XXV CE QUE PEUT LA FORTUNE DANS LES CHOSES HUMAINES, ET COMMENT ON
Publié le 01/10/2013
Extrait du document
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serait si dommageable.
Il en est de même de la fortune, qui
manifeste sa puissance où il n'y a pas de force organisée pour
lui résister, et qui tourne là ses assauts, où elle sait qu'on n'a
pas fait de levées et de digues pour la contenir.
Et si vous consi-
dérez l'Italie, qui est le siège de ces changements et qui leur a
donné le branle, vous verrez qu'elle est une campagne sans
levées et sans aucune digue.
Que si elle se fût donné un rempart
d'une force suffisante, comme l'Allemagne, l'Espagne et la
France, ou cette crue n'aurait pas fait les grands changements
qu'elle a faits, ou elle ne se serait pas produite.
Et je veux qu'il
me suffise d'avoir dit cela pour ce qui est de s'opposer à la
fortune en général.
Mais, me restreignant davantage aux cas particuliers, je dis
qu'on voit aujourd'hui tel prince prospérer, et demain s'effon-
drer, sans l'avoir vu changer en rien de nature ou de caractère :
ce que je crois qui naît d'abord des raisons qu'on a précédem-
ment longuement exposées, à savoir que le prince qui s'appuie
totalement sur la fortune s'effondre lorsque celle-ci varie.
Je
crois aussi qu'est heureux celui dont la façon de procéder
répond aux caractères du temps, et que de même est malheu-
reux celui avec les procédés de qui le temps est en désaccord.
Car on voit les hommes, dans les choses qui les conduisent au
but que chacun a en vue, c'est-à-dire gloire et richesses, y procé-
der de façons diverses : l'un avec circonspection, l'autre avec
i
mpétuosité, l'un par violence, l'autre avec habileté, l'un par
patience, l'autre par son contraire ; et chacun avec ces diverses
façons y peut parvenir.
Et l'on voit aussi, de deux circonspects,
l'un parvenir à ses fins, l'autre non, et de même deux prospérer
également par deux manières de faire différentes, étant l'un cir-
conspect et l'autre impétueux : ce qui ne vient de rien d'autre
que du caractère des temps, qui se conforment ou non avec
leurs procédés.
De là vient ce que j'ai dit, que deux, agissant
différemment, ont en partage le même résultat, et que deux,
agissant d'égale façon, l'un parvient à son but, et l'autre non.
De cela aussi dépend la variation du bien ; car si tel qui se
conduit avec circonspection et patience, les temps et les choses.
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