Arts et Culture SALVADOR DALI
Publié le 01/02/2019
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autant à son personnage que ses œuvres. Que l’on en soit amusé ou irrité, que l’on trouve cela original ou simplement déplorable, les extravagances de Dali sont désormais entrées dans la légende. Certains regrettent pourtant que Dali ait déployé autant d’efforts pour soigner son image de provocateur que son œuvre elle-même, ce qui lui a porté ombrage auprès d’une partie de l’opinion publique. On lui reproche en particulier d’avoir proclamé à maintes reprises son amour de l’argent et du succès.
Un artiste polyvalent
En dehors de la peinture, qui est sa principale activité, et du cinéma, où il s’est illustré avec éclat au début de sa carrière, Dalf a également d’autres activités aussi nombreuses que différentes. Il crée ainsi des sculptures, des assemblages, des gravures ainsi que des bijoux. Ainsi le 17 janvier 1938, lors d’une exposition surréaliste internationale, Dalf expose une installation intitulée Taxi pluvieux. 11 s’agit d’une voiture ancienne dans laquelle l’artiste a disposé deux mannequins. À l’avant, un chauffeur à tête de requin et, à l’arrière, une femme blonde en tenue de soirée assise au milieu d’endives et de laitues. Le tout est surmonté d’un système de tuyaux qui fait tomber une pluie abondante sur l’automobile.
Ses bijoux sont eux aussi d’inspiration surréaliste, et souvent si disproportionnés qu’on peutdiffi-cilement les porter. Il crée ainsi une pièce intitulée Éléphant à pattes d’araignée et une autre Œil du temps. Il s’agit d’une montre inscrite au milieu d’une pupille constituée de diamants et d’où s’échappe une larme. Il trace également les plans de Boucles d’oreille-téléphone, un symbole où il réunit les concepts d’écoute et de parole. Sa col-
Dans Le Rêve, peint en 1931,
Dali s’est plu une fois de plus à représenter une partie du corps humain déformée et même mutilée. À l'arrière-plan droit, on aperçoit plusieurs petits personnages. Grâce à ce sens aigu du détail, on peut admirer les toiles de ce peintre et y découvrir à chaque fois des éléments qui nous avaient échappé.
Cette œuvre, datant de 1935, porte deux titres différents, Portrait de Gala ou L'Angélus de Gala. Dali y a représenté sa femme à la fois de dos et de face devant un mur où est suspendu une variation sur L’Angélus de Millet. Ce tableau a en effet obsédé cet artiste tout au long de sa vie et se retrouve dans plusieurs de ses peintures.
lection, dont les pièces ont été réalisées par un bijoutier new-yorkais, a été rachetée en 1958 par la fondation américaine Owen Cheatham, où elle est toujours exposée.
Le culte de la personnalité
Dali a également rédigé de nombreux ouvrages, où il expose entre autres ses théories sur la création. Parmi ses nombreux livres, on peut citer La Femme visible (1930), La Vie secrète de Salvador Dalf (1942), Les Cocus du vieil art moderne (1956), Journal d’un génie (1968) ou encore Hommage à Meissonier.
Tout au long de sa vie, Dalf a démontré à maintes reprises son manque flagrant de modestie, sa mégalomanie et sa tendance à l’autoglorifi-
▼ Cavalier romain en Espagne, réalisé en 1954, fait partie des quelques centaines de dessins exécutés par Salvador Dali, qui sont assez méconnus du grand public, malgré leur valeur artistique et technique indéniable.
Lauros-Giraudon © Demart pro arte B.V. A.D.A.G.P., Paris 1996
cation. Lors de sa soixante-dixième année, il atteint le point culminant de l’orgueil en ouvrant un musée qu’il a lui-même créé pour abriter ses œuvres. Il l’installe à Figueras, son village natal, et le qualifie de «musée sanctuaire». Lors de l’inauguration, il est juché sur un trône doré où il reçoit la médaille d’or de Figueras des mains de son maire, tandis que Gala, sa femme et égérie, est couverte de fleurs. Durant son discours, aussi irrationnel qu’à l’accoutumée, il déclare: «Je veux que ce musée soit le centre spirituel de l’Europe !» Comme le disait André Breton, qui était très loin d’être tendre avec le peintre, «Dali a décidément l’art de se mettre lui-même en scène».
A l’intérieur de ce musée se trouve tout un enchevêtrement de meubles et de décors baroques, des illusions d’optique, plusieurs fresques dont une où Gala et lui-même s’élèvent dans le ciel ainsi que certaines de ses œuvres surréalistes. Dans la cour, le peintre a installé son Taxi pluvieux, où l’on doit glisser une pièce de 50 pesetas pour voir la pluie tomber.
L’appât du gain
En effet, Dalf chérit deux choses par-dessus tout : la provocation et l’argent. André Breton l’avait d’ailleurs affublé d’un surnom qui ne l’a jamais quitté : «Avida Dollars», qui non seulement traduit bien la cupidité du personnage mais est également l’anagramme de son véritable nom. On peut dire que son vœu le plus cher a été entièrement exaucé. Lui qui a vendu sa première toile (une nature morte avec trois citrons) à l’âge de six ans pour cinq cent pesetas, a réussi à devenir «criminellement riche», comme il aimait à le dire lui-même. Son héritage, qui a été entièrement légué à l’État espagnol à sa mort en 1989, est estimé à 853 millions de francs et comprend environ 700 œuvres, dont seulement 250 sont signées.
Il est également unanimement reconnu dans le monde entier comme l’un des peintres les plus importants et les plus novateurs du xxe siècle.
«
Salvador
Dali
l'œuvre de deux psychanalystes, Sigmund Freud
(1856-1939) et Jacques Lacan (1901-1981), qu'il
a d'ailleurs l'occasion de rencontrer respective
ment en 1932 et en 1938.
Pour ce peintre, la
méthode paranoïaque critique est «basée sur l'ob
jectivisation critique et systématique des associa
tions et interprétations délirantes>>.
Il expose
notamment ses conceptions dans un livre,
Conquête de l'irrationnel, paru en 1935.
Ses toiles
Six Apparitions de Lénine sur un piano, datant de
1931, ou Banlieue de la ville paranoïaque- critique;
après-midi sur la lisière de l'histoire européenne en
1936 font partie de cette recherche fondée sur le
subconscient et sur ses manifestations.
En 1955, il aura d'ailleurs l'occasion d'expli
quer en détail sa conception de la méthode para
noïaque critique lors d'une conférence qu'il tient
à la Sorbonne.
Il déclare avoir le don de la peintu
re depuis qu'il est bébé, époque à laquelle il pei
gnait sur les barreaux de son lit.
Mais déjà à ce
moment là, ses dessins relevaient du surréalisme ou
du fantastique.
Ainsi s'il prenait comme sujet
un chien, il le représentait avec des seins de
femme ou un visage humain.
Il précise ensuite
qu'il utilisait des crayons de couleur qui lui per
mettaient de restituer les couleurs vives de son
existence intra-utérine.
Pour lui, cette période de
sa vie avait une connotation paradisiaque.
Plus
tard, grâce à la lecture d'un livre traitant du trau
matisme lié à la naissance, il se remémorrera des
souvenirs, qu'il affirmera reconnaître comme
datant de sa vie fœtale.
La première époque créative de Dalf est
presque entièrement consacrée à la viscosité, aux
déformations et aux boursouflures des chairs
humaines ou des objets usuels.
Ainsi, une de ses
œuvres les plus connues du grand public se
nomme Montres molles.
Comme son titre l'in
dique, cette toile représente des montres défor-
� Cette œuvre,
Vénus et le marin,
date de 1925.
On peut
voir que Dali y est très
influencé par le
cubisme et n'a pas
encore trouvé son
propre style.
Sur cette toile, ......
Femme à la
fenêtre à Figueras, Dali
a pris pour décor son
village natal, auquel il
restera attaché toute
sa vie et où il mourra
en 1989, après y avoir
créé son musée.
' Dans Cygnes
reflétant des
éléphants, datant
de 1937, on peut
admirer toute l'habileté
technique et le sens du
détail qui caractérisent
l'œuvre de Dali.
mées
qui semblent liquides et non plus solides.
Elles coulent et symbolisent ainsi les heures
flasques de la vie.
La légende veut que Dalf ait
peint cette œuvre un soir de migraine après avoir
mangé un camembert bien fait.
Le fantastique
Le style de Dalf s'éloigne déjà depuis plusieurs
années de celui du surréalisme pour se rappro
cher de celui du fantastique.
Ce courant lui per
met d'exprimer ses doutes et ses craintes face au
monde dans lequel il vit.
Lointain héritier du
peintre hollandais Jérôme Bosch (v.
1450-1516),
qui est censé avoir préfiguré le surréalisme, il ne
se contente pas, loin de là, de donner libre cours
à une imagination qu'il a plus que florissante.
Il
fait également preuve d'une maîtrise technique
assez impressionnante ainsi que d'un sens très
aigu du détail notamment dans les ombres.
Bien
qu'extrêmement novateur et original, Dalf sait
également tirer profit des enseignements des
anciens artistes en ce qui concerne les tech
niques de dessin et de peinture.
En 1936, Dalf crée une de ses œuvres les plus
puissantes.
Comme toujours, son titre est énigma
tique : Construction molle avec haricots bouillis,
mais il est éclairé par son sous-titre: Prémonition
de la guerre civile.
Deux ans auparavant, Dalf avait
en effet dû fuir précipitamment Barcelone, où il
exposait, en raison de la violence qu'y faisait
régner des groupes armés.
Il exprime dans cette
toile toute l'angoisse et les peurs qu'il nourrit vis
à-vis d'événements devenus selon lui inévitables,
c'est-à-dire la guerre civile espagnole.
Sur cette
toile, les parties disloquées d'un corps humain
s'entre-déchirent sur fond de paysage désolé, sym
bolisant ainsi le conflit qui va éclater en Espagne
et diviser profondément le pays.
On peut également y voir la prémonition de la
Seconde Guerre mondiale qui va ensanglanter
trois ans plus tard le monde entier.
Dalf continue
à exprimer cette obsession notamment dans
Visages de la guerre, qui représente un visage.
»
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