LE GROUPE SUPPORT-SURFACE
Publié le 14/09/2014
Extrait du document
«
-
Le châssis et la toile
Pourtant, si les artistes de Support-Surface
renoncent au projet traditionnel de la pein
ture, qui est d'inventer une image ou d'élabo
rer des formes imagin aires, ils ne rompent en
aucune manière avec les moyens propres à la
discipline.
Bien au contraire, le travail du
groupe vise à révéler ce qui n'était jusqu'alors
qu'un paramètre obscur de la création : les
facteurs matériels.
C'est pourquoi les artistes
de Support -Surface démembrent les œuvres :
ils ôtent la toile du châssis, peignent celui-ci,
plient et découpent la toile.
Cela leur permet,
d'une part, de mettre en évidence tous les élé
ments constitutifs du tableau et, d'autre part,
de faire prévaloir l'articulation du support
(châssis ) et de la surface (toile) dans l'œuvre .
Or, tel est précisément leur propos : ils enten
dent faire du premier une forme à part,
valant
en lui-même comme un objet d'art
situé
dans l'espace, et ils veulent affirmer
dans la toile autre chose qu'un simple écran
destiné à recevoir une image.
Les «sol-mur» de Cane
De ces deux éléments, le support et la sur
face, l'un ou l'autre est privilégié en fonction
des artistes.
Né en 1942, Daniel Dezeuze expose des châs
sis.
Aucune toile ne les recouvre, mais seule
ment une feuille de plastique transparent.
Dezeuze
réalise aussi des quadrillages, des
claies, de souples échelles de bois peintes,
Sol-Mu r ( 1972) ,
Louis Cane (collectio n particulière).
prêtes à s' enrouler sur elles-mêmes .
Viall at (né
en 1936) , au contraire, tend dans l'espace des
filets ou expose des toiles exemptes de châssis
que le collectionneur peut plier, enrouler, ou
laisser flotter dans l'espace, à son gré.
Teintes
des deux côtés, ces toiles, qui peuvent être
indifféremment des bâches, des draps, des
stores, des toiles à matelas, portent, répété
selon une scansion régulière, un motif en
forme de «haricot» imprimé au pochoir.
Louis Cane (né en 1943 ), de la même façon,
fait porter l'essentiel de ses recherches sur la
toile.
Celle-ci est de grandes dimensions et
débarrassée de son châssis.
Elle est clouée
directement sur le mur et retombe sur le sol :
c'est
ce qu'on appelle le «sol -mur».
Posée à
même le sol et travaillée à p l at, elle ne reço it
aucun apprêt et nul dessin préparatoire n'y
est tracé.
Mais le peintre y projette la couleur
au moyen d' un pistolet qui lui permet de
créer des dégradés.
li plie ensuite la toile en
deux dans le sens de la longueur, la découpe
parfois, la déplie de nouveau.
Les couches de
pigmen t encore humide imp ressionnent la
surface de tissu là où le pistolet n'est pas
passé, et les blancs s'effacent progressive
ment.
C'est le rapport d e la teinte et des sur
faces de toile demeu rées vierges qui ind ique
au peintre le moment où il doit s'interrompre.
Finalement, l'œuvre est redressée lors de sa
présentat i on : une marge est découpée sur
trois des côtés de la partie au sol et rabattue
sur la partie murale , de façon à former une
sorte d'encadrement à cette partie de la toile .
Rouleau horizontal ,
Daniel Dez euze , 1968 (Pa ris, musée national d'Art moderne)..
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