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Un bon petit diable Charles:--Jolie, mais coquette; elle s'occupe trop de sa toilette; elle porte des cages, des jupes empesées; je n'épouserai jamais une femme qui porte des cages et des jupes de cinq mètres de tour!

Publié le 11/04/2014

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Un bon petit diable Charles:--Jolie, mais coquette; elle s'occupe trop de sa toilette; elle porte des cages, des jupes empesées; je n'épouserai jamais une femme qui porte des cages et des jupes de cinq mètres de tour! Juliette:--Tout le monde en porte! elle fait comme les autres. Charles:--Est-ce que tu en portes, toi? Pourquoi? parce que tu es raisonnable. Et je ne veux pas d'une femme folle. Juliette:--Et la soeur du maître d'école? Qu'en dis-tu? Charles:--Je dis qu'elle est méchante avec les enfants, et que les gens méchants pour les enfants le sont pour tout le monde, et sont lâches par-dessus le marché. C'est abuser lâchement de sa force que de maltraiter un enfant. Juliette:--Et la nièce du curé? Charles:--Elle est criarde et piaillarde! Elle crie après la bonne, après les pauvres, après M. le curé lui-même; c'est un enfer qu'une femme grondeuse. Juliette:--Mon Dieu, que tu es difficile, Charles! Charles:--Mais pourquoi aussi veux-tu me marier quand je n'en ai nulle envie? Juliette, avec tristesse:--Ce n'est pas moi qui pousse à te marier, Charles. Moi, je n'y ai aucun intérêt. Bien au contraire. Charles:--Pourquoi bien au contraire? Quelle est ta pensée, Juliette? ...Parle, Juliette; ne suis-je plus ton ami d'enfance, le confident de tes pensées? Juliette:--Eh bien, mon ami, je te dirai bien en confidence que c'est Marianne qui m'a demandé, sachant la confiance que tu as en mes conseils, de t'engager à marier et à ne pas trop attendre, parce que. ..Oh! Charles, je n'ose pas te le dire; tu seras fâché. Charles:--Moi, fâché contre toi, Juliette? M'as-tu jamais vu fâché contre toi? Crois-tu que je puisse me fâcher contre toi? Parle sans crainte, chère Juliette; ne me cache rien, ne me dissimule rien. Juliette:--C'est que Marianne voudrait se marier. Charles, très surpris:--Marianne? Se marier? A trente-deux ans? Ah! ah! ah! Ce n'est pas possible. Mais avec qui donc? Juliette:--Avec le juge de paix. Il ya longtemps qu'il la demande et qu'elle voudrait devenir sa femme. Tu as bien vu comme il vient souvent ici depuis trois ou quatre ans! Il paraît qu'il la presse beaucoup de se décider, et qu'elle lui a promis de l'épouser dès que tu serais marié, parce qu'il n'est pas convenable, dit-elle, que je reste avec toi sans elle, et que je ne veux pas te quitter pour aller demeurer chez Marianne avec la fille du juge. Charles:--Et si je me mariais, tu resterais avec moi, Juliette?» Juliette garda le silence. Charles lui prit la main. XX. CHARLES MAJEUR: ON LUI PROPOSE DES FEMMES; IL N'EN VEUT AUCUNE 81 Un bon petit diable «Resterais-tu, Juliette? répéta-t-il affectueusement. --Non, dit-elle avec effort. Charles, avec agitation:--Et tu ferais bien, car ce serait trop dur pour toi; ce serait impossible! Et c'est toi, bonne et douce Juliette, qui serais sacrifiée! Que Marianne se marie si elle veut, qu'elle fasse cette folie, moi je ne me marierai pas et je ne te quitterai pas. Je vivrai près de toi et je mourrai près de toi et avec toi, te bénissant et t'aimant jusqu'au dernier jour de ma vie. Et je ne serai jamais ingrat envers toi, Juliette; je ne t'abandonnerai jamais; et je mettrai tout mon bonheur à te soigner, à te promener, à te rendre la vie aussi douce que possible; comme je le faisais au temps de mon enfance, et comme je le fais avec bien plus de bonheur depuis que je suis homme et que je comprends mieux tout ce que je te dois. Juliette:--Oh! Charles! mon ami! que tu es bon et dévoué! Charles:--Qu'aurais-tu fait si je m'étais marié? Juliette:--Je me serais retirée dans un couvent, et j'espère que j'y serais morte bientôt. Charles:--Pauvre Juliette! Pauvre amie! Quelle récompense de ta bonté!» Charles se promena avec agitation dans la chambre. Il parlait haut sans s'en douter. «C'est incroyable!... disait-il. Je ne l'aurais jamais deviné!... Elle est folle!... A trente-deux ans!... Et un homme de quarante-cinq!... Ils sont fous tous les deux!... Et cette pauvre petite!... C'est mal!... Très mal!... Et ils croient que je la laisserai là!... seule! à souffrir, à pleurer!... Jamais!... Je vivrai pour elle comme elle vit pour moi!... Si elle y voyait! Mon Dieu, si elle y voyait!» Son agitation se calma tout doucement. «Juliette, dit-il, viens promener; viens respirer dans les champs; on étouffe ici. Ils sortirent. Charles mettait plus de soin que jamais à lui faire éviter les pierres, les ornières; il semblait comprendre qu'il était dans l'avenir son seul appui, son seul ami. Juliette avait sans doute la même pensée, car elle mettait plus d'abandon dans ses allures, dans ses paroles; elle ne retenait plus sa pensée, qu'elle déroula tout entière quand Charles lui reparla de ce qu'elle venait de lui apprendre, et de ses propres impressions sur le projet de sa soeur et sur ceux présumés de Charles. Elle lui avoua que depuis longtemps elle songeait avec terreur au jour où elle le verrait lié par le mariage à un autre devoir et à une affection. «Ce n'est pas de l'égoïsme, Charles, je t'assure; c'est un sentiment naturel devant la perte d'un bonheur dont j'apprécie toute la valeur et que rien ne peut remplacer.» Charles fut moins confiant, il lui parla peu de ses pensées intimes; mais en revanche il lui témoigna une affection plus vive et lui promit encore une fois de ne jamais l'abandonner. «Ce n'est pas un sacrifice, Juliette, je t'assure; c'est un sentiment d'instinct naturel pour mon propre bonheur.» Et Charles disait vrai. Profondément reconnaissant de la métamorphose que Juliette avait opérée en lui par sa douceur, sa patience, sa piété, sa constance, sa vive affection, il s'était promis et il avait promis à Dieu de se dévouer à elle comme elle s'était dévouée à lui. Il vit avec un redoublement de reconnaissance la tendresse toujours croissante que lui portait Juliette; il comprit qu'elle ne pouvait être heureuse qu'avec lui et par lui; il comprit que s'il introduisait une femme dans leur intérieur, ce serait leur malheur à tous: Juliette, qui XX. CHARLES MAJEUR: ON LUI PROPOSE DES FEMMES; IL N'EN VEUT AUCUNE 82

« «Resterais-tu, Juliette? répéta-t-il affectueusement. —Non, dit-elle avec effort. Charles, avec agitation:—Et tu ferais bien, car ce serait trop dur pour toi; ce serait impossible! Et c'est toi, bonne et douce Juliette, qui serais sacrifiée! Que Marianne se marie si elle veut, qu'elle fasse cette folie, moi je ne me marierai pas et je ne te quitterai pas.

Je vivrai près de toi et je mourrai près de toi et avec toi, te bénissant et t'aimant jusqu'au dernier jour de ma vie.

Et je ne serai jamais ingrat envers toi, Juliette; je ne t'abandonnerai jamais; et je mettrai tout mon bonheur à te soigner, à te promener, à te rendre la vie aussi douce que possible; comme je le faisais au temps de mon enfance, et comme je le fais avec bien plus de bonheur depuis que je suis homme et que je comprends mieux tout ce que je te dois. Juliette:—Oh! Charles! mon ami! que tu es bon et dévoué! Charles:—Qu'aurais-tu fait si je m'étais marié? Juliette:—Je me serais retirée dans un couvent, et j'espère que j'y serais morte bientôt. Charles:—Pauvre Juliette! Pauvre amie! Quelle récompense de ta bonté!» Charles se promena avec agitation dans la chambre.

Il parlait haut sans s'en douter. «C'est incroyable!...

disait-il.

Je ne l'aurais jamais deviné!...

Elle est folle!...

A trente-deux ans!...

Et un homme de quarante-cinq!...

Ils sont fous tous les deux!...

Et cette pauvre petite!...

C'est mal!...

Très mal!...

Et ils croient que je la laisserai là!...

seule! à souffrir, à pleurer!...

Jamais!...

Je vivrai pour elle comme elle vit pour moi!...

Si elle y voyait! Mon Dieu, si elle y voyait!» Son agitation se calma tout doucement. «Juliette, dit-il, viens promener; viens respirer dans les champs; on étouffe ici. Ils sortirent.

Charles mettait plus de soin que jamais à lui faire éviter les pierres, les ornières; il semblait comprendre qu'il était dans l'avenir son seul appui, son seul ami.

Juliette avait sans doute la même pensée, car elle mettait plus d'abandon dans ses allures, dans ses paroles; elle ne retenait plus sa pensée, qu'elle déroula tout entière quand Charles lui reparla de ce qu'elle venait de lui apprendre, et de ses propres impressions sur le projet de sa soeur et sur ceux présumés de Charles.

Elle lui avoua que depuis longtemps elle songeait avec terreur au jour où elle le verrait lié par le mariage à un autre devoir et à une affection. «Ce n'est pas de l'égoïsme, Charles, je t'assure; c'est un sentiment naturel devant la perte d'un bonheur dont j'apprécie toute la valeur et que rien ne peut remplacer.» Charles fut moins confiant, il lui parla peu de ses pensées intimes; mais en revanche il lui témoigna une affection plus vive et lui promit encore une fois de ne jamais l'abandonner. «Ce n'est pas un sacrifice, Juliette, je t'assure; c'est un sentiment d'instinct naturel pour mon propre bonheur.» Et Charles disait vrai.

Profondément reconnaissant de la métamorphose que Juliette avait opérée en lui par sa douceur, sa patience, sa piété, sa constance, sa vive affection, il s'était promis et il avait promis à Dieu de se dévouer à elle comme elle s'était dévouée à lui.

Il vit avec un redoublement de reconnaissance la tendresse toujours croissante que lui portait Juliette; il comprit qu'elle ne pouvait être heureuse qu'avec lui et par lui; il comprit que s'il introduisait une femme dans leur intérieur, ce serait leur malheur à tous: Juliette, qui Un bon petit diable XX.

CHARLES MAJEUR: ON LUI PROPOSE DES FEMMES; IL N'EN VEUT AUCUNE 82. »

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