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Felice Casorati

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Né à Novarre en 1883, le peintre passa les dernières années de sa jeunesse en voyageant à travers l’Italie, en raison des nombreux déplacements de son père, militaire de carrière. S’étant approché du style de la Sécession viennoise, dans le sillage des sollicitations produites sur lui par les peintures de Gustav Klimt exposées en Italie en 1910-1911, l’artiste élabora durant la seconde décennie des œuvres caractérisées par un élégant chromatisme et par un style décoratif prononcé. Au cours de ces mêmes années, le peintre se rapprocha des artistes de Ca’ Pesaro à Venise et exposa à la Sécession romaine obtenant un succès considérable. Après son retour à Turin, à la fin de la guerre, Casorati s’orienta vers une reprise classique, basée sur la redécouverte de la peinture du début de la Renaissance, qui sollicita le retour à l’ordre de la peinture italienne contemporaine. C’est de cette époque que datent plusieurs de ses œuvres les plus célèbres comme Silvana Cenni (1922, coll. privée), Meriggio (1923, Museo Revoltella, Trieste), Œuf sur la commode (1920, coll. privée), ainsi que de nombreux portraits. Le succès du maître, soutenu par une prestigieuse élite de collectionneurs privés et par des institutions publiques, se concrétisa dans les salles personnelles organisées lors de nombreuses expositions italiennes et européennes, parmi lesquelles se distingue en particulier la Biennale de Venise de 1924. Devenu titulaire de la chaire de peinture de l’Accademia Albertina de Turin en 1941, le peintre fit alterner sa création prolifique de peintre, celle d’illustrateur, de décorateur, de sculpteur et ses travaux en mosaïques.

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La longue activité de Felice Casorati, caractérisée par un succès constant auprès du public et de la critique, est caractérisée par une évolution progressive du style du maître, sensible aux mutations de la peinture européenne de son époque. Parti d’une peinture décorative et caractérisée par des élégances linéaires de style sécessionniste, le peintre doit surtout sa popularité auprès du grand public au classicisme et à son style néo-Renaissance qui distinguent les œuvres de l’après-guerre. Casorati s’inspire en effet de Piero della Francesca et de Mantegna qui lui font rationaliser l’espace et auxquels il emprunte une luminosité douce et diffuse et des figures construites avec des volumes à la fois solides et doux et marquées par une beauté idéalisante. Par la suite, le peintre tend vers une peinture plus souple, caractérisée par une sensibilité chromatique plus accentuée, influencée par les premiers travaux de Picasso. Toujours fidèle à l’art figuratif et aux divisions spatiales rigoureuses, au cours des vingt dernières années Casorati se concentre surtout sur les natures mortes et les figures qui laissent transparaître, dans leur style décoratif, quelques éléments de l’art abstrait.

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Ce tableau, exécuté en 1950, appartient à la production tardive de Felice Casorati, un des peintres italiens les plus connus de ce siècle. La longue activité de l’artiste, qui évolue entre la récupération de la peinture de la Renaissance italienne, l’intérêt pour la peinture de Cézanne et les suggestions des artistes européens contemporains, se distingue par la recherche constante de sobriété formelle et de rigueur classique, qui valurent constamment à Casorati l’appréciation des critiques d’art et des collectionneurs. La nature morte de la Galerie d’Art Moderne de Florence remporta en 1950 le prix du Fiorino (Florin), prestigieux concours florentin.

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La nature morte est un des sujets favoris de Casorati, qui préférait représenter des formes statiques, non sujettes à transformations. Les fruits posés sur la table sont des citrons, que l’artiste a introduits plus d’une fois dans ses natures mortes, car il en appréciait le modelé bien défini et la forme épurée.

Au lieu de reposer directement sur la table, les citrons sont placés sur des feuilles de papier rigide de différentes couleurs, disposées dans le désordre.

Les accents réalistes des plus anciennes natures mortes de Casorati disparaissent, et les objets sont réduits à des formes épurées et simplifiées, comme le montre le tiroir ouvert auquel manque la poignée. 

Chaque forme est cernée par un contour noir très marqué, qui contribue à la simplifier davantage.

La solidité des volumes est traduite par la lumière qui projette les ombres des citrons sur la table et qui répartit les clairs-obscurs.

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Tous les objets, la table, les feuilles de papier et les citrons sont représentés en fonction de la perspective inversée chère à Cézanne, qui donne l’impression que tout est en train de glisser vers le bas.

Le peintre suppose un point de vue légèrement décalé vers la gauche, ce qui lui permet de représenter la table en perspective.

Telles des plaques de métal, les feuilles sont superposées et se différencient par leurs couleurs et par leurs angles saillants. 

Les corps sont réduits à de simples formes géométriques : rectangles, trapèzes, parallélépipèdes et sphères.

Les droites et les angles produits par les feuilles de couleur sont compensés par le contour circulaire des citrons.

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Le genre de la nature morte reste encore un des sujets préférés des artistes contemporains, comme le démontrent, outre les toiles de Morandi, de nombreux tableaux de Matisse, de Picasso, pour ne citer que quelques-uns des plus célèbres artistes de ce siècle.

En même temps, le choix de ce sujet atteste la récupération de la tradition figurative de la renaissance amorcée par Casorati au début du siècle, lorsqu’il redécouvre la beauté formelle et la perfection de l’art de Piero Della Francesca.

L’agencement de l’espace mis en œuvre par Casorati dans le tableau de la Galerie d’Art Moderne dénote toutefois l’attention particulière qu’il accorde aux œuvres de Paul Cézanne qu’il avait admirées à la Biennale de Venise en 1920.

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