La peinture russe (Histoire des arts)
Publié le 16/11/2018
Extrait du document
• À la fin du xve siècle, l'art russe amorce un tournant avec l'accession d'Ivan III sur le trône du royaume de Moscovie. L'afflux d'artistes italiens à la cour du nouvel homme fort de Russie contribue à l'apparition d'un style mêlant les apports de la Renaissance à la tradition russe.
• C'est l'époque à laquelle Dionissï - ou Maître Denis -, membre actif de l'école de Moscou, réalise les icônes des métropolites Pierre et Alexis et la décoration du couvent de Théraponte (1500-1502), dans la région de Vologda, sur le thème de l'hymne acathiste de la liturgie orthodoxe. Sa peinture est grave et réservée ; ses couleurs sont fraîches, ses tons purs.
• Au même moment exerce un peintre non identifié, désigné sous le nom de Maître du Kremlin, qui peint la colossale icône de l'Apocalypse (v. 1500) dans la Dormition du Kremlin. Avec une approche très personnelle, celui-ci invente de nouveaux motifs.
• Un siècle plus tard, sous le règne d'Ivan le Terrible, les arts passent sous la tutelle exclusive du pouvoir et du clergé. La peinture entre dès lors dans une période de déclin. L’inspiration créatrice incarnée par Roublev et Dionissï se tarit. Au xvie siècle, seule la miniature offre un intérêt artistique, comme la cosmographie de Kosmas Indikopleustes.
DE L'ICONE A LA DISSIDENCE
Quelques images fortes viennent naturellement à l'esprit quand on évoque la peinture russe : les icônes, bien sur, les décors des Ballets russes, les monochromes de Malevitch et de Rodtchenko, les figures abstraites de Kandinsky, les portraits de Lénine, les toiles des constructivistes, etc. De ces exemples ressort en filigrane le trait le plus typique de l'histoire de cet art : son assujettissement au pouvoir, qu'il émane d'autorités religieuses ou politiques. L'histoire de la peinture russe se décline en trois périodes. Durant les sept siècles s'écoulant de la conversion de la Russie au christianisme, au xe siècle, jusqu'au xviie siècle, cet un art au service de la religion, qui se développe en vase clos, même si l'on peut reconnaître l'influence des maîtres de Byzance. De Pierre le Grand à la révolution d'octobre 1917, la peinture russe sort de l'isolement en s’ouvrant au monde, devient profane et participe à tous les grands courants occidentaux et à tous les genres picturaux de l'époque. L'arrivée au pouvoir des bolcheviks en 1917 ouvre la dernière période. Dans un premier temps, les peintres de l'avant-garde collaborent activement avec les bolcheviks à la construction d'un nouveau monde, avant de s'effacer devant le réalisme socialiste prôné par Staline. Quelques grandes figures comme Kandinsky et Chagall émigrent en Occident après avoir servi le nouveau régime. Aujourd'hui, l'art russe est représenté par des peintres qui ont œuvré dans le secret de leurs ateliers durant la période soviétique.
• Le couvent Saint-Michel (fin xie siècle) était aussi décoré de mosaïques, comme l'attestent les quelques fragments préservés jusqu'à aujourd'hui. Ces mosaïques qui représentent la Cène et saint Démétrios, patron de Salonique, dépassent en finesse et en richesse de coloris celles de Sainte-Sophie. Elles ont sans doute, elles aussi, été exécutées par des artistes byzantins.
• À la fin du xie siècle, Kiev est l'unique centre où se pratique l'art de l'enluminure. À la différence de celui de Byzance, cet art reste mineur. Le psautier Khlioudov, qui regroupe trois Évangiles réalisés du xie au xiie siècle, est l'exemple le plus célèbre du genre.
• Épargnée par l'invasion mongole (xiie-xiiie siècle), Novgorod devient au xiv' siècle le centre de la peinture religieuse en Russie. L’art de la fresque s'y impose grâce à son coût moins élevé. La mosaïque disparaît alors.
• Au xive siècle, Théophane le Grec (V. 1335-v. 1405) est le maître incontesté de cette technique picturale. Il réalise en 1378 les peintures murales de la cathédrale de
LA PEINTURE ANCIENNE RUSSE (Xe-XVIIe SIÈCLE)
la Transfiguration dont le style se caractérise par des silhouettes élancées et des tons brun-rouge. Mal connu, cet artiste serait peut-être aussi l'auteur des fresques de l'église de la Dormition de Volotov.
• Première ville convertie au christianisme, Kiev devient aussi au xe siècle le premier centre artistique de Russie grâce à l'action du prince Vladimir qui recrute des peintres et artistes grecs pour y bâtir des églises.
• La première du genre, Sainte-Sophie de Kiev (début xie siècle), est décorée selon la tradition byzantine de mosaïques recouvrant toutes les surfaces. Soutenues par des fonds dorés, elles éclatent en couleurs claires.
• L'art kiévien affiche déjà quelques différences avec son modèle en mélangeant fresques et mosaïques. D’autre part, l'influence du modèle
Moscou, CITÉ DES ARTS RUSSES
• Dès la fin du xiv' siècle, Moscou commence à évincer Novgorod pour devenir le principal foyer artistique en Russie au siècle suivant.
• Vers 1406, Théophane le Grec et les Russes Andreï Roublev et Prokhor de Gorodets y réalisent la première iconostase connue à personnages en pied dans la cathédrale de l’Annonciation. Cette cloison composée d’une multitude d'icônes influencera durablement la peinture russe.
• De tous les élèves de Théophane, le moine Andreï Roublev (v. 13601430) est de loin le plus brillant.
Il est aujourd'hui considéré comme le plus grand artiste russe de cette période, et même de toute l'ancienne Russie. En se détachant du style illusionniste de Théophane, il ouvre la voie à une nouvelle école moscovite indépendante.
«
LES
AMBULANTS ET
LE COUlANT SLAVOPHILE
• Aprés la guerre de Crimée {1853-1856),
les peintres russes représentent
avec de plus en plus de réalisme
leur époque, dénonçant ses excès
et prônant plus de justice sociale.
• C'est dans ce contexte qu'apparaît
la querelle opposant les " Slavophiles »,
tenants d'un nationalisme artistique
slave, aux " Occidentaux », forgés
par le classicisme, qui perdure
près d'un demi-siècle.
• En 1863, deux ans après l'abolition
du servage, treize jeunes peintres
rompent avec l'Académie des beaux-arts
de Saint-Pétersbourg et se regroupent
autour du
porlrll ltiste
IVIIII
Kroraskoï
{1837-1887)
dans une
Société
d'expositions ambulantes soutenue
par de grands mécènes moscovites.
• Ces artistes novateurs sont plus tard
rejoints par les écrivains et compositeurs
Léon Tolstoï, Ivan Tourgueniev, ModeS!
Moussorgski et Aleksandr Borodine.
Ensemble, ils militent pour une
renaissance de l'art slave en rejetant
les modèles occidentaux.
• Leur peinture aborde tous les genres,
du sujet historique au sujet religieux.
Dans ce dernier genre excellent
notamment Vassili Perov {1833-1883),
Vassili Verechtchaguine {1842-1904)
et Ilia Repine {1844-1930).
• Cependan� le genre du paysage connaît
aussi une embellie.
Ses principaux
représentants sont Alexis Savrasov
(183o-1897), l'" Ambulant » Vassili
Sourikov {1848-1916), Isaac Levitane
{186o-1900) et Ivan Aivazovski {1817-
1900), peintre officiel de la marine.
LA NAISSANCE DE
l.'tCOLE MODEINE lUSSE
• À la veille du xx• siècle, la querelle
entre Slavophiles et Occidentaux
commence à s'essouffler.
Les peintres
russes s'orientent de plus en plus vers
une recherche du beau qui préfigure
l'avant-garde russe.
• Serge de Diaghilev {1872-1929)
et Alexandre Benais {1870-1960) sont
les chefs de file du nouveau courant
artistique.
En 1898, ils fondent la revue
Mir lskousstva-" le Monde de l'art»
qui rallie une nouvelle génération de
peintres.
Leur slogan -" l'art pour l'art»
est proche de celui des symbolistes.
des costumes des Ballets russes
qui reçoivent un accueil enthousiaste
dans l'Europe entière.
• Auprès d'eux.
Constantin Korovin
(1861-1939) se consacre aux arts
appliqués e� surtout à la création
de décors pour les opéras de Sawa
Mamontov et du Bolchoï.
•
À la même époque, d'autres peintres
s'illustrent
également dans les arts
décoratifs
et scéno
graphiques :
l'œuvre de
LéonB11kst 1 ��� � �� {1866-1924) L influence les
créations du couturier parisien Paul
Poiret ; Aleksandr Golovine (1863-1930)
travaille pour les théatres impériaux
de Saint-Pétersbourg.
·Au début du xx• siècle, les courants
fauviste et cubiste, récemment apparus,
trouvent un large écho dans les milieux
artistiques de Moscou et de Saint
Pétersbourg.
Ceux-ci éclatent, à la veille
de la Révolution de 1917, en divers
courants avant-gardistes.
• Roberl Rllfdovltdr Ftllk {1886-1958),
Petr Kontchalovski {1876-1956),
Aristarkh Lentoulov {1882·1943) ou
Lioubov Popova {1889-1924) ouvrent la
marche vers le renouveau de la peinture
russe en fondant en 1910 le groupe du
Valet de carreau -en référence à l'œuvre
du peintre français Paul Cézanne.
• Les cubistes Mikha.tl Larionov {1881-
1964), KtaltBir
Mllltvftch
{1878-1935)
et Aleksandr
Rodtchenko (1891-1956),
qui rejoignent
un moment
ce groupe,
deviennent
les principaux protagonistes de l'avant
garde russe entre 1910 et 1915.
• Larionov adopte le rayonnisme qui
recourt au réfléchissement de la lumière
sur les objets.
En 1914, il s'installe
à Paris où il se consacre aux décors
et à la création de costumes de ballets.
• Malevitch fonde le suprématisme
qui tend vers un art plastique délivré
de buts pratiques et esthétiques.
• Formé à l'École des beaux-arts de Kazan,
Rodtchenko
développe un
art non objectif
qui vagabonde
entre le cuba
futurisme et le
suprématisme.
Son tableau à
partir de 1911, avec Franz Marc
et August Macke.
En 1912, il publie
Ou spirituel dans l'art texte fondateur
de la nouvelle peinture.
Alexeï Jaw1ensky
{1864-1941), qui étudie les beaux-arts
en Allemagne, participe à nombre de
courants atistiques russes formés à
l'étranger tout en poursuivant son travail
sur les visages, dont la série des "Têtes »
est la plus représentative.
De 1910 à 1914,
M11rc Ch11g1111 {1887-1985) séjourne
à Paris où il se lie avec les cubistes.
• Le jeune gouvernement bolchevik
représenté
commissaire du peuple à
l'instruction,
Alltlt oli Lou
ntttchllrsld,
ne parvient pas
à rallier sous
son étendard
l'establishment artistique russe, mais
trouve de fidèles partisans dans l'avant
garde.
Ensemble, ils fondent la Section
des arts plastiques et l'hebdomadaire
lskousstva Kommouni- " 1 'Art de la
Commune » -qui fédèrent les jeunes
artistes disposésà radicaliser leur
point de vue théorique sur l'art.
• En janvier 1919, un collectif d'artistes
futuristes demande son adhésion
au Parti communiste, au nom d'une
nécessaire révolution culturelle -dans
le secret espoir, égalemen� de se voir
confier des postes de responsabilité
au sein du gouvernement.
Ils sont
toutefois éconduits par Lénine
qui voit d'un très mauvais œil leur
revendication de faire table rase
des chefs-d'œuvre du passé russe.
·Vers 1920, la révolution d'octobre
promeut les peintres du courant
constructiviste naissant.
Les autorités
soviétiques fondent à Moscou les
Laboratoires artistiques de l'État
(Vchutemas) qu'elles confient
notamment
à Kandinsky,
Malevitch
1 et Vl•dl•lr
Ttdllne
{1885-1953).
Kandinsky
reçoit aussi
la direction
du musée
de la Culture picturale à Petrograd ;
en 1921, il fonde l'Académie des sciences
artistiques à Moscou.
De son côté, Chagall
est nommé commissaire aux Beaux-Arts
dans sa région natale de Vitebsk.
•
Rapidemen� ces artistes se partagent
en deux grandes tendances séparées
par leurs positions théoriques opposées
sur le rôle de l'art dans la Révolution.
• La première, qui regroupe Kandinsky,
Naum Gabo {189o-1977) et son frère
Anton Pevsner (1886-1962), défend
l'idée que l'art est une pure activité de
recherche, de création et d'imagination
qui se borne à la représentation et à
la compréhension du monde extérieur.
Les membres de ce groupe rompent
rapidement avec le régime soviétique
et émigrent : Kandinsky quitte l'URSS
en 1921 pour la France ; Gabo émigre
en 1922 pour les États-Unis ; Pevsner
et Chagall s'installent défnitivement
en France en 1923.
• La seconde tendance, qui rassemble
surtout des architectes, se propose
de construire un nouveau monde.
Ses membres forment l'aile dure
du courant constructiviste qui identifie
ses objectifs à ceux du communisme
et rejette les anciennes valeurs artistiques.
Pour eux.
l'art est une science qui doit
collaborer aux mutations économiques,
sociales et politiques prônées par
le pouvoir bolchevik.
Parmi eux figurent
les frères Vesnine, Leonid {1880-1950)
et Alexandre {1883-1959), qui propulsent
l'architecture soviétique au devant de
la scène, avec notamment la réalisation
du Palais du Travail {1923) et des bureaux
de la Leningradskaïa Pravda {1924).
• Malevitch, difficilement classable,
reste à l'écart de ces deux tendances,
se réclamant rarement d'une
quelconque action politique ou sociale.
• En 1923, le poète et peintre Vl•dl•lr
MIIÏflkovsld fonde la revue
Lef- " le Front
gauche de
l'art » - avec
certains poètes
futuristes et
le réalisateur
Sergueï
Mikha.tlovitch
Eisenstein.
Lef prône un art de rue
qui n'est pas exempt d'ambigunés
théoriques : tantôt l'art y est déclaré
moribond et l'artiste constructeur,
tantôt les activités humaines y sont
proclamées irrémédiablement
créatrices.
• Lutte de pouvoir ou combat d'idées:
les collaborateurs de la revue entrent
à leur tour en conflit avec les
constructivistes qui tiennent les rênes
des institutions artistiques soviétiques.
• Dans ce bouillonnement intense
du monde artistique, certains peintres
comme Tatline et Rodtchenko
abandonnent totalement leur chevalet
pour se consacrer au design d'objets
usuels.
Cet art productiviste forme
un volet important de la reconstruction
du mode de vie orchestré par
les artistes à cette époque.
LE ltAllSME SOCIAUM SOUS STAliNE
• Après la mort de Lénine en 1924,
la situation de l'art moderne russe
se détériore gravement Tandis que
certains artistes émigrent d'autres
se limitent à enseigner.
• À la fin des années 1920,
les mouvements d'avant-garde
disparaissent de l'horizon artistique
en raison des luttes entre les divers
courants, de l'arriération culturelle
de la grande masse de la population
et du constat désormais dressé de
l'absence de perspectives politiques
ou économiques du système soviétique.
Aucun d'entre eux n'a finalement réussi
à s'Imposer comme l'expression d'un
art social iste.
En 1930, le comité central
du Parti communiste condamne leur
action en faveur d'une reconstruction
d'un monde nouveau, considérée
comme fantaisiste et utopique.
• Sous Staline, l'art est peu à peu
dotée d'une doctrine officielle :
le " réalisme socialiste».
Étroitement
contrôlée, la production artistique
de cette période devient académique
et anecdotique.
Certains
peintres
comme Serge
Guerassimov
{1885-1964)
ou Vl•dl•lr
S.rov {191o-
1968) peignent
des portraits
posthumes de Lénine, d'autres comme
Robert RafaHovitch Falk travaillent
en secret ; d'autres encore essayent
d'innover dans les limites permises
comme Alex11ndrr Delnek11 {1899-
1969) et Dmitri Jilinski.
LA SECONDE AVANT·CAIDE lUSSE
• Après la mort de Staline en 1953,
quelques jeunes peintres parviennent
à produire hors du champ de l'art
officiel et à échapper à la censure
et à l'accusation de dissidence, au
prix de trésors de ruse et d'habileté.
Ils sont considérés comme la seconde
avant-garde russe ; certains ont acquis
une réputation internationale.
• Parmi eux, 11111 K111Hikov (né en
Ukraine en
1933) est
aujourd'hui
l'un des
peintres russes
les plus réputés
au monde.
Après avoir
commencé sa carrière
comme illustrateur de livres pour
enfants, il s'attache depuis l'éclatement
de l'URSS à montrer le quotidien russe
contempo rain au travers d'installations
comme la série des " cuisines » {1982).
• Le Moscovite Vladimir Yankilevski
(né en 1928) expose également dans
les galeries internationales.
Il a bati
l'essentiel de son message plastique
sur la recherche des secrets de
l'existence humaine et sur les manières
de les restituer par le biais de l'art.
Dans les années 1970, il réalise
des objets dans lesquels il insère
des moulages de personnages.
Après la chute de l'URSS, son cycle
sur« la ville » évoque le conflit
entre l'harmonie idéale et l'absurdité
de l'existence humaine.
• Eric Boulatov (né en 1933)
et Oscar Rabin (né en 1928) sont
deux autres figures de cette seconde
avant-garde russe..
»
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