Gustave MOREAU : JUPITER ET SÉMÉLÉ
Publié le 30/06/2012
Extrait du document
Nous la percevons vite comme une victime de la passion - suggérée par le flamboiement des rayons rouges. Traitée sur le mode de la différence (contraste de la taille, des couleurs), elle est un personnage dissonant dans cet univers de la grandeur et de la transcendance.
«
Commentaire de l'image --------------
Ce tableau de G.
Moreau fascine d'emblée, tant par le flamboiement
qui
s'en dégage que par la tension dramatique de l'épisode mythologi
que qu'il évoque.
Le titre y fait allusion : Sémélé était aimée de Zeus.
Héra, jalouse, lui suggéra par ruse de demander à Zeus de lui apparaître
dans toute sa gloire :elle fut instantanément foudroyée.
Il sera intéressant
de voir comment Moreau parvient à transposer ce récit sur le plan visuel,
et de relever les éléments qui ont frappé sa sensibilité.
Enfin, nous nous
demanderons s'il n'y a pas lieu de chercher un message derrière l'appa
rence décorative de l'œuvre.
L'image
Cette image nous "saute" littéralement aux yeux par sa profusion.
Notre vision
se perd dans cet amoncellement qui abolit la perspective,
happée par le regard magnétique de Jupiter, et par la blancheur du corps
féminin, qui contraste avec le flamboiement des couleurs.
Mais
on sent
d'instinct que le peintre a accordé la plus grande importance au décor,
dont les multiples détails appellent notre attention -mais s'agit-il bien de
détails ? Leur minutie exécutive et le fini très méticuleux du tableau en
font douter.
L'artiste a accordé le plus grand soin à ce cadre à la fois my
thique, minéral et végétal.
Et ceci nous empêche de glisser trop hâtivement
sur l'image : après tout, un mythe s'inscrit dans l'immanence et pose la
question
de la durée.
Le peintre semble avoir cherché à nous faire nous ar
rêter devant
sa toile -au point que 1 'œuvre pourrait être inventoriée
comme un jeu d'observation.
On découvrirait alors une multitude de têtes
cachées ou serties dans le décor.
L'œuvre n'en finit pas de se déployer,
d'éblouir,
tant est fort l'éclat qui s'en dégage.
Le tableau scintille, les couleurs tirent une force accrue de leur juxta
position : la profondeur
du bleu est mise en valeur par l'intensité du rouge.
Cette utilisation hardie de la palette finit par exercer sur le contemplateur
un charme quasi hypnotique: éblouis, nous "rentrons" petit à petit dans la
toile, nous ressentons
d'une certaine manière l'éclat qui a pétrifié Sémélé.
La lumière fuse de toute part : de la profusion des ors et des gemmes, de
l'auréole maléfique qui couronne la tête de Jupiter, du feu de son regard.
La couleur participe au plus haut point à l'intensité dramatique de l'épi
sode ; G.
Moreau en fait un usage pour nous insolite, mais tout à fait en
prise sur le goût de l'époque, l'esprit "fin de siècle".
L'époque est à la recherche de sensations rares et dépaysantes.
Le ta
bleau
coupe avec la réalité, lui préfére un climat spirituel et surnaturel.
Il
64.
»
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