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Enguerrand Quarton : LA PIETÀ D'AVIGNON

Publié le 14/09/2014

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Enguerrand Quarton et l'école d'Avignon

À la fin du Moyen Âge, la région qui correspond au sud de la France actuelle — le Comtat-Venaissin, la Provence — constitue un foyer culturellement très actif.

Elle bénéficie entre 1309 et 1376 de la présence des papes en Avignon, qui attirent auprès d'eux des créateurs italiens, poètes comme Pétrarque, peintres comme Simone Martini ou Matte° Giovanetti. Puis, entre 1420 et 1450, à Aix, elle profite de l'élan donné par un prince amou­reux des arts, le comte de Provence et roi de Naples René d'Anjou.

Enguerrand Quarton (ou Charreton), quant à lui, travaille en Avignon peu après 1450. Il est origi­naire du nord de la France — du diocèse de Laon, exactement —, mais on le trouve fixé en Provence à partir de 1444 et à Avignon particu­lièrement en 1447. Outre quelques enluminures, les oeuvres que nous conservons de lui sont des pein­tures sur bois : la Vierge de miséri­corde du musée Condé, à Chantilly, le Couronnement de /a Vierge, au musée de l'Flospice, à Villeneuve-lès-Avignon, et la Pietà du Louvre. Ces oeuvres mêlent la tradition fla­mande d'un Van Eyck et les innova­tions plastiques de l'art du xv° siècle italien. Elles font de l'art de Quarton, dont on n'entend plus parier à partir de 1466, un maître puissant et origi­nal, dont les oeuvres tranchent sur la production de l'époque.

« Le triomphe de la foi Les longues mains de Jean de Montagnac , joint es en un geste de prière, renvoient à celles de Marie, unies elles auss i et aux doigts également effilés.

Le peintre étab lit ainsi un lien spiri tuel entre le donateur rec ueilli et la Mère du Christ.

Or, l'attitude qu'il a choisi de donner à la Vie rge est très nouvelle en ce milieu du XV' siè cle.

Alors que l es contempor ains d 'Enguerrand Quarton , tel Rogier Van der Weyde n en Flandre , peign ent dans leurs Pietà des Vi erge éperdues de douleur, se crampo n ­ nan t au corps du Christ et refusant de l'aban ­ donner au tombeau, le maître français ima ­ gine une Mère pleine de réserve dans l'expression de sa peine.

Certes , la douleur de Marie est claireme nt évoquée.

Tout autour du tableau , sur la bor­ dure d'o r, une inscripti on gravée en pointillé reproduit cette Lamentation de Jérémie : • O vos 011mes qui transitis p er viam attendite et videte si est do/or sicut meus • - «Ô vou s to us qui pas­ sez par ce chemin, regardez et voyez s'il est douleur pareille à la mienne. • Cette inscrip ­ tion se rapp orte claire ment n on au C hrist lui­ même , quelle que soi t la souff rance qu'il ait endurée, mais à la Vierge.

Car le nimbe qui entou re le visage d e Marie porte, ent re l es lettres gravées qui la désignent (Virgo Mater) , le dessin en repoussé de fleurs et de feuilles d 'ortie, symbole de peine cruelle.

Mais la V ie r ge a ch oisi d e dominer sa douleur.

Son visage aus tère et noble de vieille reli­ gieuse est livide et des rides profondes signa­ lent sa détresse, mais la b o uch e fermée ne laisse sor tir aucun cri.

Le corps s'affa isse un peu sous l'effet de la fatigue et de la peine - et aussi pour prolonger l a ligne formée par la chute des jambes du Ch rist -, mais les main s jointe s se dressent avec une vertic alité qui est le fruit d'une volonté.

La douleur trop humai ne de la Mère s'e ffa ce au profit de l 'acceptation du sacrifice du Chris t pour le salut des hommes.

P einte sur un panneau de bo is de 163 cm de haut sur 218 cm de large , la Pietà , conservée jusqu'au x1x • siècle dan s une ég lise de Villeneuve -lè s-Avignon, fut transf é­ rée en 1872 au musée de !' Ho spice , dans cette ville.

Révélé e au public pari sien en 1904 , lors de !'Exposition des primi ­ tifs français , elle fut achetée, un an plus tard, par le mu sée du Louvre .

L 'œ uvre n'est mentionnée dans aucun document ancien, elle n'est ni signée ni datée .

Très tôt, des argu­ ment s stylistiques l'ont fait attribuer à un peintre travaillant en Provence au milieu ou dan s le troisi ème quart du xv- siècle.

De no s jour s, le nom d'Enguerrand Quarton est avancé de façon presque certaine pour l'auteur de cette œuvre , tandis que l'identification présu mée du dona ­ teur permet de fixer la date d'exé cu­ tion avant 1457 .. »

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