XVI Le dieu fou Les quelques hommes blancs qui se trouvaient à Fort Yukon vivaient depuis longtemps dans la contrée.
Publié le 30/10/2013
Extrait du document
«
Chez
lesêtres simples, lanotion dubien etdu mal estsimpliste elle-même.
Lebien estreprésenté partoutes choses
qui apportent contentement etsatisfaction, etévitent lapeine.
Lemal signifie toutcequi estincommode etdésagréable,
tout cequi menace etfrappe.
Croc-Blanc devinaitqueBeauty-Smith étaitlemal.
Aussi était-il sagedelehaïr.
Dececorps
difforme etde cette âmeperverse s’échappaient, pourlelouveteau, d’occultesémanations semblablesàces brouillards
pestilentiels quis’élèvent desmarécages.
Croc-Blanc setrouvait présentaucampement deCastor-Gris lorsque,pourlapremière fois,Beauté yfit son
apparition.
Avantqu’ilfûtenvue etdès lebruit, surlesol, deses pas lointains, Croc-Blanc avaitsuqui venait etavait
commencé àhérisser sonpoil.
Quoiqu’il fûtàce moment-là confortablement couchéenun délicieux farniente, ilse
dressa vivement et,tandis quel’homme approchait, seglissa, àla manière desloups, surlebord ducampement.
Ilne put
savoir cequ’on disait, maisvitbien quel’homme etCastor-Gris causaientensemble.
Parmoment, l’hommelemontrait du
doigt, etilgrondait alorscomme sila main dontilétait distant decinquante piedssefût exactement abaisséesurlui.
L’homme, quis’en apercevait, riait,etCroc-Blanc reculaitdeplus enplus vers lecouvert desbois voisins enrampant
doucement parterre.
Castor-Gris refusaitdevendre labête.
Soncommerce l’avaitenrichi, déclarait-il, etiln’avait besoinderien.
Croc-
Blanc étaitd’ailleurs unanimal devaleur, leplus robuste deschiens dutraîneau etlemeilleur chefdefile.
Iln’avait pas
son pareil danstoute larégion duMackenzie etdu Yukon.
Ilsavait combattre commepasunettuait unautre chien aussi
aisément qu’unhomme tueune mouche (àcet éloge, lesyeux deBeauty-Smith s’allumaientet,d’une langue ardente, il
léchait seslèvres minces).
Non,décidément, Croc-Blancn’étaitpasàvendre.
Mais Beauty-Smith savaitlafaçon des’y prendre aveclesIndiens.
Ilrendit àCastor-Gris defréquentes visiteset,
chaque fois,était cachée soussonhabit unenoire bouteille.
Unedespropriétés duwhisky estd’engendrer lasoif.
Castor-
Gris eutsoif.
Lesmuqueuses brûléesdeson estomac s’enfiévrèrent, etcelui-ci commença àréclamer, avecune
exaspération croissante,leliquide corrosif.
Enmême tempslecerveau del’Indien, bouleversé parl’horrible stimulant,
enlevait aumalheureux toutscrupule poursatisfaire sapassion.
Lesbénéfices acquisparlavente desfourrures etdes
mocassins semirent àpartir et,àmesure ques’aplatissait labourse deCastor-Gris, saforce derésistance diminuaitaussi.
Finalement, argent,marchandises etvolonté, touts’enétait allé.Rien nedemeurait àCastor-Gris quesasoif
prodigieuse, quirégnait diaboliquement enluietdont lapuissance augmentait àchaque soufflequ’ilémettait sansavoir
bu.
C’est alorsqueBeauté revintàla charge etreparla delavente deCroc-Blanc.
Maiscette foisleprix offert était
payable enbouteilles, nonendollars, etles oreilles deCastor-Gris étaientmieuxouvertes pourentendre.
– Le chien estàtoi, finit-il pardire, situ peux mettre lamain dessus.
Les bouteilles furentlivrées mais,deuxjours après, cefut BeautySmith quirevint direàCastor-Gris : « Attrape-le
donc toi-même ! »
Croc-Blanc, enrentrant unsoir aucampement, vitavec unsourire desatisfaction queleterrible dieublanc,
contrairement àson habitude, n’étaitpaslà.Ils’étendit parterre avecvolupté, commesiun poids quipesait surluiavait
disparu.
Sajoie futdecourte durée.Àpeine était-il couché queCastor-Gris vintvers luien titubant etlui liaautour ducou une
lanière decuir.
Puisils’assit àcôté dulouveteau, tenantd’unemainlalanière, tenantdel’autre unebouteille àlaquelle il
buvait detemps entemps, lalevant enl’air enrenversant latête etavec force glouglous.
Une heure s’était écoulée delasorte lorsqu’une légèrevibration dusol annonça quequelqu’un s’approchait.
Croc-
Blanc tressaillit etse hérissa, tandisquel’Indien branlait stupidement latête.
Lelouveteau tentadetirer doucement la
lanière delamain deson maître ; maislesdoigts, quis’étaient uninstant relâchés, secontractèrent plusfortement et
Castor-Gris seleva.
Beauté entrasouslatente ets’arrêta devantCroc-Blanc, quicommença àgronder verscelui qu’ilcraignait età
surveiller lesmouvements deses mains.
Uned’elles s’étendit, seprit àdescendre sursatête.
Songrondement sefitplus
intense etplus rauque.
Lamain continuait àdescendre lentement, tandisqu’ilsecourbait souselle,tout enlaregardant,
en proie àune colère continue etqui semblait prêteàéclater.
Soudain, ilalla pour mordre ; lamain serejeta vivement en
arrière etles crocs, retombant lesuns surlesautres, claquèrent commeunegueule deserpent quimord levide.
Beauté
était terrifié etfurieux.
MaisCastor-Gris donnaunetape àCroc-Blanc, quisecoucha aussitôt auras dusol, enune
respectueuse obéissance.
Cependant Beauty-Smith, quelelouveteau necessait pasd’observer, étaitparti, puisétait revenu, porteur d’ungros
gourdin.
Castor-Gris luiremit alorsl’extrémité delalanière etBea uté fıtlemouvement des’en aller.
Lalanière setendit.
Croc-Blanc résistait.Castor-Gris legifla dedroite etde gauche, afınqu’il se levât etsuivît.
Ilse leva, maispour se.
»
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