David Olère: l'univers concentrationnaire
Publié le 12/02/2022
Extrait du document
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David Olère ( 1902-1985 ) est un peintre et sculpteur juif polonais naturalisé français en 1937 qui fut
déporté à Auschwitz en 1943.
Rescapé du Sonderkommando du camp d'Auschwitz-Birkenau, David
Olère a décrit l'horreur de l'extermination dans ses dessins et ses peintures.
Les Inaptes au travail est
une huile sur toile de sa création réalisée après 1945 et conservée au mémorial de l’héritage juif à New
York.
Ayant quitté l’enfer concentrationnaire Olère ne se contente plus de simples crayonnés et tente
immédiatement de représenter symboliquement l’expérience des camps de la mort.
Son œuvre
constitue ainsi un des premiers et rares témoignages visuels de la Shoah.
Le tableau représente une
famille de juifs (2 femmes, 1 jeune fille, 2 petits garçons et un bébé) qui, arrivée très probablement dans
le camp d’Auschwitz-Birkenau, passe l’étape de la « Sélection » et s’apprête à être éliminer.
Olère tente
ici de rendre compte à la fois de son expérience subjective, il a vu ce qu’il peint, et de la mémoire de la
Shoah via une représentation quasi-eschatologique de ces évènements.
Comment, en tentant de représenter l’»irreprésentable" réalité de la Shoah, David Olère contribue-t-il à
la construction de la mémoire de ce génocide ?
Autrement, comment ce tableau tente-t-il de faire apparaître à l’esprit du spectateur dès la sortie de la
seconde guerre mondiale la mémoire traumatique des victimes de l’extermination programmée et
systématique des juifs européens par le régime nazi de 1941 à 1945 ?
Pour le comprendre nous verrons dans un premier temps comment Olère représente avec réalisme
l’univers concentrationnaire pour ensuite saisir comment le symbolisme du tableau tente de rendre
compte de l’horreur de la Shoah.
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Le tableau de David Olère, survivant des Sonderkommando d’Auschwitz-Birkenau et donc témoin
visuel de premier plan de la Shoah, décrit à l'aide de nombreux éléments la réalité historique de l'univers
concentrationnaire.
Tout d’abord, de nombreux détails ou éléments de décors nous permettent de déduire que le tableau
prend place dans un camp de concentration et de mise à mort nazi.
En apercevant d’emblée l’étoile
jaune attachée au torse de la vieille femme du premier plan nous comprenons la situation.
Le port de
cet insigne est en effet imposé aux juifs dès 1939 par les nazis afin de faciliter leur reconnaissance et
leur déportation vers les camps.
Construits à partir de 1933 ( Dachau ) pour ceux de concentration et
de l’été 1941 pour ceux de mise à mort les camps nazis se caractérisent par des éléments retrouvables
sur le tableau notamment par les barbelés dans la gauche de l’arrière-plan ou la tour de guet dans
l’arrière-plan droit.
Ces éléments montrent la dimension carcérale des camps et la réduction à néant
de la liberté des juifs qui y sont enfermés.
Au loin peuvent-être aperçues des cheminées de fours
crématoires, ces fours où les cadavres gazés des juifs étaient brûlés dans le cadre de la « solution
finale de la question juive » formulée par Heydrich le 20 janvier 1942 à la conférence de Wansee.
Enfin
la signature de l’artiste complétée de son numéro d’identification rappelle précisément le contexte
historique du tableau.
Ces éléments constituent alors une vision détaillée et précise historiquement de
l’univers concentrationnaire.
Ce cadre posé, Olère décrit l’objet principal de son tableau, le sort des « Inaptes au travail ».
Cette
périphrase désigne en réalité la situation des juifs qui, à peine arrivés au camp d’Auschwitz-Birkenau,
ne passaient pas l’étape de la sélection médicale c’est-à-dire la séparation des valides (pour le travail)
des invalides (femmes, enfants, personnes âgées) par un médecin SS.
Ces invalides sont les « inaptes
au travail » et désignent donc les 6 personnages du premier plan qui portent encore leurs vêtements
et leurs affaires personnelles.
Primo Levi dans Si c’est un homme témoigne de cette séparation subite.
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