Pot-bouille aigreur: --Vous l'etouffez.
Publié le 11/04/2014
Extrait du document
«
Les obseques de M.
Vabre eurent lieu seulement le surlendemain.
Duveyrier avait quand meme ajoute aux
lettres de faire-part les mots: muni des sacrements de l'Eglise.
Comme le magasin etait ferme, Octave se
trouvait libre.
Ce conge le ravissait, car depuis longtemps il desirait ranger sa chambre, changer des meubles
de place, mettre ses quelques livres dans une petite bibliotheque, achetee d'occasion.
Il s'etait leve plus tot que
de coutume, il achevait son rangement vers huit heures, le matin du convoi, lorsque Marie frappa.
Elle lui
rapportait un paquet de livres.
Puisque vous ne venez pas les chercher, dit-elle, il faut bien que je me donne la peine de vous les rendre.
Mais elle refusa d'entrer, rougissant, choquee a l'idee d'etre chez un jeune homme.
Leurs relations, d'ailleurs,
avaient completement cesse, d'une facon toute naturelle, parce qu'il n'etait plus retourne la prendre.
Et elle
restait aussi tendre avec lui, le saluait toujours d'un sourire, quand elle le rencontrait.
Octave etait tres gai, ce matin-la.
Il voulut la taquiner.
Alors, c'est Jules qui vous defend d'entrer chez moi? repetait-il.
Comment etes-vous avec Jules,
maintenant? Est-il aimable? oui, vous m'entendez bien? Repondez donc!
Elle riait, elle ne se scandalisait pas.
Pardi! quand vous l'emmenez, vous lui payez du vermouth en lui racontant des choses, qui le font rentrer
comme un fou....
Oh! il est trop aimable.
Vous savez, je n'en demande pas tant.
Mois j'aime mieux que ca se
passe chez moi qu'autre part, bien sur.
Elle redevint serieuse et ajouta:
Tenez, je vous rapporte votre Balzac, je n'ai pas pu le finir....
C'est trop triste, il n'a que des choses
desagreables a vous dire, ce monsieur-la!
Et elle lui demanda des histoires ou il y eut beaucoup d'amour, avec des aventures et des voyages dans des
pays etrangers.
Puis, elle parla de l'enterrement: elle irait a l'eglise, Jules pousserait jusqu'au cimetiere.
Jamais
elle n'avait eu peur des morts; a douze ans, elle etait restee une nuit entiere pres d'un oncle et d'une tante,
emportes par la meme fievre.
Jules, au contraire, detestait causer des morts, a ce point que, depuis la veille, il
lui avait defendu de parler du proprietaire, etendu sur le dos, en bas; mais elle ne trouvait rien a dire en dehors
de cette conversation, lui non plus, si bien qu'ils n'echangeaient pas dix mots par heure, tout en pensant
continuellement au pauvre monsieur.
Ca devenait ennuyeux, elle serait contente pour Jules, quand on
l'emporterait.
Et, heureuse d'en pouvoir parler a l'aise, satisfaisant son gout, elle accabla le jeune homme de
questions: l'avait-il vu? etait-il beaucoup change? devait-elle croire ce qu'on racontait, un abominable
accident, pendant la mise en biere? quant a la famille, ne decousait-elle pas les matelas, pour fouiller partout?
Tant d'histoires circulaient, dans une maison comme la leur, ou galopait une debandade de bonnes! La mort
etait la mort: on ne s'occupait que de ca.
Vous me fourrez encore un Balzac, reprit-elle en regardant les livres qu'il lui pretait de nouveau.
Non,
reprenez-le....
Ca ressemble trop a la vie.
Comme elle lui tendait le volume, il la saisit par le poignet et voulut l'attirer dans la chambre.
Elle l'amusait,
avec sa curiosite de la mort; elle lui paraissait drole, plus vivante, tout d'un coup desirable.
Mais elle comprit,
devint tres rouge, puis se degagea, se sauva, en disant:
Merci, monsieur Mouret....
A tout a l'heure, au convoi.
Pot-bouille
XI 134.
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