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Ofir n'avait pas cessé de sourire.

Publié le 30/10/2013

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Ofir n'avait pas cessé de sourire. -- Allons dans mon laboratoire. La vaste pièce était remplie de papyrus, de morceaux d'ivoire inscrits, de coupelles contenant des substances colorées et de cordelettes. Aucun désordre, une agréable odeur d'encens. L'endroit ressemblait davantage à un atelier d'artisan ou à un bureau de scribe bien tenu qu'à l'antre d'un mage noir. Ofir étendit les mains au-dessus d'un miroir de cuivre, posé à plat sur un trépied. Puis il versa de l'eau et pria Chénar de s'approcher. Peu à peu, un visage prit forme dans le miroir. -- Romé ! s'exclama Chénar. -- L'intendant de Ramsès est un brave homme, commenta Ofir, mais faible, avide et influençable. Il n'était pas nécessaire d'être un grand sorcier pour l'envoûter. Le vol qu'il a commis, à son corps défendant, le ronge de l'intérieur comme un acide. -- Si Ramsès l'interroge, Romé parlera. -- Non, seigneur Chénar. La main gauche d'Ofir forma un cercle au-dessus du miroir. L'eau bouillonna et le cuivre se fendilla. Impressionné, Chénar recula. -- Ce tour de magie suffira-t-il à faire taire Romé ? -- Considérez ce problème comme résolu. Déménager ne me paraît pas indispensable ; cette maison n'estelle pas au nom de votre soeur ? -- Si. -- Chacun la voit aller et venir. Lita et moi sommes ses serviteurs zélés et n'avons nulle envie de nous promener en ville. Tant que nous n'aurons pas détruit les protections magiques du couple royal, ni elle ni moi ne sortirons d'ici. -- Et les partisans d'Aton ? -- Votre soeur nous sert d'agent de liaison. Sur mon ordre, ils se montrent d'une discrétion exemplaire, dans l'attente d'un grand événement. Chénar partit, à demi rassuré. Il se moquait bien de cette bande d'illuminés nostalgiques et s'inquiétait surtout de ne pas pouvoir éliminer l'intendant Romé de ses propres mains. Restait à espérer que le mage ne se vantait pas. Une précaution supplémentaire s'imposait.   Le Nil était un fleuve merveilleux. Grâce à son puissant courant, qui propulsait un bateau rapide à plus de treize kilomètres à l'heure, Chénar parcourut en moins de deux jours la distance qui séparait Memphis de PiRamsès. Le frère aîné du roi passa à son ministère, organisa une réunion rapide avec ses principaux collaborateurs, prit connaissance des dépêches en provenance de l'étranger et des messages expédiés par les diplomates en poste dans les protectorats. Une chaise à porteurs l'emmena ensuite au palais royal, sous un ciel couvert, chargé de nuages de pluie. Pi-Ramsès était une belle ville, à laquelle manquaient la patine de Memphis et le charme que donne le passé. Quand il régnerait, Chénar lui ôterait son statut de capitale, surtout parce que Ramsès l'avait trop marquée de son empreinte. Une population animée et joyeuse vaquait à ses occupations quotidiennes, comme si la paix était éternelle, comme si le vaste empire hittite avait disparu dans le trou sans fond de l'oubli. Un instant, Chénar se laissa attirer par le mirage de cette existence simple que rythmait la sagesse des saisons. Ne devrait-il pas, comme la totalité du peuple d'Egypte, accepter la souveraineté de Ramsès ? Non, il n'était pas un serviteur. Il possédait l'étoffe d'un roi dont l'Histoire se souviendrait, d'un monarque à la vision autrement plus vaste que celle de Ramsès et du « grand chef « hittite. De sa pensée naîtrait un monde nouveau dont il serait le maître. Pharaon ne fit pas attendre son frère. Ramsès achevait de s'entretenir avec Améni dont Veilleur avait soigneusement léché le visage. Le secrétaire particulier du monarque et Chénar se saluèrent avec froideur, le chien jaune or se coucha dans un maigre rayon de soleil. -- Un voyage agréable, Chénar ? -- Excellent. Tu me pardonneras, mais j'aime beaucoup Memphis. -- Qui t'en blâmerait ? C'est une cité exceptionnelle, que Pi-Ramsès n'égalera jamais. Si la menace hittite n'avait pas pris de telles proportions, je n'aurais pas eu besoin de créer une nouvelle capitale. -- L'administration memphite demeure un modèle de conscience professionnelle. -- Les différents services de Pi-Ramsès travaillent avec efficacité ; ton ministère n'en est-il pas une preuve ? -- Je ne ménage pas ma peine, crois-moi ; aucun message inquiétant, ni officiel ni officieux. Les Hittites sont muets. -- Pas le moindre commentaire de nos diplomates ? -- Les Anatoliens ont été assommés par ton intervention ; ils n'imaginaient pas que l'armée égyptienne saurait se montrer si rapide et si conquérante. -- Possible. -- Pourquoi douter ? S'ils étaient sûrs de leur invincibilité, les Hittites auraient au moins émis une vigoureuse protestation. -- Eux, respecter la frontière imposée par Séthi... Je n'y crois pas. -- Deviendrais-tu pessimiste, Majesté ? -- La raison d'être de l'empire hittite, c'est l'expansion territoriale. -- L'Egypte n'est-elle pas un trop gros morceau à avaler, même pour un ennemi affamé ? -- Quand une caste militaire veut l'affrontement, estima Ramsès, ni la sagesse ni la raison ne peuvent l'en dissuader. -- Seul un adversaire de taille fera reculer les Hittites. -- Prônerais-tu un armement intensif, Chénar, et une augmentation de nos effectifs ? -- Quelle meilleure solution ? Le rayon de soleil ayant disparu, Veilleur sauta sur les genoux du roi. -- N'est-ce pas une manière de déclarer la guerre ? s'inquiéta Ramsès. -- Les Hittites ne comprendront pas d'autre langage que celui de la force ; c'est ta pensée véritable, si je ne m'abuse. -- Je tiens aussi à la consolidation de notre système défensif. -- Faire de nos protectorats une zone tampon, je sais... Lourde tâche pour ton ami Acha, même s'il n'est pas dépourvu d'ambition. -- Te paraît-elle excessive ? -- Acha est jeune, tu viens de le décorer et de faire de lui l'un des principaux personnages de l'État. Une promotion aussi rapide pourrait lui monter à la tête... Nul ne conteste ses immenses qualités, mais ne convient-il pas d'être méfiant ? -- La hiérarchie militaire ne s'est pas sentie suffisamment honorée, j'en suis conscient ; mais Acha est l'homme de la situation. -- Il y a un détail sans grande importance, mais il est de mon devoir de t'en parler. Tu sais que le personnel du palais a tendance à bavarder à tort et à travers ; néanmoins, certaines confidences sont peut-être dignes d'intérêt. D'après mon intendant, qui éprouve une amitié prononcée pour l'une des femmes de chambre de la reine, cette servante prétendrait avoir vu Romé dérober le châle de Néfertari. -- Témoignerait-elle ? -- Romé la terrorise. Elle craint d'être malmenée par ton intendant, si elle l'accuse. -- Sommes-nous dans une contrée de brigands ou dans un pays gouverné par Maât ? -- Peut-être devrais-tu d'abord faire avouer Romé ; ensuite, la petite témoignera. En esquissant une critique à propos d'Acha, et surtout en dénonçant Romé et en précipitant l'intervention de Ramsès, Chénar jouait un jeu dangereux, mais devenait, en revanche, de plus en plus crédible aux yeux du pharaon. Si les pratiques occultes d'Ofir se révélaient inefficaces, Chénar l'étranglerait de ses propres mains.

« — Un voyage agréable, Chénar ? — Excellent.

Tume pardonneras, maisj’aime beaucoup Memphis. — Qui t’enblâmerait ? C’estunecitéexceptionnelle, quePi-Ramsès n’égalerajamais.Silamenace hittite n’avait paspris detelles proportions, jen’aurais paseubesoin decréer unenouvelle capitale. — L’administration memphitedemeureunmodèle deconscience professionnelle. — Les différents servicesdePi-Ramsès travaillentavecefficacité ; tonministère n’enest-il pasune preuve ? — Je neménage pasmapeine, crois-moi ; aucunmessage inquiétant, niofficiel niofficieux.

LesHittites sont muets. — Pas lemoindre commentaire denos diplomates ? — Les Anatoliens ontétéassommés partonintervention ; ilsn’imaginaient pasque l’armée égyptienne saurait semontrer sirapide etsiconquérante. — Possible. — Pourquoi douter ?S’ilsétaient sûrsdeleur invincibilité, lesHittites auraient aumoins émisune vigoureuse protestation. — Eux, respecter lafrontière imposéeparSéthi… Jen’y crois pas. — Deviendrais-tu pessimiste,Majesté ? — La raison d’êtredel’empire hittite,c’estl’expansion territoriale. — L’Egypte n’est-ellepasuntrop gros morceau àavaler, mêmepourunennemi affamé ? — Quand unecaste militaire veutl’affrontement, estimaRamsès, nilasagesse nilaraison nepeuvent l’en dissuader. — Seul unadversaire detaille ferareculer lesHittites. — Prônerais-tu unarmement intensif,Chénar,etune augmentation denos effectifs ? — Quelle meilleure solution ? Le rayon desoleil ayant disparu, Veilleursautasurlesgenoux duroi. — N’est-ce pasune manière dedéclarer laguerre ? s’inquiéta Ramsès. — Les Hittites necomprendront pasd’autre langage quecelui delaforce ; c’esttapensée véritable, sije ne m’abuse. — Jetiens aussi àla consolidation denotre système défensif. — Faire denos protectorats unezone tampon, jesais… Lourde tâchepourtonami Acha, même s’iln’est pas dépourvu d’ambition. — Te paraît-elle excessive ? — Acha estjeune, tuviens deledécorer etde faire delui l’un desprincipaux personnages del’État.

Une promotion aussirapide pourrait luimonter àla tête… Nulneconteste sesimmenses qualités,maisneconvient-il pas d’être méfiant ? — La hiérarchie militairenes’est passentie suffisamment honorée,j’ensuis conscient ; maisAcha est l’homme delasituation. — Il ya un détail sansgrande importance, maisilest demon devoir det’en parler.

Tusais quelepersonnel du palais atendance àbavarder àtort etàtravers ; néanmoins, certainesconfidences sontpeut-être dignes d’intérêt.

D’aprèsmonintendant, quiéprouve uneamitié prononcée pourl’une desfemmes dechambre dela reine, cetteservante prétendrait avoirvuRomé dérober lechâle deNéfertari. — Témoignerait-elle ? — Romé laterrorise.

Ellecraint d’êtremalmenée partonintendant, sielle l’accuse. — Sommes-nous dansunecontrée debrigands oudans unpays gouverné parMaât ? — Peut-être devrais-tud’abordfaireavouer Romé ; ensuite, lapetite témoignera. En esquissant unecritique àpropos d’Acha, etsurtout endénonçant Roméeten précipitant l’intervention de Ramsès, Chénarjouaitunjeu dangereux, maisdevenait, enrevanche, deplus enplus crédible auxyeux du pharaon.. »

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