G.BRAQUE : L'HOMME À LA GUITARE
Publié le 30/06/2012
Extrait du document
Cela s'impose comme une évidence :voilà une image qui ne se laisse pas consommer, mais bien au contraire résiste. Austère par dans sa gamme chromatique, rigide par ses lignes - en quelque sorte sciemment rébarbative, elle ne cherche pas à plaire, à séduire, et récuse toutes les facilités, qu'il s'agisse de la narration ou des couleurs.
«
Commentaire de l'image--------------
Une œuvre telle que celle-ci arrête le spectateur.
..
mais peut-être par
le choc qu'elle produit sur lui plus que par une improbable adhésion spon
tanée.
Elle nous interpelle parce
que nous ne la "comprenons" pas, au sens
étymologique du terme
:nous ne la prenons pas avec nous, elle ne touche
pas immédiatement notre sensibilité, elle ne nous procure peut-être même
pas
ce plaisir esthétique qui est la condition première de toute affinité
avec une œuvre.
Celle-ci se présente plutôt à nous comme un défi.
Et c'est
pour le relever que nous avons le réflexe
de nous y arrêter.
Un tableau avant tout déconcertant
La première réaction du spectateur devant ce tableau, c'est une hési
tation
...
a fortiori s'il se trouve devant sa reproduction en carte postale :
comment faut-ilia tourner, l'orienter- dans quel sens se présente
l'œuvre?
C'est bien de fait le problème du SENS"CJui se pose prioritairement,
celui
d'une interprétation qui ne va nullement de soi, même si l'on pres
sent
que l'œuvre possède encore un arrière-plan figuratif et narratif.
Elle ré
siste, ne se soumet pas aux schémas rationalistes ou logiques.
D'où cette ré
action bien compréhensible de rejet, correspondant à une stratégie d'évi
tement.
L'image nous gêne (et gênait bien davantage encore ses contem
porains) parce que nous ne savons comment assembler,
coudre nos im
pressions ; parce que nous ne parvenons pas à en avoir une approche glo
bale et synthétique.
Ce que nous percevons d'abord, c'est un effet de chaos
provoqué par l'assemblage a priori hétéroclite
de formes géométriques.
Dans cet univers des formes, nous perdons nos points
de repères -et ceci
est
accentué par le traitement chromatique de l'image, qui se décline en
un camaïeu de couleurs brunes assez chaleureuses, contrastant avec la
froideur anguleuse des lignes.
Le spectateur désemparé cherche alors à maîtriser cette image qui lui
fait perdre pied :
il va s'employer activement à retrouver la cohérence de
l'œuvre, et pour l'investir va avoir recours au titre, avec l'espoir d'y trouver
une clé.
De fait, celui-ci est strictement informatif et référentiel :"L'homme
à la guitare".
Nous revenons alors à l'image pour y chercher des éléments
de la représentation.
Et c'est par décalage avec les formes cubiques que se
découvre à cet instant la guitare, dont les différents aplats de couleurs bri
sent l'unité
de la forme et rendent encore plus difficile la reconnaissance ;
néanmoins, ses contours sinueux
se dégagent bientôt du beau milieu de
l'image.
La guitare est traitée, contrairement à ce qu'on aurait pu imaginer,
avec une minutie descriptive qui contraste avec la vaporisation volontaire
172.
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