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ordre mesuré à l'équerre des potences, partagé entre les morts

Publié le 15/12/2013

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ordre mesuré à l'équerre des potences, partagé entre les morts tranquilles et les fourmis désormais bien élevées, paradis puritain privé de prairies et de pain, où circulent des anges policiers aux ailes majuscules parmi des bienheureux rassasiés de papier et de nourrissantes formules, prosternés devant le Dieu décoré destructeur de toutes choses et décidément dévoué à dissiper les anciens délires d'un monde trop délicieux.     NADA   Vive rien ! Personne ne se comprend plus : nous sommes dans l'instant parfait !   Lumière au centre. On aperçoit en découpure des cabanes et des barbelés, des miradors et quelques autres monuments hostiles. Entre Diego vêtu du masque, l'allure traquée. Il aperçoit les monuments, le peuple et la Peste.   DIEGO, s'adressant au choeur.   Où est l'Espagne ? Où est Cadix ? Ce décor n'est d'aucun pays ! Nous sommes dans un autre monde où l'homme ne peut pas vivre. Pourquoi êtes-vous muets ?   LE CHOEUR   Nous avons peur ! Ah ! si le vent se levait...   DIEGO   J'ai peur aussi. Cela fait du bien de crier sa peur ! Criez, le vent répondra.   LE CHOEUR   Nous étions un peuple et nous voici une masse ! On nous invitait, nous voici convoqués ! Nous échangions e pain et le lait, maintenant nous sommes ravitaillés ! Nous piétinons ! (Ils piétinent.) Nous piétinons et nous disons que personne ne peut rien pour personne et qu'il faut attendre à notre place, dans le rang qui nous est assigné ! À quoi bon crier ? Nos femmes n'ont plus le visage de fleur qui nous faisait souffler de désir, l'Espagne a disparu ! Piétinons ! Piétinons ! Ah douleur ! C'est nous que nous piétinons ! Nous étouffons dans cette ville close ! Ah ! si le vent se levait...   LA PESTE   Ceci est la sagesse. Approche Diego, maintenant que tu as compris.   Dans le ciel, bruit des radiations.   DIEGO   Nous sommes innocents !   La Peste éclate de rire.   DIEGO, criant.   L'innocence, bourreau, comprends-tu cela, l'innocence !   LA PESTE   L'innocence ! Connais pas !   DIEGO   Alors, approche. Le plus fort tuera l'autre.   LA PESTE   Le plus fort, c'est moi, innocent. Regarde.   Il fait un signe aux gardes qui s'avancent vers Diego. Celui-ci fuit.   LA PESTE   Courez après lui ! Ne le laissez pas s'échapper ! Celui qui fuit nous appartient ! Marquez-le.   Des gardes courent après Diego. Poursuite mimée sur les praticables. Sifflets. Sirènes d'alerte.   LE CHOEUR   L'autre court ! Il a peur et il le dit. Il n'a pas sa maîtrise, il est dans la folie ! Nous, nous sommes devenus sages. Nous sommes administrés. Mais dans le silence des bureaux, nous écoutons un long cri contenu qui est celui des coeurs séparés et qui nous parle de la mer sous le soleil de midi, de l'odeur des roseaux dans le soir, des bras frais de nos femmes. Nos faces sont scellées, nos pas comptés, nos heures ordonnées, mais notre coeur refuse le silence. Il refuse les listes et les matricules, les murs qui n'en finissent pas, les barreaux aux fenêtres, les petits matins hérissés de fusils. Il refuse comme celui-ci qui court pour atteindre une maison, fuyant ce décor d'ombres et de chiffres, pour retrouver enfin un refuge. Mais le seul refuge est la mer dont ces murs nous séparent. Que le vent se lève et nous pourrons nfin respirer...   Diego s'est en effet précipité dans une maison. Les gardes s'arrêtent devant la porte et y postent des sentinelles.   LA PESTE, hurlant.   Marquez-le ! Marquez-les tous ! Même ce qu'ils ne disent pas peut encore s'entendre ! Ils ne peuvent lus protester, mais leur silence grince ! Écrasez leurs bouches ! Bâillonnez-les, et apprenez-leur les maîtres-mots jusqu'à ce qu'eux aussi répètent toujours la même chose, jusqu'à ce qu'ils deviennent enfin les bons citoyens dont nous avons besoin.   Des cintres, tombent alors, vibrants comme s'ils passaient par des haut-parleurs, des nuées de slogans qui s'amplifient à mesure qu'ils sont répétés et qui recouvrent le choeur à bouche fermée jusqu'à ce que règne un silence total.   Une seule peste, un seul peuple ! Concentrez-vous, exécutez-vous, occupez-vous ! Une bonne peste vaut mieux que deux libertés ! Déportez, torturez, il en restera toujours quelque chose !   Lumière chez le juge.   VICTORIA   Non, père. Vous ne livrerez pas cette vieille servante sous prétexte qu'elle est contaminée. Oubliezous qu'elle m'a élevée et qu'elle vous a servi sans jamais se plaindre.   LE JUGE   Ce qu'une fois j'ai décidé, qui oserait le reprendre ?   VICTORIA   Vous ne pouvez décider de tout. La douleur a aussi ses droits.   LE JUGE   Mon rôle est de préserver cette maison et d'empêcher que le mal y pénètre. Je...   Entre soudain Diego.

«   DIEGO,s'adressant auchœur.   Où est l’Espagne ? Oùest Cadix ? Cedécor n'estd'aucun pays !Noussommes dansunautre monde où l'homme nepeut pasvivre.

Pourquoi êtes-vous muets ?   LE CHŒUR   Nous avons peur ! Ah !sile vent selevait...   DIEGO   J'ai peur aussi.

Celafaitdubien decrier sapeur ! Criez, levent répondra.   LE CHŒUR   Nous étions unpeuple etnous voici unemasse ! Onnous invitait, nousvoici convoqués ! Nouséchangions le pain etlelait, maintenant noussommes ravitaillés !Nous piétinons ! ( Ils piétinent.

) Nous piétinons et nous disons quepersonne nepeut rienpour personne etqu'il faut attendre ànotre place, danslerang qui nous estassigné ! Àquoi boncrier ? Nosfemmes n'ontpluslevisage defleur quinous faisait souffler de désir, l'Espagne adisparu ! Piétinons ! Piétinons ! Ahdouleur ! C'estnousquenous piétinons ! Nous étouffons danscette villeclose ! Ah !sile vent selevait...   LA PESTE  Ceci estlasagesse.

Approche Diego,maintenant quetuas compris.   Dansleciel, bruit desradiations.   DIEGO  Nous sommes innocents !   LaPeste éclate derire.  DIEGO,criant.. »

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