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LA REDDITION DE BREDA de Velàzquez (analyse)

Publié le 14/09/2014

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Gloire incontestée du «siècle d'or« de la peinture espagnole — le xvie —, et peintre privilégié du roi Philippe IV, Diego de Silva Velàzquez est né à Séville en 1599, dans une famille de la petite noblesse. Entré en apprentis­sage dès 1611 chez le peintre Pacheco (dont il épousera la fille Juana en 1618), il est reçu maître en 1617. De ces années, on conserve des scènes popu­laires qui, loin du maniérisme attardé de Pacheco, s'inspirent du style réaliste de l'Italien Caravage : ainsi le Vendeur d'eau (Londres, Apsley House) ou la Vieille femme faisant frire des œufs (Edimbourg, National Gallery).
 
Désireux d'obtenir les faveurs du roi Philippe IV, le peintre s'établit en 1623 à Madrid, où il a séjourné brièvement quelques mois plus tôt. Un portrait (perdu) du souverain le fait remarquer, et il est nommé peintre du roi dès août 1623. Alors commence, entre le prince aimant les arts et le peintre de souche noble, une relation qui durera près de quarante ans. Velàzquez devient le por‑

« La clémence de l'Espagne Une si grande bienveillance reflète en partie ce qui se passa à Breda en 1625.

La ville se rendit après un s iège d'un an, sans effusion de sang.

Un acte de reddition fut signé, dont les termes, particulièrement magnanimes , laissaient les Hollandais se retirer en bon ordre, battant tam· beurs et couleurs au vent.

En 1627, le graveur français Jacques Callot représenta l'événement, montrant Spinola , à cheval , flanqué de ses sol­ dats , passant en revue la troupe des vaincus menée par un carrosse dans lequel avait pris place le gouverneu r de la ville.

Mais nul docu· ment ne nous informe sur les conditions dans lesquelles se déroula la remise des clés, et Velazquez, bien sûr, n 'assista pas à l'événement.

C'es t une pièce du g rand auteu r Calderon de la Barca , El sitio de Breda , jouée en 1626 , qui dut inspirer au peintre l'idée d 'exprimer par une composition iconographique neuve la clémence du vainqueur.

Dans la scène prin cipale de la pièce, en effet, Nassau remet les clés de la ville à Spinola, qui les accepte en disant : •Justin, je les reçois I et reconnais votre vaillance / car la valeur du vaincu /fait la gloire du vainqueur •.

L'invention de Velazquez tran sforme la reddi­ tion en quelque chose de plus qu'une simp le victoire militaire.

L'attitude du vainqueur , pleine de généros ité et d'élégan ce, révèle la gra ndeur morale de l'E s pag ne, et donc son droit naturel à dominer.

L'ord re et le déso r dre Pourtant , la puissance des armées espagnoles est quand même subtilement évoquée : en arrière du vainqueur , le motif vertical des lances , qui a donné son aut re nom (les Lan ces) à la Reddition de Breda, traduit le nombre des régi · ments d'infanterie au service de Philippe N et leur discipline.

L'ordonnance presque parfaite de ces lances contraste avec le désordre et l'épar · pillement des armes des Holl andai s, fusils, lances plus courtes et hallebardes , rares et dis· posées irré gulièrement.

L'équipement tout entie r des soldats vaincus contraste avec le por · trait de groupe des officiers espagnols.

À gauche, du côté des forces hollandaises, les hommes de troupe sont au premier plan, visages mal rasés , fatigués; l'un d 'eux , vu de dos , est vêtu d 'un manteau de daim somptueu­ sement traité qui fait écho à la robe du cheva l du vainqueur , sur la droite .

En arrière du général Spinola , les chefs des troupes espagnoles assis · tent à la cérémonie en bon o rdre , dans des tenues imp eccables.

La radiographie du tableau montre que Velazquez n'est parvenu que progressivement à créer une image aussi forte .

Précédée de des­ sins préparatoires (ce qui est exceptionnel dans l'œuvre de Velazquez ), la Redditi on de Breda se présente à l 'analyse aux rayons X comme un fouillis de ligne s presque indéchif­ frable.

De multiples changements sont inter­ venus en cours d 'exécution, les principales rect ifications portant sur l'élément symbo­ lique majeur, le gro upe des lances espagnoles , que Velazquez avait repr ésentées plus courtes dans un premier temps .

La force du tableau tient à cette maturation lente.

Les poses des personnages ont aussi été subtilement modifiées à mesure que le tableau prenai t forme, de façon à donner plus de vie au chef-d 'œuvre.

Tel personnage est représenté en train de regarder le spectateur au lieu d'exami ­ ner la scène; tel autre, comme le magnifique capitaine en blanc , admoneste probablement un chien ou un peti t valet d'armes caché par les grandes silhouettes du premier plan; un dernier , enfin, un fantassin espagnol au visage quelque peu inquiétant sous son grand chapeau à rebords, semb le plongé dans ses pensée s.

Ces repentirs ont laissé des traces visibles à l'œil nu dans le tableau.

Sous le bras du géné· rai Spinola, une traînée noire marque l 'ancien tracé de la manche , plus large.

Un peu plus haut, le chapeau du fantassin q ue nous avons cité se dédouble, vestige de la forme que Velazquez avait d'abord dessinée.

Une chose, pourtant, semble n'avo ir jamais varié dans le tableau : c'est l'é quilibre des teintes , qui oppose le premier plan, avec ses g rands personnages aux couleu rs brunes, noires ou verte, fortement contr astée s, et le paysage qui se développe en con trebas, dans des teintes rosées et bleutées dont les transpa· rences nacrées rappellent l'aquarelle.

Voir aussi : p.

196-197 (Les Ménines ).

Haute de 307 cm et large de 367 cm, la Redd ition de Breda , constitue la plus grande peinture qui ait été conservée de Velâzquez.

L'œuvre , une huile sur toi le , fut exécutée en 1635 pour décorer le salon des Royaumes du palais d'é té du roi d'E spagne , le Buen Retira .

Au xv111 • siècle, elle passa au Palacio Nuevo, puis entra au musée du Prado en même temps que l'autre grand tableau de Velazquez, les Ménines , en 1819 .. »

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