LE RÊVE du DOUANIER ROUSSEAU

« LE RÊVE 1910 Peintre français Analyse ~ La surface du tableau est recouverte de motifs végétaux , plantes, fleurs et arbres, qui s'entremêlent inextricablement et forment un décor tapissant à l'orientale.

À gauche, une femme est étendue sur un divan rouge foncé entouré de fleurs qui , comme les notes d'une partition, transposent la mélodie du flûtiste.

C'est un sorcier noir, derrière lequel apparaît un long serpent orange qui s'étire vers l'angle droit de la composition.

D'autres animaux l'écoutent aussi : un oiseau de paradis qui se retourne, étonné, un éléphant qui lève la trompe au ciel en barissant, deux lions et deux singes.

Immergée dans un éclairage lunaire, la jungle étale sous nos yeux ses régimes de bananes et ses végétaux irréels, matérialisation fantaisiste des souvenirs d 'une visite au Jardin des Plantes.

Imaginaire en effet , l'oranger dans les branches duquel un singe observe le fruit qui rappelle curieusement les ornements d' un arbre de Noël.

C'est d'ailleurs l 'étrangeté de ces divers éléments qui donne à la scène sa dimension onirique : une jungle irréelle où se trouve - qui sait pourquoi -une femme dont l'attitude évoque celle de l'Olympia de Manet.

Le seul élément réaliste est le divan où elle est allongée.

Tout est immobile dans cette scène où les protagonistes semblent figés, comme par magie.

me-xxe siècles Huile sur toile 204,5 x 299 cm Avec sa naïveté habituelle, le Douanie r Rous­ sier a soigneusement décrit chaque détail : les animaux , l'enchanteur , la femme et les plantes.

La vivacité des couleurs et la simplification des formes ajoutent encore au charme de cette œuvre dont l'ingénuité évoque l'univers de l'enfance, et dont le style proche de l'illu s tration préfigure les dessins animés.

L'œuvre C C'est la dernière œuvre présentée par Rousseau au Salon des Artistes Indépendants en 1910.

Pour en éclairer le sens, l 'artiste l 'avait accompagnée d'un poème: « Yadwingha dans un beau rêve 1 s 'étant endormie doucement 1 entendait les sons d'une musette 1 Dont jouait un charmeur bien p ensant 1 Pendant que la lumière reflète 1 sur les fleurs, les arbres verdoyants, 1 les fauves serpents prêtent l'oreille 1 Aux airs gais de l 'instrument.

»La femme représentée est donc Yadwingha , un modèle polo­ nais que l'artiste avait aimé dans sa jeunesse et surnommé ainsi , probablement par goût de l'exo­ tisme .

Cette œuvre fut donnée au Museum of Modem Art par Nelson A.

Rockefeller.

« Je crois vraiment que cette année personne n 'osera rire » • «J'ai envoyé mon grand tableau et tous le 18 mars en décrivant ainsi Le Rêve: «Sur un trouvent beau, je pense que tu l'expliqueras et divan 1830 dort une femme nue.

Tout alentour se que ton talent littéraire me vengera de toutes les presse une végétation tropicale habitée par des insultes et les affronts que j'ai reçus».

Ainsi singes et des oiseaux de paradis et, tandis qu'un écrivait le Douanier Rousseau à Guillaume lion et une lionne passent tranquillement, un Apollinaire le 11 mars 1910 en lui rappelant Le nègre - figure mystérieuse -joue de la flûte.

Rêve et l'incompréhension persistante des criti- La beauté du tableau éclate, il n'y a pas de doute.

ques lorsqu'il exposait ses œuvres.

Le poète lui Je crois vraiment que cette année personne répondit publiquement dans L'Intransigeant du n'osera rire.» Du m ême peintre : PICTO 839 à 843 Photo Nardini Editore.

© Nar d ini Editor e.

19 92.

V PC Larousse- Laffont pour l'édi tio n frança ise, 1992 .

12 - 30. »