L’ÉTAT DE LA Culture dans les années 1980: Histoire

Avril 1981 : le candidat Mitterrand exprime l'un des principes de son engagement politique: «Je le dis souvent, le socialisme est avant toute chose un projet culturel. » 21 mai 1981 : première journée officielle du mandat, le président Mitterrand, au cours d’une cérémonie amplement relayée par les médias, se rend au Panthéon. Le sens du geste présidentiel n’échappera à personne. Hommage rendu à l’histoire et à la République, la «montée au Panthéon» ne prend tout son sens qu'en regard du prestigieux passé culturel qu’incarne encore le monument. L’attachement de François Mitterrand à la culture n’a rien d’un secret. Il s’est forgé l'image d’un homme cultivé et humaniste, qui vit dans l’intimité des intellectuels et des artistes de son temps, avec iesquels il entretient un dialogue sur le passé et le devenir des sociétés. Conviction personnelle, la culture ne pouvait que devenir aussi une conviction politique. Devant les caméras, le nouvel élu des Français aura donc voulu signifier l’une des priorités de son action gouvernementale: le développement culturel de la France. En avril 1981, François Mitterrand replace cette priorité dans un dessein d’ensemble en affirmant: «Je propose aux Français d’être avec moi les inventeurs d’une culture, d'un art de vivre, bref d’un modèle français de civilisation.»

Préhistoire des faits

Présentée comme un enjeu de société, la culture n’est pas une idée neuve dans les rangs de la gauche. Héritage de la philosophie progressiste, le «droit à l'éducation et à la culture» figure, avec l’attachement à la science comme vecteur de progrès social et avec le souci de maintenir en vie le patrimoine technique et industriel, parmi les grands principes qui ont inspiré la doctrine politique et sociale de ceux que leurs adversaires nommeront par référence au passé «la République des professeurs». Remanié au cours de l'histoire de la gauche française dans les années soixante et soixante-dix, cet héritage parvient modernisé au seuil des années quatre-vingt. La «réduction des inégalités», qui comporte un volet culturel et répond à un souci de démocratisation, est, en effet, l’un des thèmes mis en avant par le ministre Jack Lang entre 1981 et 1983. Cette première phase du septennat de François Mitterrand semble résulter directement de «l'activisme» culturel des socialistes durant les années soixante-dix. Sur le terrain de l'animation et de l’action culturelle notamment, mais aussi sur le plan des débats théoriques instaurés dans les commissions spécialisées de ce parti, les années soixante-dix ont signé la reprise de l'initiative, sanctionnée par la création du Syndicat national à l'action culturelle, que Jack Lang va diriger. Les expériences réussies de Marseille ou de Grenoble en matière de gestion et d'animation culturelles, à l'heure où la France se montrait encore très centralisée, auront pour première conséquence de permettre aux socialistes d'apporter avec eux, rue de Valois, un programme ambitieux et soigneusement défini. La formation des responsables culturels, volet important de la politique menée par le ministre, trouve d'autre part sa source dans cette préhistoire des faits.