Jacques Henri-Lartigue
Publié le 05/11/2012
Extrait du document
«
I / Le sujet en mouvement.
A- L’œil, premier témoin de l’instant.
Jacques Henri LARTIGUE a donc été reconnu, essentiellement, pour ses travaux
sur l’Instant.
Or, si la définition de celui-ci comme « un moment très court » paraît juste,
elle n’en est pas moins générale.
En effet, si, de la sorte, on en donne le principal
caractère, ce dernier n’a de réalité qu’aux yeux de l’être humain, qui reconnaît le temps 1
comme une juxtaposition de ces unités fragmentaires nommées instants.
Ainsi, il est alors
possible d’en saisir la particularité première, à savoir qu’il y a autant d’instants que de
regards.
Comme l’œil ne peut pas arrêter, puis, mémoriser une action ou un mouvement
de manière nette, clairement définie et « objective » (sans déformer la réalité de l’espace
ou des évènements), Jacques Henri LARTIGUE a utilisé divers moyens pour les saisir,
que ce soit le dessin, la peinture mais aussi et surtout la photographie.
Dès son plus jeune
âge, il va exercer son regard à saisir avec justesse le mouvement, non pas à regarder mais
à voir 2
(en 1900, il note sur un carnet : « Quand un bateau siffle, je sais qu’il va passer
derrière l’île et en jouant, je regarde défiler tous les chalands les uns après les autres.
Souvent, j’ai le temps de prendre mon papier et mon crayon et de faire son portrait.
» ).
Ainsi, sur la planche n°1 intitulée Tennis , où le dessin rapidement esquissé représente
un match, l’un des deux joueurs (lui-même en l’occurrence) s’apprêtant à « smasher », se
dégage ce sens de l’observation et de la justesse du trait, car en effet, même s’il est
directement mis en situation et donc dépourvu de recul par rapport à la scène se
déroulant, les mouvements du corps sont retranscrits de manière extrêmement précise.
Ici, la jambe droite plus soulevée que la gauche suggère le saut nécessaire à la bonne
réception de la balle que l’on suppose donc haute, le bras gauche lui permet de maintenir
un bon équilibre en l’air en vue du coup de raquette puissant évoqué par le bras droit
projeté.
De même, la rupture de la main droite et de la raquette témoigne d’une
observation rigoureuse du mouvement dans sa fluidité, de l’Instant.
Le personnage lui
faisant face, nommé Smith, semble désigner quelqu’un de sa raquette, ou peut-être
terminer un renvoi.
Il est alors clairement visible ici que la précision de la retranscription
d’un instant, inclus dans un tel tumulte, est bien signe d’un « regard photographique »
hors pair et rigoureux.
Il est ainsi indispensable de voir tout d’abord Jacques Henri LARTIGUE comme un
observateur confirmé de la réalité et de l’écoulement du temps.
En effet, il a rapidement
appris à saisir les différents instants comme fractions de ce dernier, et à les retranscrire
1
L’enchaînement indéfini des évènements de manière continue et infinie
2
En cela que voir signifie « percevoir par les yeux » et regarder « avoir en vue : considérer, envisager ».
2.
»
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