'autre, pourrait être une allusion à ces théories.

Apoll on n'est-il pas aussi le dieu de la Lumière, du Soleil, associé à Phébus? Alors , il faudrait voi r dans la peinture du Louvre un hommage, que Pou ssin aurait voulu explicite, et qu'il dut finalement dissimuler, à un créateur qui eut le coura ge d 'être, à la fois, un chrétien et un homme épris de vérité.. »

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