Aphrodite
Aphrodite
Aphrodite est une divinité de caractère oriental, rappelant l'Astarté phénicienne, et dont le culte fut vraisemblablement introduit en Grèce par les Phéniciens à partir de leurs comptoirs, dont l'un était l'île de Cythère, proche du Péloponnèse.
• La déesse de la beauté
Laissant broder leur imagination sur le nom, d'origine asiatique, de la déesse, qui pour eux évoquait le mot aphros (l'écume), les Grecs créèrent la légende d'Aphrodite née de l'écume des flots, après la mutilation d'Ouranos. Zéphyr, le vent embaumé qui souffle de l'ouest, l'aperçut alors qu'elle sortait de l'onde (anadyomène), non loin des côtes de Palestine. (Elle aurait ainsi donné à l'antique ville de Jaffa son nom hébreu, Yafo, qui signifie : la Beauté.) Jamais on n'avait observé beauté plus éclatante: sa peau était d'une blancheur de lait, ses cheveux était d'or, ses yeux étincelaient, ses formes étaient parfaitement harmonieuses, elle dégageait d'elle-même un parfum de fleur.
Zéphyr la recueillit dans une conque de nacre et la transporta jusque dans l'île de Chypre. Là, il la remit entre les mains des Hores, les Saisons bienfaisantes, qui l'instruisirent, puis la parèrent d'atours précieux et de bijoux pour la conduire chez les immortels. Quand elle parut dans l'Olympe, les dieux, transportés d'admiration, la proclamèrent déesse de la beauté et de l'amour. La puissance d'Aphrodite allait se manifester dans l'univers tout entier. Sa souveraineté est attestée aussi bien dans le ciel que sur la mer, sur les plantes et sur les animaux que sur les hommes et sur les dieux. Certes, les autres déesses ne virent pas sans aigreur l'émerveillement subjugué des dieux et des hommes (encore qu'Héra n'eut jamais scrupule, lorsqu'elle voulait reconquérir les faveurs de son volage époux, à emprunter à Aphrodite sa ceinture brodée d'or, dotée, disait-on, d'un irrésistible pouvoir). Elles saisirent un jour l'occasion de lui disputer sa couronne. Lors du banquet de noces de Thétis et Pélée auquel les dieux avaient été priés, la Discorde, Éris, lança parmi les convives une pomme , sur laquelle figurait l'inscription : « À la plus belle ». Héra et Athéna s'opposèrent aussitôt à Aphrodite, chacune revendiquant la pomme et le titre. Zeus les convainquit de s'en remettre à l'appréciation d'un mortel et l'on élut comme juge le Troyen Pâris, fils du roi Priam. Hermès conduisit les trois déesses jusqu'à lui, alors qu'il gardait ses troupeaux sur le mont Ida, en Phrygie. Héra fit valoir son altière beauté et offrit à Pâris l'empire de l'Asie ; Athéna, dotée d'une beauté sévère, assura l'invincibilité au prince troyen ; Aphrodite ôta les agrafes qui retenaient sa tunique, dénoua sa ceinture et promit à Pâris l'amour de la plus belle femme du monde. On sait quel fut le jugement Pâris : Aphrodite reçut la pomme et le Troyen, en récompense, devait séduire la belle Hélène, épouse du roi de Sparte Ménélas. C'est l'origine de la guerre de Troie, effroyable carnage auquel Héra et Athéna eurent à cœur, pour venger leur dépit, de participer en personne aux côtés des Grecs. Quant à Aphrodite, elle combattit dans le camp troyen — sauvant notamment Pâris au cours d'un combat singulier contre Ménélas —, avec d'autant plus de motifs que parmi les guerriers de Troie se trouvait Énée, son propre fils.
• La déesse de l'amour
Car la déesse inspiratrice de l’amour n'était pas pour sa part invulnérable. Ainsi, la beauté « digne des dieux» du Troyen Anchise l’avait fascinée et elle lui donna un fils, lequel, après la chute de Troie, devait perpétuer sa race et sa patrie en les transférant en Italie, dans le Latium, où ses descendants allaient fonder Rome. La première passion d’Aphrodite semble avoir été inspirée par le jeune Syrien Adonis, dont elle pleura amèrement la mort tragique. Plus tard, elle enleva Phaéton, fils d’Eôs, et fit de lui le gardien nocturne de son sanctuaire. Elle aima également Cinyras, roi de Chypre, et lui conféra opulence et longévité. Les caprices d’Aphrodite n’épargnaient pas l’Olympe. Alors que tous les dieux s’étaient sentis frappés du coup de foudre dès son apparition, c’est le plus disgracié d’entre eux, Héphaïstos, qui l’avait obtenue en mariage. Bien entendu, Aphrodite ne fut pas en peine pour trouver, sur place, des dédommagements : elle a séduit Hermès, qui lui a donné un fils, nommé de leurs deux noms réunis : Hermaphrodite; elle est surtout la compagne adultère d’Arès, dieu de la guerre, dont elle a de nombreux enfants, parmi lesquels la légende la plus courante fait figurer Érôs, malicieux perturbateur du cœur des dieux et des hommes. Ainsi, c’est bien en connaissance de cause qu’Aphrodite s’emploie à susciter chez les hommes et les dieux le désir amoureux, parfois jusqu’à la folie. C’est elle qui jettera un criminel égarement dans l’esprit d’Hélène pour qu’elle abandonne son foyer, dans celui de Médée et d’Ariane, pour qu’elles trahissent leur père, dans celui de Phèdre, pour qu’elle brûle d’une flamme incestueuse, pour ne rien dire de Pasiphaé, qui cédera à un monstrueux accouplement. C’est Aphrodite qui se vengera d’un hommage insuffisant, en condamnant Léda et toute sa descendance à des passions sanglantes. Elle n’en témoigne pas moins sa bienveillance à ceux qui la vénèrent: c’est ainsi qu’elle octroya jeunesse et séduction au matelot Phaon, lequel inspira de l’amour à la poétesse Sapho, ou qu’elle donna vie à la statue d’ivoire sculptée par son zélateur, Pygmalion, roi de Chypre.
• Le cortège d'Aphrodite
Aphrodite, également appelée Cypris (la Chypriote, le centre principal de son culte étant à Paphos, dans l’île de Chypre, ancienne colonie phénicienne) ou Cythérée (du nom de l'île de Cythère, où elle se plaisait à résider : on connaît le célèbre Embarquement pour Cythère, pays des amours), est accompagnée d'un cortège de serviteurs et de servantes qui incarnent les plaisirs et la grâce du monde. Parmi eux, les Charites ont une personnalité et des attributions précises : elles ont mission de veiller à la toilette de la déesse et aussi de faire régner le charme et la joie autour d'elles.
Aphrodite a été, à l'origine, représentée vêtue d'un long chiton et d'un voile, puis on la montrera à demi dénudée, pour ne plus la figurer, à partir de Scopas et de Praxitèle (ive siècle avait J.-C.), qu'intégralement nue. Elle est souvent entourée, par les artistes (les milliers d'artistes qu'elle a inspirés, les Botticelli, les Titien, les Vélasquez, les Rubens, etc.), de ses fleurs de prédilection, la rose et le myrte, ainsi que de colombes, ses oiseaux favoris, qu'elle attelle à son char léger.