La peinture sous Louis XIV
Publié le 15/11/2018
Extrait du document
Les amateurs d'art
• Le peintre n'a plus pour client privilégié la Cour et l’État. Il peint désormais en fonction d'un marché composé principalement d'amateurs d'art et de collectionneurs.
• Ces amateurs sont des hommes de la finance - comme le banquier Pierre Crozat -, des bourgeois, des fermiers, des receveurs généraux, des notables...
Cette riche clientèle dispense le peintre de courir après les pensions royales. Celui-ci y gagne une certaine indépendance financière.
• Cette clientèle souvent affranchie de toute tradition culturelle et picturale permet plus facilement au peintre d’imposer son art
et sa manière de voir.
CRISES ET METAMORPHOSES
- Le xviii' siècle fait passer la peinture d'un art de la cour à un art de la ville, avec ses collectionneurs bourgeois et ses marchands professionnels, d'un art de l'État à un art de la sphère privée, avec ses portraits de particuliers et ses scènes de genre. Les règles rigoureuses du siècle précédent laissent place aux styles plus fantaisistes et aux thèmes plus légers de la peinture galante. La réaction viendra dès le règne de Louis XVI avec le néoclassicisme.
LA FIN DES GRANDES COMPOSITIONS
• Dans les dernières années du règne de Louis XIV (1643-1715), les caisses du royaume sont vides. Les dépenses militaires priment sur les commandes monumentales.
• Plus décisif est le changement de goût dans la décoration d'intérieur. Les somptueuses galeries qui étaient de règle dans les demeures princières font place à des salons intimes. La peinture se réfugie sur des panneaux amovibles, dessus de porte, trumeaux. Le décor des boiseries s'allège.
• Enfin, la préférence des amateurs d'art va aux formats réduits, moins coûteux et pouvant être regroupés dans les cabinets de tableaux.
• Quelques grandes commandes sont toutefois exécutées à cette époque. En 1702, le duc Philippe d'Orléans demande à Antoine Coypel (1661 -1722) de décorer la galerie du Palais royal de fresques et de peintures illustrant l'histoire d'Énée.
• Une autre commande de grande ampleur est celle du plafond du salon d'Hercule (1733-1736) à Versailles, réalisée par François Lemoyne (1688-1737). Rompant avec la tradition, cette peinture est conçue en une seule envolée, à l'exemple des grandes réalisations italiennes de Tiepolo. Ce plafond est le premier de ce genre et aussi le dernier.
• L'ultime possibilité pour les peintres inspirés par les œuvres de grand format est de recourir aux cartons de tapisserie destinés aux manufactures des Cobelins et de Beauvais.
Les influences flamande
ET HOLLANDAISE
• Depuis la victoire des partisans de Rubens sur ceux de Poussin à l'issue de la « querelle du coloris » (1671 -1680), la couleur prime sur le dessin.
• Cette conception influe sur le style : rejet du contour net au profit du fondu, recours à de larges aplats de glacis créant des ombres transparentes, des reflets et des chatoiements. Plus que le trait, c'est donc la force expressive de la couleur qui doit suggérer les modelés, le relief des matières et les atmosphères.
• L'ascendance de la peinture de Rubens se traduit aussi par une palette vibrante, dominée par les tonalités chaudes, brunes et nacrées.
• Enfin, dans la tradition des écoles flamande et hollandaise du xvti' siècle s'impose une prédilection pour la peinture de genre - jusqu'alors peu répandue en France - et les compositions plus intimistes.
La « FÊTE GALANTE » OU ÉMERGENCE
D'UNE PEINTURE poétique
• La métamorphose de la peinture française au xviii' siècle se traduit par l'inversion de la hiérarchie des genres.
• Las de la guerre et de l'héroïsme, les artistes et le public se détournent des sujets historiques ou bibliques jusqu'alors en vogue.
• Un engouement se fait jour pour les sujets mythologiques érotiques à caractère décoratif, à l'exemple de Vénus et Bacchus (1726) de Noël-Nicolas Coypel, ou de Vénus et Adonis (1729) de Lemoyne.
• Avec la Régence (1715-1723) se développe le goût pour les plaisirs mondains et les spectacles. Cette ambiance « aimable » s'accorde parfaitement avec les sujets de genre, autrefois méprisés par les tenants du « grand style » à présent moribond. Pastorales, scènes de théâtre, portraits, paysages, scènes de la vie quotidienne rencontrent la faveur du public. • En 1717, Antoine Wateau impose un genre nouveau : la « fête galante ». C'est dans cette catégorie que l'Académie royale accepte son tableau de réception, intitulé Pèlerinage à l'île de Cythère.
«
LE
SENTIMENT MIS EN SCÈNE
LA PASSION DU PORTRAIT
• Réservé jusque-là aux seuls grands du
royaume, le portrait devient accessible
à d'autres catégories sociales.
Nouveaux
riches et grands bourgeois continuent
à poser comme ils avaient commencé
à le faire devant Nicolas de Largillière
(1656-1746).
Bientôt, tous ceux qui
en ont les moyens veulent accéder
à cette forme de consécration.
• Au début du siècle, le portrait est encore
une peinture
de Cour.
Le
Portrait de
Louis X/Ven
costume de
ucre (1701)
de Hyacinthe
Rigaud en
constitue,
dans toute
l'Europe, le modèle par excellence.
Conférant au pe�>onnage une expression
de majesté souveraine et d'autorité
absolue, il confond l'individu
et la fonction.
• En 1730, le Portrait de Louis XV
en costume
de ucre,
du même
Rigaud,
montre
Louis YN
jeune, mais
dont l'autorité
est soutenue
par de
multiples attributs royaux, la main
gauche exécutant un geste impérieux.
l'apparat appuie ici la majesté
de la fonction royale.
• Vers le milieu du siècle, la conception
du portrait intime évolue : outre la
ressemblance physique, le caractère
du modèle transparaît à présent.
Désormais le peintre reflète l'âme.
• Sujets privilégiés du portrait moral,
les écrivains,
savants ou
at1istes sont
représentés
dans leur
fonction,
écrivant, jouant
d'un instrument
ou conversant
dans l'atelier.
• Variante du portrait d'apparat,
le portrait mythologique ou historié
connaît un succès vif, mais éphémère.
À l'image de trois des filles de Louis YN
qui sont représentées en Flore ou
en Diane, toutes les dames de la cour
et celles qui le peuvent veulent
leur portrait en déesse.
• La miniature témoigne quant à elle
de la vogue que
connaissent
les portraits
de femmes
et d'enfants.
Peinte à
l'aquarelle sur
ivoire, nichée
dans un
médaillon,
elle est empreinte d'un sentimentalisme
de circonstance.
• Ainsi, de l'image intime à l'évocation
sociale du modèle, le portrait connaît
au XVIII ' siècle une grande diversité
de traitements qui confère au genre
ses lettres de noblesse.
L'ÉDUCATION
DE L'AMOUR
• Placé sous le signe de l'amour et du
libertinage, le XVIII' siècle fait la place
belle aux sujets mythologiques érotiques.
Voluptueuses et gracieuses, ces œuvres
offrent une grande unité d'inspiration
et de style.
Les formes, légères, suivent
les mouvements des corps dénudés
et des drapés soyeux.
La gamme des
coloris joue sur le contraste des teintes
tour à tour claires, chaudes ou nacrées.
• Contemporaine de la littérature
sentimentale à thèmes champêtres,
la pastorale galante est très à la mode
durant tout le siècle et va jusqu'à
s'incorporer aux arts décoratifs
-toile de Jouy, papier peint ou biscuit
de Sèvres.
Irréaliste dans le coloris
et immorale dans le choix des sujets,
la pastorale met en scène les ébats
de bergers et bergères, enrubannés
comme leurs troupeaux.
• l'accomplissement de l'amour n'est
pas occulté : rayonnement de la chair,
déroulement des formes, abandon
des corps, chaude luminosité, cadre
élégant.
..
De ces ébats amoureux
frôlant la « polissonnerie » se dégage
une sensuelle beauté.
• l'amour maternel est une variante de
l'expression du sentiment.
À l'exemple
de l'Heureuse Fécondité (1775) de
Fragonard, la maternité couronne
souvent le triomphe de l'amour.
LE TRIOMPHE DU GENRE
• Miroir de la bourgeoisie représentée
dans son intimité domestique et
familiale, le peinture de genre connaît
un fort engouement.
Ici, la fiction
n'est pas de mise :l'artiste s'attache
à traduire fidèlement les expressions
et les gestes, à rendre minutieusement
les tissus et vêtements, à croquer
sur le vif les sentiments des modèles.
• Directement inspirée des tableaux
hollandais du XVII' siècle, la scène de
genre populaire saisit les modèles dans
leurs occupations familières -lessive,
couture, cuisine, soin de la table ou du
vêtement.
..
Il s'agit de jeunes mamans,
ou de servantes
occupées à
leurs tâches,
ou d'enfants
absorbés
dans leurs jeux.
Le sujet baigne
dans la
douceur des sentiments.
• En marge de la fête galante, qui ne
survit pas aux disciples de Watteau,
la mode du travestissement traduit
l'attrait pour le théâtre et l'opéra.
Seuls ou en groupe, les modèles posent
avec réalisme dans une débauche
de rideaux somptueux, d'objets rares,
de fleurs et d'animaux familiers.
l'éclat des couleurs et l'aspect lumineux
font miroiter le rendu des matières.
• Sous l'impulsion de la direction des
Bâtiments du roi, la peinture d'histoire,
tombée en désuétude, est ressuscitée
par Gabriel-François Doyen (1726-18 06)
et plus encore par Joseph-Marie Vien
(1716-1809).
Puisant leur inspiration
dans l'histoire romaine, ils aspirent à
recréer le rythme des œuvres classiques
avec une fidélité archéologique.
L'HtGtMONIE DE LA NATURE
• Très appréciée des Flamands et
des Hollandais, la peinture animalière
demeure un genre mineur en France.
Il
s'exprime à travers l'œuvre de François
Desportes (1661-1743), peintre de la
vénerie de Louis XIV puis de Louis YN,
et de Jean-Baptiste Huet (1745-1811),
qui excelle aussi dans le paysage.
• En revanche, la nature morte connaît
un grand épanouissement.
Adapté
au format des dessus-de-porte et des
trumeaux, ce genre donne à voir des
compositions spectaculaires de fleurs,
de fruits, de gibiers ou de poissons
entourés d'objets d'orfèvrerie et de drapés
de velours dans lesquelles la couleur
l'emporte sur l'illusion des matières.
• Véritablement éclipsée durant la
première moitié du siècle, la peinture
de paysage connaît un renouveau :
marines et paysages soumis au
déchaînement des éléments évoquent
une nature grandiose.
Ce renouveau
s'exprime d'une autre façon dans la
peinture de Hubert Robert (1733-1808)
maître incontesté du genre des ruines.
LES GRANDS MAÎTRES DU SIÈCLE
lEAN-ANTOINE WATTEAU (1684·1721)
• Élève de Claude Gillot (1705-1708),
qui perpétue le souvenir de la Comédie
italienne et des masques, Watteau a
une révélation en découvrant les Rubens
de la galerie Médicis au Luxembourg ...
Toute sa vie, il vouera au maître
flamand une fervente admiration.
• Second prix de Rome (1709), il est
admis à l'Académie royale (1717) avec
l'Em barquement pour Cythère, imposant
le nouveau genre des « fêtes galantes ».
Peintre de la poésie, du caractère
éphémère et du sentiment amoureux,
on lui doit notamment l'Amour au
théâtre fronçais, Gilles, la Danse,
la Finette, l'Indifférent.
..
lEAN-MARC NATTIER (1685·1766)
• D'abord dessinateur pour les graveurs,
il se consacre aux portraits et obtient
la faveur de Marie Leszaynska,
épouse de Louis YN.
• Devenu le portraitiste de la famille
royale (1742), il se distingue dans le
portrait mythologique, ceux de Madame
Henriette en Flore, de Madame
Adélaïde en Diane, de Mademoiselle
de Clermont en Nymphe.
IEAN·BAPTISTE
SIMtON CHARDIN
(1699-1779)
• Élève de Nicolas Coypel, il travaille avec
Van Loo à la restauration des fresques
du Primatice.
La Raie (1728) lui vaut
son admission à l'Académie royale.
• VeiS 1733, il introduit la figure humaine
dans ses toiles.
Ses scènes de genre
-lo Blan chisseuse, le Château de cartes,
le Bénédicité -lui valent l'admiration
des amateurs bourgeois.
• Sous une apparente simplicité,
ses agencements picturaux révèlent
un art profondément médité.
• Élève de Lemoyne, puis graveur
des œuvres de Watteau, il séjourne
en Italie (1727-1731}.
Maître de
la peinture galante et de rocaille,
il crée un univers sensuel et gracieux
aux formes ondulantes et aux couleurs
vives et nacrées.
On retient de lui
le pDrlrDit de Madame de
Pom pDdour, Vénus devant la forge
de Vulcain, le Triomphe de Vénus ...
• Il est nommé (1765} premier
peintre du roi.
MAURICE QUENTIN DE LA TOUR
(1704·1788)
• Agréé par l'Académie royale en 1737,
il est le plus grand pastelliste du siècle.
Multipliant les portraits des grands
personnages de la Cour, de l'aristocratie
et de la haute bourgeoisie -Louis YN,
le maréchal
de Saxe,
le Dauphin -.
il peint aussi
le monde
des arts et
des lettres
- d'Alembert,
Jean-Jacques
Rousseau.
• Remarquable physionomiste,
il excelle dans l'art de rendre les
expressions éphémères et dans celui
de capter la personnalité profonde
du modèle.
CARLE VAN Loo
(1705·1765)
• Grand prix de peinture {1724),
il s'installe à Rome, puis à Turin
et travaille au palais du duc de Savoie
jusqu'en 1734.
• Nommé peintre du roi (1762},
il demeure attaché à la tradition
du « grand style n dans ses œuvres
religieuse -l'Adoration des bergers,
la Présentation au temple -qu'il
réalise pour l'église Saint-Sulpice.
• Il se montre moins conventionnel
dans ses peintures galantes, ses scènes JOSEPH
VERNET (1714·1789)
• Tout d'abord décorateur, il séjourne
en Italie de 1734 à 1753.
Mêlant paysages
et scènes de genre, il peint des scènes
de la vie romaine -Ponte Rotto -et
représen te des naufrages -la Tempête.
• À la demande du marquis de Marigny,
il peint (1753-1762) une série de
quatorze pDrts de France.
.
..
.
-·
• Peintre des paysages maritimes et
alpestres, dans une palette peu nuancée,
il préfigure le romantisme.
IEAN·BAPTISTE GREUZE (1725·1805)
• Peintre de genre, il conforme ses
œuvres à la sensibilité de l'époque
marquée par la pensée de Rousseau.
Au salon du Louvre de 1755, il triomphe
avec Un père de famille expliquant
la bible à ses enfants.
• Cherchant à hisser la peinture de genre
au niveau de la peinture d'histoire
-la Malédiction paternelle -.
il évolue
vers un pathétisme moralisateur
- le Mouvais Fils puni.
• Auteur de portraits vigoureux et
sensibles
-Sophie
Arnould-,
il se plaît aussi
à représenter
des visages
d'enfants et
de jeunes filles
-la Cruche
cassée.
IEAN·HONORt fRAGONARD (1732·1806)
• Ëlève de Boucher, prix de Rome (1752)
avec Jéroboam sacrifiant aux idoles,
il fait le voyage dans la Ville éternelle
où il exécute de nombreux croquis et
paysages -les Jardins de la villa d'Este.
• Reçu à l'Académie royale (1765)
avec Corésos et Callirrhoé, il abandonne
par la suite la peinture d'histoire.
• Il est surtout connu comme peintre
de la galanterie et du libertinage
-la Chemise enlevée, la Gimblette-.
mais célèbre aussi le paysage plaisant.
· Son style ne cesse d'évoluer : la Fontaine
d'amour annonce le romantisme..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Louis XIV, style - peinture.
- Louis XIV : L'Académie royale de peinture et de sculpture
- La Peinture sous Louis XIV
- Mémoires de Louis XIV 1661
- Louis XIV: POURQUOI LE ROI SOLEIL ?