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valait au temps où il était facile de séparer la philosophie de son auteur.

Publié le 04/11/2013

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valait au temps où il était facile de séparer la philosophie de son auteur. Aujourd'hui, où la pensée ne prétend plus à l'universel, où sa meilleure histoire serait celle de ses repentirs, nous savons que le ystème, lorsqu'il est valable, ne se sépare pas de son auteur. L'Ethique elle-même sous l'un de ses spects, n'est qu'une longue et rigoureuse confidence. La pensée abstraite rejoint enfin son support de hair. Et de même, les jeux romanesques du corps et des passions s'ordonnent un peu plus suivant les xigences d'une vision du monde. On ne raconte plus « d'histoires «, on crée son univers. Les grands omanciers sont des romanciers philosophes, c'est-à-dire le contraire d'écrivains à thèse. Ainsi Balzac, ade, Melville, Stendhal, Dostoïevsky, Proust, Malraux, Kafka, pour n'en citer que quelques-uns. Mais justement le choix qu'ils ont fait d'écrire en images plutôt qu'en raisonnements est révélateur 'une certaine pensée qui leur est commune, persuadée de l'inutilité de tout principe d'explication et onvaincue du message enseignant de l'apparence sensible. Ils considèrent l'oeuvre à la fois comme une fin et un commencement. Elle est l'aboutissement d'une philosophie souvent inexprimée, son illustration et son couronnement. Mais elle n'est complète que par les sous-entendus de cette philosophie. Elle légitime enfin cette variante d'un thème ancien qu'un peu de pensée éloigne de la vie, mais que beaucoup y ramène. Incapable de sublimer le réel, la pensée s'arrête à le mimer. Le roman dont il est question est l'instrument de cette connaissance à la fois relative et inépuisable, si semblable à celle de l'amour. De l'amour, la création romanesque a l'émerveillement initial et la rumination féconde.   * C'est du moins les prestiges que je lui reconnais au départ. Mais je les reconnaissais aussi à ces princes de la pensée humiliée dont j'ai pu contempler ensuite les suicides. Ce qui m'intéresse justement, c'est de connaître et de décrire la force qui les ramène vers la voie commune de l'illusion. La même méthode me servira donc ici. De l'avoir déjà employée me permettra de raccourcir mon raisonnement et de le résumer sans tarder sur un exemple précis. Je veux savoir si, acceptant de vivre sans appel, on peut consentir aussi à travailler et créer sans appel et quelle est la route qui mène à ces libertés. Je veux délivrer mon univers de ses fantômes et le peupler seulement des vérités de chair dont je ne peux nier la présence. Je puis faire oeuvre absurde, choisir l'attitude créatrice plutôt qu'une autre. Mais une attitude absurde pour demeurer telle doit rester consciente de sa gratuité. Ainsi de l'oeuvre. Si les commandements de l'absurde n'y sont pas respectés, si elle n'illustre pas le divorce et la révolte, si elle sacrifie aux illusions et suscite l'espoir, elle n'est plus gratuite. Je ne puis plus me détacher d'elle. Ma vie peut y trouver un sens : cela est dérisoire. Elle n'est plus cet exercice de détachement et de passion qui consomme la splendeur et l'inutilité d'une vie d'homme. Dans la création où la tentation d'expliquer est la plus forte, peut-on alors surmonter cette tentation ? Dans le monde fictif où la conscience du monde réel est la plus forte, puis-je rester fidèle à l'absurde sans sacrifier au désir de conclure ? Autant de questions à envisager dans un dernier effort. On a compris déjà ce qu'elles signifiaient. Ce sont les derniers scrupules d'une conscience qui craint d'abandonner son premier et difficile enseignement au prix d'une ultime illusion. Ce qui vaut pour la création, considérée comme l'une des attitudes possibles pour l'homme conscient de l'absurde, vaut pour tous les styles de vie qui s'offrent à lui. Le conquérant ou l'acteur, le créateur ou Don Juan peuvent oublier que leur exercice de vivre ne saurait aller sans la conscience de son caractère insensé, On s'habitue si vite. On veut gagner de l'argent pour vivre heureux et tout l'effort et le meilleur d'une vie se concentrent pour le gain de cet argent. Le bonheur est oublié, le moyen pris pour la fin. De même tout l'effort de ce conquérant va dériver sur l'ambition qui n'était qu'un chemin vers une plus grande vie. Don Juan de son côté va consentir aussi à son destin, se satisfaire de cette existence dont la grandeur ne vaut que par la révolte. Pour l'un, c'est la conscience, pour l'autre, la révolte, dans les deux cas l'absurde a disparu. Il y a tant d'espoir tenace dans le coeur humain. Les hommes les plus dépouillés finissent quelquefois par consentir à l'illusion. Cette approbation dictée par le besoin de paix est le frère intérieur du consentement existentiel. Il y a ainsi des dieux de lumière et des idoles de boue. Mais c'est le chemin moyen qui mène aux visages de l'homme qu'il s'agit de trouver. Jusqu'ici ce sont les échecs de l'exigence absurde qui nous ont le mieux renseigné sur ce qu'elle est. e même façon, il nous suffira pour être avertis d'apercevoir que la création romanesque peut offrir la ême ambiguïté que certaines philosophies. Je peux donc choisir pour mon illustration une oeuvre où tout oit réuni qui marque la conscience de l'absurde, dont le départ soit clair et le climat lucide. Ses conséquences nous instruiront. Si l'absurde n'y est pas respecté, nous saurons par quel biais l'illusion s'introduit. Un exemple précis, un thème, une fidélité de créateur, suffiront alors. Il s'agit de la même analyse qui a déjà été faite plus longuement. J'examinerai un thème favori de Dostoïevsky. J'aurais pu aussi bien étudier d'autres oeuvres  [19] . Mais avec celle-ci, le problème est traité directement, dans le sens de la grandeur et de l'émotion, omme pour les pensées existentielles dont il a été question. Ce parallélisme sert mon objet.
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« l'homme qu'ils'agit detrouver. Jusqu'ici cesont leséchecs del'exigence absurdequinous ontlemieux renseigné surcequ'elle est. De même façon, ilnous suffira pourêtreavertis d'apercevoir quelacréation romanesque peutoffrir la même ambiguïté quecertaines philosophies.

Jepeux doncchoisir pourmonillustration uneœuvre oùtout soit réuni quimarque laconscience del'absurde, dontledépart soitclair etleclimat lucide.

Ses conséquences nousinstruiront.

Sil'absurde n’yest pas respecté, noussaurons parquel biais l'illusion s'introduit.

Unexemple précis,unthème, unefidélité decréateur, suffirontalors.Ils'agit delamême analyse quiadéjà étéfaite pluslonguement. J'examinerai unthème favorideDostoïevsky.

J'auraispuaussi bienétudier d'autres œuvres  [19] . Mais aveccelle-ci, leproblème esttraité directement, danslesens delagrandeur etde l'émotion, comme pourlespensées existentielles dontilaété question.

Ceparallélisme sertmonobjet.. »

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