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LE PARIS THÉÂTRAL de 1900 à 1909 : Histoire

Publié le 27/12/2018

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Alors que s’ouvre l'Exposition universelle. Paris offre à ses habitants et aux visiteurs une variété de spectacles qui donne avec exactitude l’image du théâtre d'alors, d’humeur légère ou de portée sociale, bousculé par la nouveauté (relative) du naturalisme à la scène, mais replié sur lui-même et généralement ignorant des nouveautés qui se produisent au même moment à l'étranger: les réalisations de Constantin Stanislavski au Théâtre d'art de Moscou ou celles de Max Reinhardt au Deutsches Theater de Berlin.

 

Antoine le réaliste

 

Antoine, cet ancien employé de la compagnie du Gaz, a donné son nom à l’ancien théâtre des Menus-Plaisirs et le théâtre Antoine devient le royaume du naturalisme, d’une passion forcenée de la véracité et d’un jeu intérieur et uni qui se désintéresse de l'acteur en tant que centre principal de l’action dramatique. Pourtant, Poil de carotte, en 1900, où Antoine fait débuter dans le rôle du jeune garçon Suzanne Desprès, traduit une évolution dans le répertoire du metteur en scène. Bien qu’il continue à faire des recherches et des voyages afin que décors et costumes soient reproduits fidèlement de la réalité, Antoine monte de plus en plus souvent des auteurs dont le génie n’est pas strictement attaché à une peinture naturaliste. Ainsi Jules Renard ou Courteline dont il a mis en scène les Gaîtés de l’escadron en 1899 et dont il présentera en 1903 la Paix chez soi. Antoine a gagné en intériorité, même lorsqu’il est lui-même en scène. Il est saisissant en vieux paysan dans la Terre de Zola en 1902 et sème l'effroi en jouant, à partir de novembre 1901, Au téléphone de de Lordes: rivé à son écouteur, un homme suit le meurtre de sa femme.

 

C’est vers Shakespeare et Molière qu’il se dirige, d’autant plus que des ennuis financiers l’obligent à quitter son théâtre et qu’il se retrouve à la tête de l’Odéon. Là, ses mises en scène de Jules César (1906) et de Tartuffe (1907) allient le souci de l’authenticité à une puissance visionnaire. Le cinématographe est déjà dans ses rêves, qui se concrétiseront plus tard.

 

Guitry (père) et gémier:

 

un autre réalisme

 

Sur le terrain du théâtre réaliste, Antoine n’est plus tout à fait isolé. Si lui seul a cette rigueur, Lucien Guitry sait utiliser les apports du réalisme. Après l’Assommoir à la Porte-Saint-Martin en 1900, Guitry (père de Sacha) prend la direction de la Renaissance et y monte en 1903 Crainquebille d’Anatole France, l’histoire d’un marchand des quatre saisons menacé par la machine judiciaire : c’est un triomphe. Il préférera ensuite des œuvres de réflexion sociale plus proches du drame (Bataille, Bernstein). Soutenant ses choix par son immense talent d’acteur, il participe à la régénérescence du théâtre de son temps.

 

Non loin du réalisme se situe aussi Firmin Gémier. Comment enfermer sous une étiquette ce personnage turbulent, contradictoire qui sera le précurseur de Jean Vilar par ses tournées en province et la création du Théâtre national populaire? Il a été l’élève d'Antoine, l’a quitté, puis l’a rejoint au théâtre Antoine. Ensuite, leur séparation a été brutale. Mais, lorsque Antoine doit laisser son théâtre en 1906, c’est Gémier qui le reprend, sans en changer le nom. Une rage de jouer et de réussir des mises en scène spectaculaires le possède au point qu’il s’est emparé des répertoires les plus divers et a pu passer de la Rabouilleuse (d'après Balzac, 1903 : l’un de ses rôles les plus mémorables) à Master Bob, gagnant du derby (1909). Il interprète environ deux cents rôles entre 1892 et 1917! On doit à cet homme de gauche d’avoir défendu avec courage des œuvres grinçantes comme Ventres dorés (1905), pièce d’Émile Fabre sur le milieu de la finance, ou annonciatrices d’un nouveau répertoire populaire, comme le Quatorze-Juillet de Romain Rolland (1902).

 

 

LuGNÉ-POE: LE THÉÂTRE POÉTIQUE

 

À l'opposé. Lugné-Poe mène la lutte contre le réalisme. Depuis qu’il a ouvert l’Œuvre (ex-théâtre d’Art) en 1894, il a choisi Ibsen, Maeterlinck, August Strindberg, montrant un attachement indéfectible au langage poétique et aux héritiers du symbolisme. Si, dans cette première décennie, il parvient à monter Gide, D’Annunzio ou Wilde, il est contraint par de graves difficultés financières à travailler à l’étranger et à y effectuer des tournées. Cela lui permet, en contrepartie, de faire venir à Paris certains des artistes étrangers qu’il rencontre. La célèbre actrice italienne, la Duse, vient à l’Œuvre en 1905 jouer les Bas-Fonds de Gorki pour renflouer les caisses du théâtre. C’est Lugné-Poe qui fera venir en France, en 1911, la danseuse Isadora Duncan. Cependant, trop peu présent à Paris, il ne réalisera son rêve de monter une pièce de Paul Claudel qu’en 1912, avec la mise en scène de l' Annonce faite à Marie.

 

Une comédie-française moderne

 

Face à ces quatre individualités qui incarnent l’aventure, la Comédie-Française ne fait pourtant pas mauvaise figure. Certes, elle affiche de nombreux classiques, qui conviennent à ses grands tragédiens: Mounet-Sully, au jeu lyrique, a un renom équivalent à celui de Sarah Bernhardt et attire un public considérable dans les grands rôles du répertoire grec (Œdipe roi) et racinien. Avec son frère Paul Mou-net, très estimé aussi, il joue notamment les Burgraves de Victor Hugo en 1902. Une nouvelle génération d’acteurs prend peu à peu sa place, qui se nomment Marcelle Géniat, Suzanne Desprès, Beatrix Dussane, André Brunot...

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« LE PARIS THÉÂTRAL.

En 19C9.

Sarah Bernhardt trou•·e tm rôle il sa mesure dans le Procès de Jeanne d'Arc.

© Bibliorlrèqur dr• l'Arsenal -BN -Paris Certain� auteurs seront moins délaissés par la postérité: c'est pour la Comédie-Française que Courteline écrit la Conversion d'Alceste, une suite imaginaire au Misamhrope de Molière, représen­ tée en 1905 ; le redoutable financier Isidore Lechat imaginé par Octave Mirbeau dans Les affaires som les affaires est joué pour la première fois salle Richelieu par Maurice de Féraudy le 20 avril 1903.

SARAH BERNHARDT ...

ET LES AUTRES Hors des circuits avant-gardistes et officiels, le théâtre pari­ sien bat son plein.

Les vedettes ne manquent pas.

Au premier plan se détache.

bien entendu, Sarah Bernhardt.

qui dispose de son théâtre, place du Châtelet (aujourd'hui Théâtre de la Ville).

Après l'immense succès de l'Aiglon en 1900, elle joue un autre rôle historique, qui exige une audace un peu semblable: en 1909, elle est Jeanne d'Arc dans le Procès de Jeanne d'Arc, bien qu'elle soit âgée alors de soixante-cinq ans.

La belle Réjane est une autre coqueluche de Paris, reine de ce qu'on appelait le «théâtre d'amour" (c'est-à-dire la comédie senti­ mentale); elle reprend ce qui fut son triomphe, Madame Sans-Gêne de Sardou, et finit par ouvrir le théâtre Réjane en 1906 où elle joue Bernstein (Israël, 1908) et bientôt Maeterlinck (l'Oiseau bleu, 1912).

Jeanne Granier est, à sa façon, une autre reine, vive et gaie, qui fait merveille dans les pièces de Guitry, Donnay, Capus, Flers et Cailla­ vet.

Il y a aussi Simone.

Ève Lavallière ...

Allant et venant entre le théâtre et le music-hall, Polaire et Colette incarnent un charme nou­ veau, avec leur buste généreux, leur taille de guêpe et leurs yeux o rientau x ...

Chez les hommes, Édouard de Max, d'origine roumaine, est une vedette.

Son interprétation du Prométhée de Fauré, où il apparaît presque nu, aux Arènes de Béziers en aoOt 1900, est historique.

Dans le répertoire léger, Max Dearly draine lui aussi un vaste public, grâce à une présence faussement flegmatique.

GRANDS DÉBATS ET BONS MOTS Pour ces acteurs, les auteurs brillants sont légion.

Ils peuvent se répartir en deux groupes : ceux qui veulent faire réfléchir et ceux qui veulent faire rire.

Brieux, Hervieu, Bataille, Bernstein, La­ vedan, Fabre, que nous avons déjà cités, appartiennent au premier groupe.

Ils ont représenté la conscience bourgeoise au début de ce siècle.

Les plus intéressants sont Henry Bernstein et Henry Bataille.

Bernstein a 25 ans quand il fait jouer, en 1900, sa première pièce, le Marché.

C'est le début d'une série d'œuvres mélodramatiques, ad­ mirablement construites, qui ne s'achèvera qu'avec la mort de l'au- LE PARIS THÉÂTRAL.

Am/11 de l'irre de sa plume, Colfllt mi/ise so11 charme au tlléâtre.

La roici photograpiliée par Re1J1Ii11ger dans Rêve d'Egypte.

©leon-Loup Clwrmet LE PARIS THÉÂTRAL.

Réjane est l'une des co qu (lu ch es du théâtre parisien.

On la voit, ci-contre, dans l'une des sc�nes de Madame Sans­ Gêne, de Victorien Sardou.

© Collection Viol/et teur, en 1953.

Tout, chez Bernstein, repose sur le confiit, J'opposition brutale, utilisés à des fins morales.

Henry Bataille, lui, aura marqué son temps par l'audace des situations qu'il aborde.

Il fait scandale notamment avec Maman Colibri (1904), où une mère de famille s'é­ prend d'un collégien, et avec la Femme nue (1908).

Dans le second groupe, celui des amuseurs, on retrouve les noms de Tristan Bernard, Alfred Capus, Maurice Donnay, Georges Courteline.

Flers et Caillavet.

Tous ont leurs vertus.

certains, comme Tristan Bernard ( Triplepaae, 1905), étant surtout des fabricants de mots d'auteur et d'autres, tel Maurice Donnay (Éducation de prince , 1906), des inventeurs de situations.

Le tandem constitué par Robert de Flers et Gaston Arman de Caillavet sait, lui, fondre ces deux éléments de la comédie_ pour composer des tableaux ironiques et durables de la société.

Ecrivant d'abord des opéras bouffes avec le compositeur Claude Terrasse, ils se sont ensuite dirigés vers un théâtre uniquement parlé (Miqueue et sa mère, 1906).

Leur humour est fort différent de celui, plus mécanique et impitoyable, de Georges Fey­ deau, qui fait jouer alors La main passe (1904) et la Puce à l'oreille (1907).

Quant à Sacha Guitry, âgé de 21 ans en 1905, il fait jouer sa première pièce Nono aux Mathurins, là même où une jeune actrice, Colette Willy, débute dans ses pantomimes égyptiennes.

LEs PRÉMICES Du THÉÂTRE POPULAIRE Toutefois, le théâtre n'est pas seulement bourgeois.

Autour de l'idée de théâtre populaire, des initiatives ont eu lieu ici et là.

La plus célèbre est la création du Théâtre du peuple par Maurice Potte· cher à Bussang, dans les Vosges, en 1892.

Ensuite, et sous l'impulsion des universités populaires.

l'idée d'institutions ouvertes à tous ct d'abord consacrées aux classes sociales non favorisées s'est répandue.

En 1902 se constitue à Paris l'Œuvre des trente ans de théâtre, dont la mission est de faire circuler en province des spectacles de théâtres publics.

En 1903, Romain Rolland publie, dans les Cahiers de la quinzaine, son livre le Théâtre du peuple, essai d'esthétique d'un théâtre nouveau.

Il y recense en France, et surtout à Paris, des petits théâtres populaires, comme le Théâtre civique de Louis Lumet et la Coopération des idées; il prône «un théâtre par et pour le peuple, seulement réalisable dans un monde nouveau».

Cette espérance, tou­ tefois, n'existe guère qu'en toile de fond de la décennie.

UN COUP DE THÉÂTRE DANSÉ La révolution qui surgit eo 1909 est tout autre.

Bien que venant du monde de la danse, elle surprend et agite tout Je monde du. »

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