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LA Peinture de 1950 à 1959 : Histoire

Publié le 13/12/2018

Extrait du document

histoire

 

 

Les années quarante avaient été marquées par l’apparition à peu près simultanée de deux phénomènes de rupture qui ne sont pas sans points communs (l’accent mis sur la signification de la trace gestuelle et sur le traitement de la matière): d’une part, l’émergence d’une école de New York dont la fulgurance gestuelle (Pollock) avait été immédiatement promue à la dimension d’un mythe par une historiographie américaine soucieuse d’affirmation nationale, et, d’autre part, la découverte plus discrète, à Paris, d’artistes (Wols, Fautrier, Hartung, Dubuffet), pionniers de ce que le critique Michel Tapié appellera en 1951 l’«art informel». Vers 1950, l’art abstrait, dans ses versions américaine (expressionnisme abstrait) et française (abstraction lyrique et informel), est donc à la pointe des recherches et apparaît comme la forme privilégiée de l’art: toute autre expression est dénoncée comme réactionnaire (polémique abstraction ou figuration, à Paris) ou relevant d’un formalisme sec (abstraction géométrique). Malgré la diffusion internationale de l’art abstrait dans les années cinquante, Paris et New York demeurent les centres principaux, sans qu’aucun lien véritable se soit développé entre les deux capitales. Cette inflation de l’art abstrait, qui conquiert désormais un public grâce à l’action de quelques galeries créatrices (Drouin et Facchetti à Paris), ne va pas sans inconvénients et a peu à peu créé les conditions d’une saturation et d’un essoufflement perceptibles dès la fin de la décennie, où l’on ne craint plus de parler d’un académisme abstrait tant à propos, par exemple, des épigones new-yorkais de Pollock que des abstraits lyriques de «tradition française» ou de certains tenants de l’informel (Mathieu).

États-Unis: les peintres

 

DU CHAMP COLORÉ (Color Field Painting)

 

Du groupe des expressionnistes abstraits qui se forme à New York au cours de la Seconde Guerre mondiale, on a d'abord connu les «Action Painters» dont l’explosion gestuelle et le travail sur la matière avaient paru révolutionner les techniques et les conceptions de la peinture occidentale (technique du «dripping», espace illimité grâce à l’effet «over ail»). Les années cinquante voient l’apparition de peintres (Mark Rothko, Barnett Newman, Ad Reinhardt) qui, refusant la «facilité» gestuelle, proposent un art exempt de violence dans la facture et fondé sur l’expansion lumineuse de grands champs de couleur (d’où l’appellation de «Color Field Painting» par le critique Clement Greenberg en 1955). Pour ces peintres marqués par les recherches de Matisse sur la puissance intrinsèque de la couleur et par l’espace cosmique du Monet des Nymphéas qu’on redécouvre alors («Monet Revival»), la notion d’expressionnisme abstrait a un sens moins évident: la méditation philosophique, voire mystique, qui les inspire exclut toute sensualité tactile et aboutit à un art qui tend à la dématérialisation de la facture et vise à l’envoûtement par le seul rayonnement lumineux et chromatique de grandes plages de couleur dans lesquelles s’abolit tout sentiment d’un espace fini et tangible.

histoire

« LA PEINTURE.

Bame« Ntwman: 1952.

Ulysse.

© Collection parriculi�re · XDR · Archives SGED LA PEINTURE.

N i c olas de Staël: le Lavandou, /952.

© Musle national d'Art moderne - Centre Georges-Pompidou, Paris ©ADAGP 1989 l'absolu, il en vint, à force de renoncements, à ne plus peindre que des séries monocbrom� (rouges, bleues et surtout noires) où les toiles sont divisées en carrés peints dans des valeurs si proches qu'ils sont pratiquement imperceptibles.

Cette économie de moyens a fait de lui un artiste essentiel dans le développement du Minimal Art des années soixante.

La démarche des peintres du Color Field constitue une étrange parenthèse méditative dans le tourbillon matérialiste de la vie américaine des années cinquante; en un temps où, de la Corée au maccarthysme, l'Amérique se replie sur ses mythes, ils se sont voulus prophètes et visionnaires, portés par la conviction que la civilisation occ identale agonisait.

Plus que la portée spirituelle et métaphysique de leur art, ce sont leurs qualités chromatiques, leur leçon de primau­ té d'une couleur créant l'espace, qui ont intéressé des artistes que Clement Greenberg regroupera, dans les années soixante, sous le nom de Post-Painterly Abstraction et qui forment une seconde vague de Color Field tout en empruntant à l'Action Painting certains points de départ (Morris Louis, Sam Francis, Kenneth Noland).

F RANCE: LES ABSTRAITS LYRIQUES ET INFORMELS En France, les groupes ou personnalités révélés épisodique­ ment pendant la guerre (1941: exposition dite des Jeunes Peintres de rradicion française, galerie Braun à Paris) ou dans l'immédiat après­ guerre (précurseurs de l'informel: Wols, Fautrier, Hartung, Dubuffet) font, dans les années cinquante, figures de référence.

Issus d'un compagnonnage datant des années d'occupation, les abstraits lyriques «de tradition française» occupent alors le devant de la scène, ce qui explique peut-être leur désaffection actuelle; ces peintres sont soutenus par d'éminentes personnalités de l'histoire de l'art (Bernard Dorival, Pierre Francastel) qui voient en eux les conti­ nuateurs d'une certaine tradition nationale: ils conjuguent, en effet, l'écriture structurée de Cézanne et du cubisme, un rapport à la cou­ leur issu de Matisse, Bonnard et Villon, et un souci artisanal de la «belle peinture» qui fait d'eux des adversaires de la gestualité tenue pour de la gesticulation.

Maurice Estève, Alfred Manessier et Jean Bazaine sont les représentants principaux de cette «non-figuration humaniste» qui s'attache à trouver des correspondances picturales à des éléments aussi peu visuels que le vent (Bazaine), la musique ou le sentiment religieux (Manessier).

La démarche de Roger Bissière (1886-1964) n'est pas sans affinités, à certains égards, avec celle des peintres précédents: son ralliement à l'abstraction, après 1945, va lui permettre de donner le meilleur de lui-même en traduisant, dans une écriture austère et raffinée, des émotions qui trouvent leur origine dans une ferveur toute franciscaine devant la nature.

LA PEINTURE.

Zllo Wou-ki: Vent.

1954.

© Musée national d'Art moderne · Centre Georges-Pompidou, Paris.

«;) ADAGP 1989 D'autre part, il est à noter que, comme aux plus beaux temps de l'entre-deux-guerres, des artistes d'origines diverses, mais fixés et travaillant en France, comptent parmi les figures marquantes de cette «nouvelle école de Paris» des années cinquante; les archi­ tectures frémissantes de la Portugaise Maria Helena Vieira da Silva (née en 1908) laissent affleurer d'allusives références figuratives (rues, villes, bibliothèques) mêlées à d'inextricables enchevêtrements, ma­ nifestations d'un espace labyrinthe; formé dans le climat de l'expres­ sionnisme nordique, Bram Van Velde déroule les méandres angois­ sants d'une écriture puissante, chargée d'une matière très charnelle; d'origine chinoise, Zao Wou-ki, installé à Paris depuis 1948, retrouve ses sources (les peintres Song) par le truchement de certaines compo­ sitions «Orientalisantes» de Paul Klee et, à partir de 1953, élabore de grands paysages abstraits, balayés de traits arachnéens et soulevés de remous.

Procédant d'une démarche plus radicale, l'art informel s'im­ pose grâce aux expositions organisées en 1951 (Véhémences confron­ tées et Signifiants de l'informel) au studio Facchetti par le critique Michel Tapié, grâce aussi à l'activisme de Georges Mathieu qui joue un rôle important d'initiateur et d'animateur, mettant en évidence correspondances et analogies avec l'expressionnisme abstrait améri­ cain.

I.:informel se fonde, en effet, d'une part, sur la pratique de la gestualité (disparition de la touche qui, absorbée par le geste du peintre, devient l'expression du temps: Hartung, Mathieu), et, d'autre part, sur le traitement brut de la matière (intérêt porté à la texture en l'absence de toute structure prédéterminée: Fautrier, Dubuffet, Atlan).

Les précurseurs de cette manière de peindre (Wols, mort en 1951, Fautrier, Hartung), tous apparus durant la décennie précédente, en ont également constitué le moment le plus intéressant; par la suite, dans les années cinquante, le graphisme élégant et large de Mathieu, les encres vivement rythmées d'Henri Michaux ou, un moment, les matériologies de Jean Dubuffet comptent parmi les illustrations les plus convaincantes de l'informel dont les avatars ultérieurs (tachisme, nuagisme, matiérisme) n'échapperont pas au danger du systématisme et de la monotonie.

Mais la gestualité trouve un adepte réfractaire à toute in­ fluence et à l'écart de tout mouvement en la personne de Pierre Soulages (né en 1919) qui fait sa première exposition personnelle en 1949, inaugurant une conception structurelle par larges bandes paral­ lèles ou contrariées d'un noir profond et velouté sur la blancheur de la toile qui transparaît par endroits.

Enfin, un peintre qui avait contribué à donner à l'abstrac­ tion ses lettres de noblesse, Nicolas de Staël (I9L4-1955), s'affirme comme le plus puissant créateur de l'école de Paris d'alors en revenant à la figuration à la suite du choc visuel et émotif ressenti devant le spectacle d'un match de football en nocturne au Parc des Princes. »

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