Cybèle
Le culte de la Déesse Mère est un des plus anciens connus dans le bassin de la mer Égée. Qu’il s’agisse de la déesse crétoise de la fécondité, qu’il s’agisse de la Grande Mère honorée en Phrygie, ces divinités allaient par la suite se confondre avec la déesse grecque Rhéa, épouse de Cronos, mère de Zeus et des grands dieux de l’OIympe.
La Déesse Mère ou Mère des dieux ou Grande Mère est adorée en Asie Mineure sous le vocable de Cybèle. Son culte, célébré surtout sur les hauteurs (mont Ida, mont Bérécynthe...) a pour centre la ville sainte de Pessinonte. Elle est (étymologiquement) la déesse des cavernes, c'est-à-dire de la terre ; sa puissance s’étend à toute la nature.
Sa légende lui associe le jeune berger Attis, dont on fait tantôt son compagnon, tantôt son amant tragique. On unit également Cybèle au roi de Phrygie Gordias — l’inventeur du fameux « nœud gordien » que dut trancher Alexandre — et elle en aurait eu un fils, Midas, à qui l’on doit l’institution en Phrygie des mystères de Cybèle.
La Grande Déesse fut, à l’origine, tant en Crète qu’en Asie Mineure, honorée sous l’aspect d’une pierre sacrée. Pendant la deuxième guerre punique, les Romains obtinrent que la « pierre noire » de Pessinonte (une météorite) fût transportée à Rome afin de conjurer le péril carthaginois: un temple fut édifié pour l’abriter, sur le Palatin.
Répandu dans tout le monde méditerranéen, c’est à Rome et surtout sous l’Empire que le culte de la Mère des dieux allait être le plus florissant: mère de Jupiter, Cybèle partage avec lui la domination du monde: ciel, mer, terre et sous-sol, hommes, animaux et plantes. Chaque année au retour du printemps, une série de fêtes lui sont consacrées, comprenant des rites de pénitence et de mortification (flagellation, incisions sanglantes allant chez les fanatiques jusqu’à la mutilation) et la reproduction des épisodes de la légende d’Attis, sa mort et sa résurrection. Souvenir des Curètes, génies guerriers qui dansaient en Crète autour de la Mère des dieux, une confrérie de fidèles, les Corybantes, exécutent au cours des cérémonies des danses sacrées.
En dehors de ces solennités, le culte de Cybèle et d’Attis donne lieu à une initiation et à des mystères de caractère oriental: baptême de purification par l’eau et de régénération par le sang (d’un bélier ou d’un taureau sacrifié), communion au pain d’immortalité et au vin consacré, confirmation par imposition du fer rouge.
Le clergé, formé à l’origine d’eunuques venus de Phrygie, les « galles », s’organise sous l’Empire en un collège hiérarchisé des deux sexes, dont l’empereur lui-même occupe le sommet.
« La Bérécynthienne » (ainsi l’appelle Du Bellay dans un sonnet célèbre des Antiquités de Rome) est représentée comme une femme couronnée de tours, conduite sur un char par des lions, ou assise sur un trône entre deux lions.