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Analyse du tableau de Le Greco: L'Enterrement du Comte d'Orgaz

Publié le 22/02/2012

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Le style original et insolite du Greco plonge ses racines dans la tradition des peintres d'icônes de l'Orient chrétien et dans la recherche des coloris intenses que le maître pratiqua pendant les années passées à Venise dans l'atelier de Titien alors très âgé. Toutefois, le style du Greco n'arrive à maturité qu'après son retour en Espagne, car sa peinure devient alors plus libre et plus spontanée. Les figures allongées et hallucinées seraient dues, suivant certaines interprétations, à un défaut de la vue du peintre. Toutefois, il est plus vraisemblable qu'elles soient liées au style affecté du maniérisme international. Les grandes compositions très dramatiques de Domenico Theotokopoulos ont généralement été interprétées comme la traduction efficace du sentiment religieux de l'Espagne de l'époque. Cette grande toile fut exécutée à Tolède ente 1586 et 1588 par Domenico Theotokopoulos, peintre crétois mieux connu sous le nom du Greco. Les oeuvres de cet artiste se caractérisent par un langage très personnel, qui puise dans le luminisme et la sensibilité chromatique de Titien et du Tintoret, mais qui se charge aussi de tonalités hallucinatoires particulièrement expressives dérivant probablement de sa connaissance des peintres de l'Europe du Nord.

« Parmi la foule des bienheureux, Le Greco a aussi représenté le roi d'Espagne Philippe II, reconnaissable à son visagedésormais vieilli, engoncé dans son jabot. L'événement miraculeux est ramené dans une dimension plus terrestre par la présence de nombreux spectateurs,portant des vêtements rigoureusement modernes, comme le comte d'Orgaz lui-même. Très probablement, Le Greco a représenté dans les visages de ces personnages des individus réels : l'homme à labarbe blanche figurant de profil sur la droite est sans doute l'homme de lettre Antonio de Covarrubias, ami duGreco ; tandis que dans l'homme sur la gauche, qui regarde vers le spectateur il faut peut-être reconnaître unautoportrait du peintre lui-même. Le commanditaire de ce grand tableau, Andrés Núñez, curé de l'église de Santo Tomé, serait par contre le prêtre quicélèbre le rite à droite du tableau. Le Greco a signé son tableau sur le mouchoir blanc qui sort de la poche du jeune garçon représenté à gauche. L'inscription porte aussi une date, 1578, qui ne correspond pas à l'époque où la toile a été exécutée, puisque celle-ci remonte à dix années plus tard.

Selon une opinion répandue, cette date serait celle de la naissance du fils dupeintre, Jorge Manuel, dont le jeune garçon serait alors le portrait.

Le tableau est nettement séparé en deux parties par la ligne horizontale tracée idéalement par les têtes et lesjabots des spectateurs.Cette ligne imaginaire sépare l'espace divin de la réalité terrestre. La position des figures du Christ et des saints dans la partie supérieure suit la forme de la toile. La troupe des bienheureux est disposée en demi-cercle, ce qui donne plus de profondeur à la scène. En bas du tableau, l'impression de profondeur est donnée par l'agencement des figures sur des plans parallèles. Le geste des deux saints qui déposent le corps dans le sépulcre laisse supposer l'existence d'un sarcophage encoreplus bas, en dehors du cadre, ce qui donne à l'image plus de force et de suggestion. La participation émotive du spectateur est sollicitée également par les regards du jeune garçon et ceux d'une desfigures du deuxième plan, sans doute Le Greco lui-même : en regardant vers nous, ils attirent notre attention sur lemiracle qui est en train de s'accomplir.

Ce tableau est marqué par le style visionnaire et incomparable du Greco, qui réalisa en Espagne de très nombreusesoeuvres ayant pour sujet la Vierge et les saints, dans lesquelles l'intense sentiment religieux semble transfigurer lesformes. L'utilisation de coloris acides et criards fut probablement suggérée au Greco par les oeuvres de Jacopo Bassano,admirées au cours de son séjour vénitien, en même temps que celles du Tintoret et du Titien. En revanche, les formes allongées et irréelles trouvent leur correspondance dans les modèles du maniérismeinternational qui prévalait en Europe vers le milieu du XVIe siècle. Ce tableau illustre entre autres le grand talent de portraitiste du Greco, qui réalisa de nombreuses toiles de cegenre, intenses et angoissantes.. »

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