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pochette-surprise dans une salle de spectacle : « Mon petit papa.

Publié le 05/11/2013

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pochette-surprise dans une salle de spectacle : « Mon petit papa. Je suis dans ma pension. Les monitrices sont gentilles avec nous, les garçons et les filles ussi, sauf une qui s'appelle Monique. Elle a la maladie, c'est bien fait, il y a des jours où elle ne peut pas se baigner, j'en profite. Je suis dans ma pension. Je serais heureuse que tu viennes me voir et que tu m'apprennes à nager. J'espère qu'il fait beau à Paris et que ton théâtre marche bien fort. Je serais heureuse si tu m'envoyais un cadeau avec des cigarettes dedans. Mille millions de baisers... » Rien de grave en somme, aucune de ces vérités qui sortent de la bouche des enfants, aucun de ces venins qu'ils véhiculent à leur insu, rien que le sentiment un peu plus cruel de l'absurdité de l'existence, voilà ce qu'apporte à Fouquet la lettre de sa fille. Cependant, le rouge lui monte au front. « Si j'apparaissais maintenant, pense-t-il, la présence réelle lui deviendrait accessible, elle découvrirait la puissance d'un voeu, m'égalerait à Dieu : on m'appelle, j'arrive. » Cette condition où vous placent, en de certaines circonstances, de terrifiants pouvoirs sur les autres, il la redoute trop pour en avoir mesuré avec Claire, avec Gisèle, avec les gens. Voir et savoir, sans être vu ni connu, telle est la maxime d'un démiurge ivrogne et aboulique, qui ne répond plus aux prières, aux lettres et aux coups de téléphone. Au plus mou de sa mauvaise foi, Fouquet essaye de porter cette inertie qui le cantonne en marge de ses devoirs au compte d'une confiance ascétique dans la création, doublée d'une humilité absolue chez la créature. Il n'espère pas que Dieu sera dupe, il le lui suggère à tout hasard. Parmi les garçons, séparés des filles par les monitrices dûment chapeautées, un rayon de soleil estampille le jeune François au bon endroit. Il domine son entourage de la tête et des épaules. Fouquet se demande ce que sont ses parents et s'installe dans l'autre plateau de la balance, du côté de Marie, où tout semble très léger. Le vrai Dieu aura peut-être pitié de cette cause minuscule d'un bonheur d'enfant si mal engagé depuis la génération précédente. Ce François, fort découplé pour son âge, pourrait être le fils de Fouquet et celui-ci s'étonne de se sentir si proche de lui, dans une veste de daim presque semblable, déplorant qu'aucun organe ou accessoire supplémentaire ne désigne les prestiges de la paternité. Du même clan, soit ! mais avec quand même quelques brisques de plus. Et Quentin donc ! Dieu sait qu'il fait sonner ses années de campagne, avec des mines de n'attacher d'importance à rien. La pensée de Fouquet s'égare sur des sentiers maudits où, toute barrière abolie, Quentin éructant comme un Vésuve trébucherait à son bras dans de grands éclats de rire, des sentiers où il serait à son tour le diable de quelqu'un d'autre. La messe est dite. Elle s'achève toujours plus vite qu'elle n'a commencé. Déjà le cours Dillon s'aligne à l'entrée de l'avenue de l'Impératrice. Il s'ébranlera quand on aura récupéré la tante Victoria que l'on confie à la pâtisserie Thominet avec son crédit illimité pendant la durée du service. Les quatre-vingts ans de la fondatrice ne s'accommodent plus de l'exiguïté des prie-Dieu. Deux enfants seront appelés au privilège discutable d'épauler la gouvernante de la vieille dame dans la montée de la côte des Mouettes. Sur la place, il y a encore moins de monde qu'à l'ordinaire en raison de la chasse. Les automobiles des propriétaires environnants sont conduites par de cavalières jeunes femmes aux visages de caciques. Fouquet peut rentrer dans sa chambre d'hôtel, c'est fini pour aujourd'hui.   Il ne faudrait pas se rendre dans les lieux publics, partager le gâteau commun, si l'on doit accomplir le trajet du retour d'un pas qui ne trouve pas d'écho. Fouquet avait déjà parcouru la moitié de la rue Sinistrée, quand il reconnut sur le trottoir opposé deux jeunes filles qu'il avait remarquées les dimanches précédents sans s'arrêter autrement à la beauté altière de l'une d'elles, ni à la gaieté pétulante de sa compagne. Feignant de s'entretenir et réglant leur allure par de brefs coups de sonde dans les vitres des magasins, elles allaient à son rythme. Si ignorant qu'il fût de ce code de la marche, il vit là un manège destiné à attirer son attention et à lui signifier celle qu'on lui portait. Il eut garde de ne pas laisser transparaître qu'il avait capté le message mais, parvenu devant le tella, continua son chemin au-delà de la place du 25-Juillet, en suivant la route de Paris. Depuis longtemps, il 'avait éprouvé ce genre d'émotion. Le vin allègre qui se mit à courir dans ses veines l'emporta durant quelques nstants, dispersant les derniers cotons de l'ivresse et la meute des remords. La vie était encore une promenade réquentable si des jeunes filles le prenaient pour un jeune homme. Il suffit d'un regard vierge pour délivrer le rince de l'enveloppe monstrueuse où il est retenu. En accédant à cette partie de la ville à travers laquelle il ne 'était jamais aventuré, Fouquet devint plutôt joli par le simple jeu d'un réflexe oublié. L'empire sur soi-même e procède pas de ces grandes machineries qu'on appelle l'âme ou l'esprit, il est gouverné par des artisans bscurs ; la beauté est une affaire de vasoconstriction et de sphincters, celle de Gabriel prenait naissance dans la orge des reins et lui remontait aux pupilles en gonflant ses lèvres au passage. Son seul effort, par quoi il se istinguait de l'animal, tendait à refouler vers l'intérieur l'idiotie qui affleurait sous cette mimique. Elles pouvaient être âgées de dix-huit ou vingt ans, blondes toutes deux, avec des tailles très fines. La plus belle était montée sur de hauts talons qui lui arrondissaient le mollet, l'autre portait d'agiles chaussons lamés 'argent, les sandales mêmes de Mercure. Elles se prirent par le bras en s'engageant dans le Chemin Grattepain t leurs joues se frôlèrent, leurs mèches s'emmêlèrent, lorsqu'elles tournèrent la tête pour voir si Fouquet suivait bien. Il les entendit pouffer et continua d'avancer sans réfléchir qu'il venait de brûler successivement l'alibi du marchand de journaux, celui de la poste, celui plus aléatoire de la gendarmerie. Il progressait maintenant en terrain découvert entre deux rangées de lotissements ouvriers dont les familles devaient vivre sur le pas de leurs ortes, n'ignorant rien les unes des autres et, sauf à prétendre visiter la laiterie ou l'usine à gaz qui clôturaient ce ul-de-sac, il se rendit à l'évidence qu'il venait de montrer ses cartes le premier. Se donnant des airs d'admirer ce aysage sans ampleur, il remarqua qu'il n'avait jamais rencontré ces jeunes filles durant les jours de la semaine, 'où il déduisit qu'elles devaient travailler dans le coin, plus probablement à la laiterie, et loger dans l'une de ces maisons, peut-être sous le même toit, bien que leur complicité tendre ne fût pas celle de deux soeurs. Et c'était ommage par certains côtés, car il se refusait à dissocier l'équipage qu'elles formaient, où il traquait davantage ne allégorie de la jeunesse au coeur miroitant qu'un objectif à atteindre. « Qu'est-ce que tu vas chercher là ? se disait-il gaiement. Tu n'as rien à leur raconter, peu de chose à leur faire, ou tellement qu'il faudrait t'y prendre tout de suite en vieil adulte qui n'a pas de temps à perdre. À mon âge, il n'est plus de bon ami, je vous l'avoue tout net... Que suis-je en train de dire ? J'ai vingt ans, vous voyez bien, nous allons échanger nos photographies, ous m'écrirez quand je partirai soldat. Madeleine nous servira de boîte à lettres, ou Dominique, ou Jacqueline. e sera une très lente intrigue qui remplira chaque journée de signes et de menus gestes, dont chacun nous fera ieux trembler que des baisers. » Et tout à coup, elle disparurent, escamotées par l'un ou l'autre de ces jardinets ; des portes claquèrent, mais esquelles ? Fouquet, sur sa lancée, accomplit encore quelques dizaines de mètres, quêtant en vain une trace, einture ou ruban pendu à quelque balcon, frivolités par quoi se révèlent à la fenêtre les demoiselles de province. ien ne se manifesta qu'un personnage goguenard, surgi derrière une tondeuse, qui le dévisageait avec pplication. Soucieux de ne pas encourir la chevrotine d'un père, d'un frère, ou d'un promis ombrageux, Fouquet reprit en sens inverse le Chemin Grattepain, sans amertume, car la mystification faisait partie du jeu, et même le erbère. Ce n'est qu'en rejoignant la route de Paris qu'il se demanda si celui-ci n'était pas l'homme qui l'avait amassé cette nuit, en ricanant.   -- L'ouverture de la chasse ? à qui le dites-vous..., répondait Fouquet à Mme Quentin, qui s'attardait devant ui, lorsqu'elle passait entre les tables de la salie à manger. L'exaltation que lui avait procurée la sortie de la esse n'était pas encore tombée et, maintenant que l'occurrence en était passée, il se reprochait gaillardement e n'avoir pas abordé ces deux cailles : toucher n'est pas ramener ! -- Je disais, reprit Suzanne Quentin, que vous devriez-vous donner de l'exercice, vous ne mangez rien. Si ous étiez mon fils... Il venait d'écouter sans humeur des considérations sur sa petite mine, reproches que rien ne justifiait, sinon es échos de la veille. Il avait pourtant la certitude que Quentin n'avait pas parlé, que c'était précisément le ecret qui lui faisait ce visage plombé d'un homme à qui l'on doit rendre des comptes, irrésistiblement, ce visage nsupportable. Esnault se trompait : Quentin ne jugeait pas les autres, il était un témoin silencieux, d'autant plus ênant qu'il venait de ce bord-ci, un traître en somme, dont les renseignements demeuraient inconnus, les ouvements imprévisibles. Une autre vérité, guère moins irritante, était qu'il s'en fichait peut-être. -- Je bois trop, dit carrément Fouquet. J'ai trop bu cette nuit. Je ne sais pas m'arrêter. -- Il ne faut pas commencer, répondit-elle, en lorgnant la bouteille, ceux qui le veulent, s'arrêtent. -- Vous parlez contre votre intérêt. -- Mon intérêt c'est la santé de mes clients. -- Ouvrez plutôt un sanatorium. Votre mari ne vous avait rien dit ? Elle parut désarçonnée : -- Non, fit-elle, il m'a simplement rapporté que vous aviez bavardé très tard. Il sait que ces choses 'inquiètent... -- Ne m'en veuillez pas. -- Je ne dis pas cela pour vous. Pour qui le disait-elle ? Fouquet comprit qu'il venait d'amorcer une trahison en suggérant à Suzanne que uentin était encore capable de lui travestir la vérité et il n'en fut pas mécontent. Comme si elle eût compris le danger de s'engager plus avant dans cette conversation, Mme Quentin rompit avec un sourire un peu forcé, bientôt relevée par Marie-Jo. -- Alors, demanda celle-ci, ça marche ? Elle avait troqué sa blouse blanche des matinées pour un tablier de dentelle épinglé sur un corsage noir, qui laissait transparaître un harnachement compliqué de sangles et de bretelles. L'idée vint à Fouquet qu'elle était vierge sous tout cela ; non que la chasteté lui eût beaucoup pesé depuis quelque temps. -- Eh bien ! non, lui répondit-il, ça ne marche pas du tout.

« terrain découvert entredeuxrangées delotissements ouvriersdontlesfamilles devaient vivresurlepas deleurs portes, n’ignorant rienlesunes desautres et,sauf àprétendre visiterlalaiterie oul’usine àgaz quiclôturaient ce cul-de-sac, ilse rendit àl’évidence qu’ilvenait demontrer sescartes lepremier.

Sedonnant desairs d’admirer ce paysage sansampleur, ilremarqua qu’iln’avait jamaisrencontré cesjeunes fillesdurant lesjours delasemaine, d’où ildéduisit qu’ellesdevaient travailler danslecoin, plusprobablement àla laiterie, etloger dansl’une deces maisons, peut-être souslemême toit,bien queleur complicité tendrenefût pas celle dedeux sœurs.

Etc’était dommage parcertains côtés,carilse refusait àdissocier l’équipage qu’ellesformaient, oùiltraquait davantage une allégorie delajeunesse aucœur miroitant qu’unobjectif àatteindre.

« Qu’est-ce quetuvas chercher là ?se disait-il gaiement.

Tun’as rien àleur raconter, peudechose àleur faire, outellement qu’ilfaudrait t’yprendre tout desuite envieil adulte quin’apas detemps àperdre.

Àmon âge,iln’est plusdebon ami, jevous l’avoue tout net… Quesuis-je entrain dedire ? J’aivingt ans,vous voyez bien,nousallons échanger nosphotographies, vous m’écrirez quandjepartirai soldat.Madeleine nousservira deboîte àlettres, ouDominique, ouJacqueline. Ce sera unetrès lente intrigue quiremplira chaquejournée designes etde menus gestes,dontchacun nousfera mieux trembler quedesbaisers. » Et tout àcoup, elledisparurent, escamotéesparl’un oul’autre deces jardinets ; desportes claquèrent, mais lesquelles ? Fouquet,sursalancée, accomplit encorequelques dizainesdemètres, quêtant envain unetrace, ceinture ouruban pendu àquelque balcon,frivolités parquoi serévèlent àla fenêtre lesdemoiselles deprovince. Rien nesemanifesta qu’unpersonnage goguenard,surgiderrière unetondeuse, quiledévisageait avec application.

Soucieuxdene pas encourir lachevrotine d’unpère, d’unfrère, oud’un promis ombrageux, Fouquet reprit ensens inverse leChemin Grattepain, sansamertume, carlamystification faisaitpartiedujeu, etmême le cerbère.

Cen’est qu’en rejoignant laroute deParis qu’ilsedemanda sicelui-ci n’étaitpasl’homme quil’avait ramassé cettenuit,enricanant.   —  L’ouverture delachasse ? àqui ledites-vous…, répondaitFouquetàM me  Quentin, quis’attardait devant lui, lorsqu’elle passaitentrelestables delasalie àmanger.

L’exaltation queluiavait procurée lasortie dela messe n’était pasencore tombée et,maintenant quel’occurrence enétait passée, ilse reprochait gaillardement de n’avoir pasabordé cesdeux cailles : toucher n’estpasramener ! — Je disais, repritSuzanne Quentin, quevous devriez-vous donnerdel’exercice, vousnemangez rien.Si vous étiez monfils… Il venait d’écouter sanshumeur desconsidérations sursapetite mine,reproches querien nejustifiait, sinon des échos delaveille.

Ilavait pourtant lacertitude queQuentin n’avaitpasparlé, quec’était précisément le secret quiluifaisait cevisage plombé d’unhomme àqui l’on doit rendre descomptes, irrésistiblement, cevisage insupportable.

Esnaultsetrompait : Quentinnejugeait paslesautres, ilétait untémoin silencieux, d’autantplus gênant qu’ilvenait decebord-ci, untraître ensomme, dontlesrenseignements demeuraientinconnus,les mouvements imprévisibles.

Uneautre vérité, guèremoins irritante, étaitqu’ils’enfichait peut-être. — Je boistrop, ditcarrément Fouquet.J’aitrop bucette nuit.Jene sais pasm’arrêter. — Il nefaut pascommencer, répondit-elle, enlorgnant labouteille, ceuxquileveulent, s’arrêtent. — Vous parlezcontre votreintérêt. — Mon intérêtc’estlasanté demes clients. — Ouvrez plutôtunsanatorium.

Votremarinevous avait riendit ? Elle parut désarçonnée : — Non, fit-elle,ilm’a simplement rapportéquevous aviez bavardé trèstard.

Ilsait que ceschoses m’inquiètent… — Ne m’enveuillez pas. — Je nedis pas cela pour vous. Pour quiledisait-elle ? Fouquetcompritqu’ilvenait d’amorcer unetrahison ensuggérant àSuzanne que Quentin étaitencore capable delui travestir lavérité etiln’en futpas mécontent.

Commesielle eûtcompris le danger des’engager plusavant danscette conversation, Mme  Quentin rompitavecunsourire unpeu forcé, bientôt relevéeparMarie-Jo. — Alors, demanda celle-ci,çamarche ? Elle avait troqué sablouse blanche desmatinées pouruntablier dedentelle épinglésuruncorsage noir,qui laissait transparaître unharnachement compliquédesangles etde bretelles.

L’idéevintàFouquet qu’elleétait vierge soustoutcela ; nonquelachasteté luieût beaucoup pesédepuis quelque temps. — Eh bien ! non,luirépondit-il, çane marche pasdutout.. »

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