ARCHITECTURE de 1920 à 1929 : Histoire
Publié le 01/01/2019
                             
                        
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                                Pavillons de la
MODERNITÉ
L'histoire architecturale des années vingt est marquée par la convergence des différents courants «modernes» dont les premiers soubresauts sont nés avec le siècle. Cette polarisation sur ce que l’on commence à nommer, vers 1925, le «style international» entraîne des chevauchements, des lignes de force et des phénomènes souterrains qui, selon l’aire géographique, auront pour canevas la subversion ou le crédit révolutionnaire. C’est peut-être à cause de cet enchevêtrement complexe de bannières européennes — tant politiques qu’esthétiques — que la décennie vingt se présente comme l’un des rares épisodes architecturaux où la hardiesse des projets et des réalisations semble «enterrer» les manières antérieures et poser une base commune pour l’invention individuelle.
L’«INTERLUDE» EXPRESSIONNISTE
EN EUROPE
Caractérisé par la pénurie des matériaux, la hausse des prix de la construction et la cherté des capitaux, l’immédiat après-guerre ne présente pas les conditions propices à une reconstruction planifiée et audacieuse. La priorité des politiques va alors à la gestion des carences et des deniers publics. Ce marasme de la profession conduit de nombreux architectes européens à une volte-face symbolique. En recourant au graphisme et aux prouesses techniques, ces «revanchards en sursis» explorent une voie nouvelle, quasi mystique, de communion avec l’environnement. Tous se réfèrent, de près ou de loin, aux réalisations «organiques» de Frank Lloyd Wright qui en appelle pour sa maison Millard («La Miniatura») à Pasadena, en Californie (1923), aux emblèmes mayas. La technique inédite du «textile block» permet à Wright d'obtenir des façades ajourées, des trames sur lesquelles grimpe une végétation luxuriante. Cette indifférenciation dans le traitement de l’intérieur et de l'extérieur marque une nouvelle étape dans sa dialectique poétique de l’espace. De même, sur le Vieux Continent, la démarche expressionniste se veut «une transposition intégrale d’une idée personnelle dans l’œuvre bâtie», ainsi que Ernst Ludwig Kirchner l'exigeait des arts plastiques. Aussi les frères Hans et Wassili Luckhardt optent-ils pour l'exubérance des formes libres. Leurs premiers projets — le Hygienemuseum à Dresde (1921) et l’immeuble de bureaux, Friedrichstrasse, à Berlin (1922) — sont résolument «pittoresques».
Dans la même veine se profilent les partisans de l’architecture fantastique avec Hans Poelzig qui refond en 1920 le cirque Schumann à Berlin et donne ainsi naissance à la Grosses Schauspielhaus, tandis que Erich Mendelsohn réalise avec la tour Einstein édifiée à Potsdam (en 1921 et inaugurée en 1924) un «sarcophage» de l’expressionnisme architectural, sculpture flamboyante en hommage à la grandeur des théories d'Einstein. Des créateurs allemands aussi illustres que Hans-Scharoun, Hugo Hâring ou Hermann Finsterlin et les bâtisseurs néerlandais du quartier sud d’Amsterdam - Michel De Klerk et Piet Kramer - se rallient alors à la démarche utopiste de Bruno Taut qui définit un édifice comme «un support immédiat de valeurs spirituelles, une matrice pour la sensibilité du grand public qui sommeille encore, mais qui bientôt s’éveillera. Seule une révolution totale dans le royaume spirituel peut créer ce bâtiment...»
L’expressionnisme fut longtemps regardé comme un mouvement dissident imputable à l'intransigeance des doctrines fonctionnalistes. Mais les critiques et historiens de l’architecture ont, récemment, révisé leur jugement: ce qui était naguère une aberration stylistique est aujourd’hui admis comme un jalon essentiel dans la longue maturation de la modernité. Outre-Rhin, en effet, les plus grands maîtres ont été, en quelque sorte, formés à l’école expressionniste de Ludwig Mies Van der Rohe au début de sa carrière jusqu'à Peter Bchrcns à son déclin. Mais dès l'exposition de la Sécession à Berlin, en 1923, la plupart de ces recherches individuelles évoluent vers un mode de construction plus pragmatique. Cette nouvelle donne entraîne, l’année suivante, la formation du Zehnering qui cherche à contrer les mesures réactionnaires de l’architecte de la ville de Berlin, Ludwig Hoffmann. En 1925, alors que le Zehnering devient Der Ring (l’anneau), les dissensions apparaissent fomentées, de part et d’autre, par un regain de radicalisme. La désillusion politique aura raison de l'expressionnisme. Le bénéficiaire de cet éclatement sera le jeune mouvement de la Neue Sachlichkeit (Nouvelle Objectivité) qui exacerbera l’engagement critique envers la société jusque-là latent dans le courant expressionniste.
Paris 1925 - Stuttgart 1927
L'Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes1 qui se tient d’avril à octobre 1925 à Paris mobilise pour longtemps un nouveau public autour du design, de la décoration intérieure et de l'architecture; elle permet, en outre, l'« exportation» d’une mode française lancée par Pierre Patout, Henri Sauvage, etc., auteurs de gigantesques «boîtes à bijoux». Depuis lors, l’usage commun qualifie abusivement de style « 1925» ou «Art déco» toute la production architecturale de la décennie. Ce mouvement, il est vrai, à la charnière de la tradition et de l’avant-garde, se définit par son syncrétisme assimilant les influences du cubisme, du futurisme, de l'expressionnisme et de bien d'autres mouvances... Or, par sa nature hybride, l'Exposition de 1925 devient le terrain d'une lutte idéologique faisant resurgir les démons vieux d’un siècle : l'artisanat opposé à l’industrie! Un second schisme, autrement plus sérieux, tient à l’attitude ambiguë adoptée par quelques architectes modernes :
 
                                «
                                                                                                                            ---------------------------------------	·-----
sionnisme  architectural,  sculpture flamboyante  en hommage  à la gran
deur  des théories  d'Einstein.
                                                            
                                                                                
                                                                     Des créateurs  allemands  aussi illustres 
que  Hans-Scharoun,  Hugo Haring  ou Hermann  Finsterlin et les  bâtis
seurs  néerlandais  du quartier  sud d'Amsterdam- Michel De Klerk  et 
Piet  Kramer  -se  rallient  alors à la  démarche  utopiste de Bruno Taut 
qui  définit  un édifice  comme  >.
                                                            
                                                                                
                                                                     Depuis lors, l'usage 
commun  qualifie abusivement  de style  «1925>>  ou «Art  déco»  toute la 
production  architecturale  de la décennie.
                                                            
                                                                                
                                                                     Ce mouvement,  il est  vrai,  à 
la  charnière  de la tradition  ·et  de  l'avant-garde,  se définit  par son 
syncrétisme  assimilant les influences  du cubisme,  du futurisme,  de 
l'expressionnisme  et de  bien  d'autres  mouvances  ...
                                                            
                                                                                
                                                                    Or,  par  sa  nature 
hybride,  l'Exposition  de 1925  devient  le terrain  d'une  lutte  idéolo
gique  faisant  resurgir  les démons  vieux d'un siècle  : l'artisanat  opposé 
à  l'industrie!  Un second  schisme,  autrement  plus sérieux,  tient à 
l'attitude  ambiguë adoptée par quelques  architectes  modernes : par 
un  compromis  regrettable,  certains  pavillons  respectent si bien  la mo
dération  prônée par les organisateurs  de l'Exposition  que  leurs au
teurs-courtisans  se retrouvent  bientôt sur le banc  des accusés.
                                                            
                                                                                
                                                                     Curieu
sement,  ce sera  le cas  d'Auguste  Perret.
                                                            
                                                                                
                                                                    Avec Notre-Dame  du Raincy 
(1922·1914)  la première  église moderne  de France,  il signe  pourtant 
,r;  c��a'  rcmMyuablc  sur l'emploi  du béton  armé.
                                                            
                                                                                
                                                                    Par sa maîtrise  du 
matériau,  Perret y renoue  avec le souffle  gothique,  !'«espace inef
fable>>  d'un lieu de culte,  sans déroger,  pour autant,  au parti  pris 
rationaliste.
                                                            
                                                                                
                                                                     Ce même  Perret  qui déclare  sans ambages    fâcheusement empreint de redon
dances  lyriques.
                                                            
                                                                                
                                                                     Cette structure  temporaire  met un terme  à la  pre
mière  partie  de la carrière  de Perret,  faite de lucidité  et de  raffine
ment.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Aux antipodes  de cette  gaucherie  rétrograde,  celui qui, en 
1908,  fut son  élève,  Le Corbusier,  illustre sa proposition  puriste à 
l'aide  d'une  syntaxe  normative  :  son pavillon  de l'Esprit  nouveau, 
fidèle  à l'éthique  machiniste,  est conçu  pour une  production  et un 
assemblage  en série.
                                                            
                                                                                
                                                                     Il est  meublé,  selon le canon  puriste,  de toiles  de 
Fernand  Léger et de  Le  Corbusier,  et d'objets-types  aux connotations, 
pêle-mêle,  folkloriques,  artisanales et industrielles.
                                                            
                                                                                
                                                                     I:ensemble tend 
vers  une rare  harmonie.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Adoptant  une fibre  plus progressiste  encore, Konstantin 
Melnikov  introduit une diagonale  et renverse  ainsi le volume  ortho
gonal,  tout en transparences,  de son  pavillon  de l'URSS,  résolument  « 
Agit-prop»,  construit  en madriers  standards.
                                                            
                                                                                
                                                                     À ce  jeu  d'initiatives 
où  conformité  et écart  rivalisent,  seul Robert  Mallet-Stevens  réussit à 
synthétiser  cette  modernité "1925», lui qui  n'en  est pourtant  pas 
reconnu  comme une figure  de proue!  Son pavillon  du Tourisme,  fruit 
d'une  étonnante  collaboration  -vitraux  de Louis  Barillet,  éclairage 
de  Pierre  Chareau,  mobilier de Francis  Jourdain,  sculpture de Jean  et 
Joël  Martel  -, fait  oublier  la double  fracture  art décoratif/art  indus
triel  et art  appliqué/architecture.
                                                            
                                                                                
                                                                     Influencé par le néo-plasticisme 
néerlandais,  le pavillon  du Tourisme  puise, tout en les  contrôlant,  ses 
détails  décoratifs  dans une dynamique  abstraite de l'architectonique.
                                                            
                                                                        
                                                                    
Mallet-Stevens remporte  de la  sorte  le trophée  de l'équilibre.
                                                            
                                                                                
                                                                    
La  France  -on  peut  le déplorer  -a gardé  peu de bâti
ments  témoins  de l'Art  déco;  les États-Unis  sont, en revanche,  dépo
sitaires  d'un beau  patrimoine  appelé, outre-Atlantique,  «moder
niste»,  qui  doit autant  à l'historicisme  d'avant-guerre,  à 
l'expressionnisme  allemand qu'à l'esprit  plus proprement  «mo
derne>>  ...
                                                            
                                                                                
                                                                    Ce  melting-pot  se  trouve concentré  au  .cœur de New  York 
avec  les grane-ciel  de McKenzie,  Yorhces, Guelin, Walker,  Yan Alen.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Schulze,  Weaver, etc.
                                                            
                                                                                
                                                                    
- En  1925,  il semble  que la modernité  n'est pas assez  «mûre» 
pour  rencontrer  le succès  escompté  à Paris.
                                                            
                                                                                
                                                                     Il Eui  faut  allendre  deux 
ans  pour  que,  sous les  auspices  du Deutsche  Werkbund,  elle fasse  la 
preuve  de sa riche  diversité  ...
                                                            
                                                                                
                                                                    Jusqu'à  la guerre,  l'évolution  du Werk
bund  était  inséparable  du travail  de Peter  Behrens  -classicisme, 
symbolisation  de l'autorité  du pouvoir  industriel,  etc.; mais,  à l'orée 
des  années  vingt, Behrens  rénove sa conception  du peuple  allemand 
et,  par  là même,  son art de construire,  découvrant  au-delà du néo
romantisme  nietszchéen des affinités  tantôt médiévales  ( encorbelle
ments,  verrières  cristallines)  tantôt wrightiennes  (son conservatoire  de 
verre,  1925).
                                                            
                                                                                
                                                                     Dès lors,  le Deutsche  Werkbund  se rapproche  du  fonc
tionnalisme  international  qui voit  son apothéose  à l'exposition  per
manente  qui s'ouvre  à Stuttgart  en 1927.
                                                            
                                                                                
                                                                     Le Werkbund  y mène  une 
politique  de création  et  finance  la construction  d'un nouveau  lotisse
ment,  la Weissenhofsiedlung.
                                                            
                                                                                
                                                                     Le triomphe  remporté  par l'exposition 
se  justifie  par sa nouveauté  et  sa cohérence.
                                                            
                                                                                
                                                                     I:organisateur,  Mies van 
der  Rohe,  rassemble  en 1926  un groupe  représentatif  d'architectes 
européens  pour dessiner  un complexe  de trente  et un  bâtiments  allant 
des  appartements  sociaux à des  maisons  en rangées.
                                                            
                                                                                
                                                                     Chez les Alle
mands,  les deux  générations  sont représentées  : Peter  Behrens  et 
Hans  Poelzig  pour les aînés;  Walter  Gropius,  Hans Scharoun,  Ludwig 
Hilberseimer,  Bruno Taut, Adolf  Radin  et, bien  entendu,  Mies pour 
les  plus  jeunes.
                                                            
                                                                                
                                                                     Le Corbusier  et son cousin  et associé Pierre  Jeanneret 
se sont  joints à eux,  de même  que les Néerlandais  Jacobus Johannes 
Pieter  Oud, Mart Stam et le  Belge  Victor  Bourgeois.
                                                            
                                                                                
                                                                     Une fois ache
vée,  la Weissenhofsiedlung  permet enfin d'identifier  l'architecture 
nouvelle  avec le logement  puisque auparavant  -exceptée  l'ingé
nieuse  cité Heuberg  (Vienne,  1920) pour les déshérités,  conçue par 
Adolf  Loos  - les plus  grandes  réussites  avaient été consacrées  aux 
édifices  publics,  au génie  civil ou aux  usines.
                                                            
                                                                                
                                                                     Par la démonstration  de 
sa  stupéfiante  unité stylistique  et de son  vocabulaire  élaboré, l'exposi
tion  de Stuttgart  encourage  les rencontres  internationales  autour de 
thèmes  prioritaires.
                                                            
                                                                                
                                                                     On entre  avec  fracas dans la phase  conceptuelle, 
pour  ne pa�  dire  académique.
                                                            
                                                                                
                                                                     de l'architecture  moderne.
                                                            
                                                                                
                                                                    
U NE  PLATE-FORME  TRIANGULAIRE 
I:air  du temps,  plus que jamais  pétri d'utopies,  semble in
suffler  une nouvelle  ferveur aux  défenseurs  de la modernité  dissémi
nés  entre  l'Atlantique  et l'Oural.
                                                            
                                                                                
                                                                     Partout naît une discussion  enflam
mée  qui s'articule  autour de deux  systèmes,  très  indirectement 
afférents  à l'architecture  : l'idéal  révolutionnaire  et le mythe  de la.
                                                                                                                    »
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