LA RENAISSANCE CAROLINGIENNE
Publié le 14/09/2014
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Page de manuscrit du psautier d'Utrecht.
L'écriture portée sur
cette page est la •caroline• , graphie nouvelle inventée à l'époque de Charlemagne.
Du texte aux images :
le prestige de la Bible
Aux origines de cette renaissance, il faut
compter
le goût retrouvé pour la lecture et
l'étude.
Les souverains promeuvent un
immense travail autour de !'Écriture sainte.
Ils
cherchent à établir un texte plus fiable de la
Bible , si souvent de fois copiée que de nom
breuses erreurs s'y sont glissées.
L'activité des
scribes et des enlumineurs est fébrile , dans les
abbayes ou les grands centres installés dans la
cour impériale.
Le triomphe d'une écriture
nouvelle, la très belle et très lisible minuscule
•caroline », fait de ces copies des trésors de
calligraphie.
Le caractère cosmopolite de la cour de
Charlemagne explique aussi cette floraison cul
turelle.
Auprès de l'empereur se côtoient des
hommes d'horizons divers : Alcuin, lettré
anglais qui a dirigé en
766 l'école d'York,
conseille le prince; Paul Diacre, un Italien qui a
travaillé à la cour de Lombardie; Théodulf, qui
apporte d'Espagne la richesse de la culture
mozarabe ; Scot Erigène, le théologien irlandais,
et enfin le Germain Éginhard sont présents au
•palais•, c'est-à-dire à la cour impériale.
Cette ouverture internationale contribue à
renouveler
les formes esthétiques en même
temps que le texte et son écriture.
Les artistes
de la cour se réfèrent aussi bien aux sources
antiques qu'à l'art irlandais contemporain .
Aux premières, elles empruntent l'expression
tridimensionnelle de l'espace et les techniques
illusionnistes, perdues aux temps mérovin
giens.
Au second, le génie décoratif et, en par
ticulier, les dédales de fins entrelacs d'or qui
entourent les lettres.
L'enlumim.1re
Le recueil d'é vangiles de l'évêque de Reims
Ebbon, fils d'un affranchi et frère de lait du
futur empereur Louis le Pieux, illustre cet épa
nouissement, dans le domaine de la peinture.
Au début du livre est peint un Saint Matthieu,
véritable portrait emblématique du comman
ditaire de l'œuv r e, personnage important de la
politique et de l'histo ire religieuse du temps,
agitateur rebelle et esthète raffiné.
L'auteur du
premier évangile est représenté comme un
écrivain dévoré par son inspiration.
Le dos
courbé, le regard fasciné par le texte qu'il
rédige, il semble emporté par une force inté
rieure.
Sa figure incendiée est cernée de
boucles folles et désordonnées, sa robe écla
tante, sillonnée de hachures dorées, vibre et
tourbillonne en mille plis irréels, comme sou
levée elle aussi par un frémissement intense.
Au loin, des collines ondoient, brossées de
traits rapides et hérissées de petits arbustes et
d 'é
difices imprécis qui éloignent l'horizon.
Les ivoires de la crucifixion
L'art des ivoiriers s'inspire moins de la nature et
puise davantage
dans le répertoire antique.
Encouragé par Charlemagne, il s'épanouit plei
nement durant les règnes de Louis le Pieux et
de Lothaire.
La cruc ifixion est alors le thème
préféré des artistes.
Dans un relief de cette
scène conservé à Liverpool , les plans se super
posent : la croix surgit de la ligne sinueuse de
collines, dont les bords re levés serve nt à dési
gne r d'un côté sain t Jean, habillé d'une toge
d'orateur anti que , de l'autre vers la Vierge éplo
rée, qui s'appr ê te à séche r ses larme s du pan d e
son manteau.
Des soldats vêtus en centurions
romains se cambrent, le dos tourné.
Leurs têtes
s'inscrivent dans un cercle parfait qu i s'achève
dans les bustes du Soleil et de la Lune, témoins
cosm iqu es de l'événement.
Dans le bas, les
saintes femmes s'approchent du tombeau où
l'ange leur annonce la Résurrection.
La douceur
des modelés, la fermeté de la composi tion, la
profonde u r du relief, la sûreté des proportions
font de cet ivoire un chef-d'œuvre.
La Crucifixion
et les trois Marie
au Tombeau, IX' siècle , plaque d'ivoire fermant la
reliure d 'un livre (musée de Liverpool).
L'art des ivoiriers médiévaux
Au ss i préci eux que l'or.
Pendan t
tout l e Moyen Âge, l'ivoire est considéré comme une matièr e précieu se très convoitée et recherchée par les artistes.
Ses vertus esthétiques et symboliques sont grandes , parce que c'est une sub
stance vivante qui peut évoquer le teint lait eux de la chair , donner l'illusion de l'albâtre , du marbre ou de l' ambre .
La mobilité des œuv res d' ivoire renforce leur fragilité , mais permet au cours des sièc les la circulation des formes et des
motif s : c'est une des voies essentielles
qui perm it aux Occidentaux
de connaître les arts antiques , musulman et byzantin .
Un travail difficile .
Si l' on se se rt
aussi bien de dent s de cétacés, cacha
lots par exem ple, ou de sangliers , biens
précieux dans les moments de ralentis sement du commerce avec l' Orient , l' élé phant surtout est pri sé pour ses
défen ses, longues parfoi s de 2 m, qui
permettent d 'amples compositions.
Mais
il faut savoir utiliser la courbure du cône,
trouver une déco upe fidèle au sens des
lignes, prévoir l'effet du v ieillisse ment d e la matière ...
Gr avé, taillé , scu lpté de toutes les manières possible s, souvent rehaussé de couleurs (aujourd 'hu i le
plus so uv ent disparues), l'ivo i re est sou
vent inclus dans une monture de métal précieux et sert abondamment à la décoration des reliure s.
Une histoire mouvementée .
La p ro duction d'œuv res d'ivoire est entière
ment liée aux aléas de s importations et donc aux flu ctu ation s de la politique.
L'époque des Ca rolin giens (v111• -1x• s.), celle des empereurs ottoniens (x•-x11 • s.), puis le x111• siècle gothique marquent l'a pogée de cet art, déjà très prisé dans !'Antiqui té.
Nés de l'imitation de quelques œuvres de l'Empire romain tar
dif , les ivoires carolingiens forment un
gro upe original d'une beauté et d'une qualité tell es que peu d'œ uvres
médiévales peuvent leur être compa rées.
Certains d'entre eux comptent parmi les monuments majeurs de l'his toire de l'art..
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