Une réconciliation est-elle possible au Tchad ?
Publié le 16/12/2011
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Le président Malloum, après avoir placé de sérieux espoirs dans l'entrée de l'ancien chef rebelle Hissène Habré au gouvernement (voir numéro d'octobre 1978) était bientôt déçu. Dès janvier 1979, une très vive tension régnait à N'Djamena, consécutive à la crise ouverte entre les deux hommes. M. Hissène Habré réclamait une plus équitable répartition des responsabilités gouvernementales, et toute son action s'est trouvée à contre-courant de la recherche d'une réconciliation nationale. Des rumeurs de coups d'Etat ont précédé l'affrontement armé, commencé le 12 février, dont la capitale a été le théâtre et qui creusa plus profondément encore le fossé qui existe entre les populations du nord et du sud du pays. Avant que les armes n'entrent en action, une longue guerre de coups d'épingle avait opposé le président et son Premier ministre. Un irréductible antagonisme de personnes et des divergences d'interprétation de la « Charte fondamentale « sont à l'origine de la rupture de la dyarchie instaurée en juin 1978.

«
Criton/Sygma A la suite de la signature des accords de Kano qui ont mis
fin à l'affrontement Hissène Habré-Malloum au Tchad, le président du conseil de la révolution du Frolinat, M.
Goukouni Ouddeï a été investi chef du gouvernement
d'union nationale de transition.
Ayant voulu rechercher à Kano une médiation
exclusivement africaine, beaucoup redoutent désor
mais que
le Nigeria n'ait pas la capacité de préser
ver une paix fragile et ne pousse son avantage poli
tique.
Une seconde conférence de Kano s'était
achevée, en avril, dans un parfait désordre.
Les
membres composant le Conseil d'Etat
se sont rési
gnés à voir leur mandat prolongé.
Les anciens « re
belles du Nord))' regroupés en deux organisations
autour de MM.
Habré et Goukouni tentent d'assu
rer
le redressement et de maintenir l'unité du pays.
Le chef du Frolinat apparaît comme l'élément
déterminant de
la tentative de redressement tcha
dien et, pour les non-musulmans, il semble moins
impliqué dans la rivalité ethnique et religieuse que
l'ancien Premier ministre Hissène Habré avait atti
sée pour renverser
le président Malloum.
Un nouveau gouvernement de transition a été
formé le 29 avril ; cette équipe de 21 membres est
dirigée par M.
Mohamed Shawwa, appartenant au
mouvement 111• Armée, qui devient chef de l'Etat.
Il s'est engagé à respecter l'accord de N'Djamena
du
17 avril, signé par les représentants des quatre
principales tendances.
MM.
Goukouni et Habré
sont ministres d'Etat, chargés de l'Intérieur et de la
Défense.
Le souci de respecter un subtil dosage entre nor
distes et sudistes ainsi qu'entre chrétiens et musul
mans a présidé à l'élaboration de
la nouvelle équi
pe ; dix ministres sont originaires du nord et
musulmans et
le sud compte sept chrétiens et trois
musulmans du Tchad méridional ; mais le colonel
Kamougué, ancien chef de la gendarmerie et
« homme fort )) des sudistes est resté hors du jeu
ministériel, ce qui n'est pas sans inquiéter les deux
ministres d'Etat, car il organiserait un front d'op
position au gouvernement.
Autre sujet d'inquiétude pour les deux ministres,
aussi anti-libyens l'un que l'autre : ayant dénoncé
les agressions de Tripoli et le fol espoir de Khadafi
de voir un jour le Tchad à la remorque de la Libye,
ils sont soucieux de
le prendre de vitesse et de pro
mouvoir une solution purement tchadienne, c'est
pourquoi ils ont écarté du pouvoir Acy! Ahmat (ar
mée Volcan) soutenu par lui.
Ils
ont dû ménager le puissant Nigeria bien que son empressement à jouer les arbitres au Tchad leur paraisse suspect.
Plusieurs fois annoncée et ajournée, une troisiè
me conférence sur la « réconciliation nationale )) s'est ouverte à Lagos le 26 mai, mais elle débute
sous la menace d'une nouvelle guerre qui pourrait
aboutir à une sécession du sud et s'ouvre dans la
confusion.
Les représentants des tendances qui
ne participent pas au gouvernement le déclarent illé
gal, notamment les protégés de la Libye, dont le dernier en date, le colonel Kamougué qui s'est
replié avec ses gendarmes dans le Sud, le « Tchad
utile >>.
Khadafi a, une fois de plus, brouillé les car
tes, lui qui a si longtemps soutenu les rebelles du
Nord.
Veut-il à tout prix empêcher la réconcilia
tion entre frères tchadiens ?
La Libye livre armes et munitions, une navette
ayant été mise en place entre Tripoli et
le Sud, à
l'actuel ennemi des dirigeants de N'Djamena, d'où
ce paradoxe : à leurs yeux, la France apparaîtrait
comme le meilleur garant de l'unité nationale, et ils
auraient demandé le « gel provisoire » du retrait
français.
La nouvelle conférence (Kano
nn devra évaluer
la représentativité des diverses forces en présence ;
les dirigeants ont fait savoir qu'ils n'entendaient
pas monopoliser le pouvoir.
Mais pour consolider
la paix et retrouver l'unité du pays, un long chemin
reste
à parcourir, tant les divisions se sont aggra
vées..
»
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