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Pierre Bonnard

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Après avoir commencé des études de droit, Pierre Bonnard s’intéressa en même temps à la peinture en suivant à Paris les cours de l’Ecole des Beaux-Arts et de l’Académie Julian où il connut Sérusier, Denis, Vuillard, donnant naissance au cours de la dernière décennie du siècle au groupe des nabis. Prenant comme point de départ les œuvres de Gauguin, les nabis s’éloignent de l’impressionnisme pour élaborer une peinture plus méditative, au contenu symbolique, caractérisée par la composition de surfaces colorées plates et uniformes, avec des résultats semblables aux émaux. La volonté de faire entrer la beauté dans la vie quotidienne pousse Bonnard et les autres maîtres nabis à se consacrer aux arts appliqués, réalisant des affiches, du papier peint et des illustrations de livres. Des tableaux comme La Partie de croquet (1892, Musée d’Orsay, Paris), Les Grands Boulevards (1900, coll. privée, Londres) et La Passante (1894, coll. privée, Montreux) appartiennent à cette période. Au début du XXème siècle, Bonnard s’intéresse à nouveau à la peinture impressionniste et réalise ainsi des œuvres représentant des scènes d’intérieur, des portraits et des paysages ensoleillés comme La Scène (1908, coll. privée, Paris), Le mouvement de la rue (1905, coll. Phillips, Washington), Le portrait de Misia Godebska (1908, coll. Thyssen-Bornemisza, Madrid). Etranger aux rapides mutations de l’art français et européen de la première moitié du XXème siècle, le peintre vécut la dernière partie de sa vie dans le sud de la France, dans la chaleur des affections familiales et du monde familier que le maître continue à reproduire à travers ses tableaux (La Table, 1925, Tate Gallery, Londres ; Nu au miroir, 1933, Ca’ Pesaro, Venise).

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Les débuts de l’activité artistique de Pierre Bonnard sont liés au groupe des nabis, mot qui en hébreu signifie “prophètes” et qui met en évidence la composante mystique qui se trouve à la base du mouvement artistique. De Gauguin, les nabis reprennent la composition plate et uniforme et la volonté de conférer à l’art une haute valeur symbolique qui assume parfois des significations religieuses. Contre le caractère illusoire de la perspective, Bonnard et les autres maîtres du groupe élaborèrent des peintures bidimensionnelles, privées de clairs-obscurs, en n’utilisant souvent que des couleurs pures. Une source de grande importance pour l’élaboration de ce langage artistique fut également la connaissance de l’art japonais, diffusé à travers les estampes.
Au début du XXème siècle, Bonnard se tourne vers l’impressionnisme dont il tire une peinture plus mouvementée, faite de petites touches et d’études attentives de la lumière. Le peintre raconte son monde à travers des œuvres campagnardes ou d’intérieurs bourgeois où règnent la tranquillité et l’affection.

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Ce tableau, intitulé La toilette, ou encore Nu au miroir, fut exécuté par Pierre Bonnard en 1931. Cette œuvre amalgame deux des sujets favoris du peintre français, le nu féminin et les intérieurs domestiques. La peinture plaisante et gracieuse de Bonnard est le fruit d'une méditation tardive sur l'impressionnisme entreprise par l'artiste après qu’il eut abandonné la peinture en aplats, décorative et linéaire, des nabis, mouvement auquel Bonnard adhéra au début de son activité. Etranger aux avant-gardes et aux mouvements qui se succèdent en Europe au cours de la première moitié du siècle, Bonnard élabore des natures mortes, des paysages, des scènes d'intérieur dans un style joyeux et apaisant qu'il conserva pendant toute son activité.

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La femme, probablement son épouse Marthe, modèle préféré du peintre, est debout devant le miroir, tandis qu'elle tient en main une partie des vêtements qu'elle est sur le point d'enfiler.

Les chaussures qu'elle porte aux pieds donnent à la scène une coloration quotidienne et anti-académique.

Près du miroir, la table de toilette est encombrée d'objets : un cadre, quelques plateaux garnis de fruits qui se reflètent dans le miroir.

En bas à gauche on entrevoit une chaise encombrée de vêtements, tandis que de la fenêtre en retrait, voilée par un rideau coloré, filtre la chaude lumière du matin.

La peinture, dans laquelle prédominent les tonalités claires, est appliquée par petites touches de couleurs qui redessinent les formes, dépourvues de contours nets.

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On ne peut bien percevoir l'image qu'en la regardant à une certaine distance, tandis que dans une vision rapprochée, les objets se défont en nuances chromatiques et perdent de leur unité.

L'espace de la pièce est délimité par le miroir et la table de toilette, placés le long de deux diagonales qui reculent vers le fond.

La chaise, la femme et la table de toilette sont sur des plans parallèles, échelonnés en profondeur.

On relève une prédominance d'éléments verticaux, tels que le miroir, la figure de la femme debout, la fenêtre sur le fond, les dossiers des chaises, qui s'harmonisent avec le format rectangulaire de la toile.

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Les réminiscences de la peinture impressionniste sont évidentes si l’on compare ce tableau avec une des toiles de Claude Monet, par exemple.

La passion pour le nu crée des affinités entre Bonnard et un autre des artistes les plus connus du mouvement, Pierre Auguste Renoir, très proche également par la facture moelleuse et presque estompée.

Par contre, le goût décoratif marqué qui caractérise toute la peinture de Bonnard est à rattacher à ses années d’adhésion au mouvement des nabis, en compagnie d’Edouard Vuillard et de Paul Sérusier.


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