Oeuvres de Napoleon Bonaparte, TOME III Vous trouverez ci-joint les papiers anglais et de Francfort jusqu'au 10 juin.
Publié le 12/04/2014
Extrait du document
«
Supposant que les circonstances soient telles que vous croyez devoir conclure ce traité avec la Porte, vous
ferez sentir que vous ne pouvez pas le mettre à exécution, qu'il ne soit ratifié; et, selon l'usage de toutes les
nations, l'intervalle entre la signature d'un traité et sa ratification, doit toujours être une suspension d'hostilité.
Vous connaissez, citoyen général, quelle est ma manière de voir sur la politique intérieure de l'Egypte:
quelque chose que vous fassiez, les chrétiens seront toujours nos amis.
Il faut les empêcher d'être trop
insolens, afin que les Turcs n'aient pas contre nous le même fanatisme que contre les chrétiens, ce qui nous les
rendrait irréconciliables.
Il faut endormir le fanatisme, avant qu'on puisse le déraciner.
En captivant l'opinion
des grands scheicks du Caire, on a l'opinion de toute l'Egypte; et, de tous les chefs que ce peuple peut avoir, il
n'y en a aucun moins dangereux que des scheicks qui sont peureux, ne savent pas se battre, et qui, comme tous
les prêtres, inspirent le fanatisme sans être fanatiques.
Quant aux fortifications d'Alexandrie, El-Arich, voilà les clefs de l'Egypte.
J'avais le projet de faire établir cet
hiver des redoutes de palmiers, deux depuis Salahieh à Catieh, deux de Catieh à El-Arich: l'une se serait
trouvée à l'endroit où le général Menou a trouvé de l'eau potable.
Le général Samson, commandant du génie, et le général Songis, commandant l'artillerie, vous mettront chacun
au fait de ce qui regarde sa partie.
Le citoyen Poussielgue a été exclusivement chargé des finances, je l'ai reconnu travailleur et homme de
mérite.
Il commence à avoir quelques renseignemens sur le chaos de l'administration de l'Egypte.
J'avais le
projet, si aucun nouvel événement ne survenait, de tâcher d'établir cet hiver un nouveau mode d'imposition, ce
qui nous aurait permis de nous passer à peu près des Cophtes; cependant, avant de l'entreprendre, je vous
conseille d'y réfléchir long-temps.
Il vaut mieux entreprendre cette opération un peu plus tard qu'un peu trop
tôt.
Des vaisseaux de guerre français paraîtront cet hiver indubitablement à Alexandrie, Bourlos ou Damiette.
Faites construire une bonne tour à Bourlos; tâchez de réunir cinq ou six cents mameloucks que, lorsque les
vaisseaux français seront arrivés, vous ferez en un jour arrêter au Caire et dans les autres provinces, et
embarquer pour la France.
Au défaut de mameloucks, des ôtages d'Arabes, des scheicks Belet qui, pour une
raison quelconque, se trouveraient arrêtés, pourront y suppléer.
Ces individus arrivés en France, y seront
retenus un ou deux ans, verront la grandeur de la nation, prendront quelques idées de nos moeurs et de notre
langue, et, de retour en Egypte, y formeront autant de partisans.
J'avais déjà demandé plusieurs fois une troupe de comédiens: je prendrai un soin particulier de vous en
envoyer.
Cet article est très-important pour l'armée, et pour commencer à changer les moeurs du pays.
La place importante que vous aller occuper en chef va vous mettre à même enfin de déployer les talens que la
nature vous a donnés.
L'intérêt de ce qui se passera ici est vif, et les résultats en seront immenses pour le
commerce, pour la civilisation; ce sera l'époque d'où dateront de grandes révolutions.
Accoutumé à voir la récompense des peines et des travaux de la vie dans l'opinion de la postérité, j'abandonne
avec le plus grand regret l'Egypte.
L'intérêt de la patrie, sa gloire, l'obéissance, les événemens extraordinaires
qui viennent de se passer, me décident seuls à passer au milieu des escadres ennemies pour me rendre en
Europe.
Je serai d'esprit et de coeur avec vous.
Vos succès me seront aussi chers que ceux où je me trouverais
en personne, et je regarderai comme mal employés tous les jours de ma vie où je ne ferai pas quelque chose
pour l'armée dont je vous laisse le commandement, et pour consolider le magnifique établissement dont les
fondemens viennent d'être jetés.
L'armée que je vous confie est toute composée de mes enfans; j'ai eu dans tous les temps, même au milieu des
plus grandes peines, des marques de leur attachement.
Entretenez-les dans ces sentimens, vous le devez à Oeuvres de Napoleon Bonaparte, TOME III
Alexandrie, le 5 fructidor an 7 (22 août 1799).
100.
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