Oeuvres de Napoleon Bonaparte, TOME III Quoique nos chevaux fussent fatigués, l'ennemi fut chargé et mis en déroute.
Publié le 12/04/2014
Extrait du document


«
Les positions que nous occupons sont formidables, et pendant qu'ils marcheront pour tourner ma droite, ils me
présenteront le flanc.
Soldats, je dirigerai moi-même tous vos bataillons: je me tiendrai loin du feu, si avec votre bravoure
accoutumée, vous portez le désordre et la confusion dans les rangs ennemis; mais si la victoire était un
moment incertaine, vous verriez votre empereur s'exposer aux premiers coups, car la victoire ne saurait
hésiter, dans cette journée surtout, où il y va de l'honneur de l'infanterie française, qui importe tant à l'honneur
de toute la nation.
Que, sous prétexte d'emmener les blessés, on ne désorganise pas les rangs, et que chacun soit bien pénétré de
cette pensée, qu'il faut vaincre ces stipendiés de l'Angleterre, qui sont animés d'une si grande haine contre
notre nation.
Cette victoire finira notre campagne, et nous pourrons reprendre nos quartiers d'hiver, où nous serons joints
par les nouvelles armées qui se forment en France, et alors la paix que je ferai, sera digne de mon peuple, de
vous et de moi.
NAPOLÉON.
Austerlitz, le 12 frimaire an 14 (2 décembre 1805)
Trentième bulletin de la grande armée.
Le 6 frimaire, l'empereur, eu recevant la communication des pleins-pouvoirs de MM.
de Stadion et de Giulay,
offrit préalablement un armistice, afin d'épargner le sang, si l'on avait effectivement envie de s'arranger et d'en
venir à un accommodement définitif.
Mais il fut facile à l'empereur de s'apercevoir qu'on avait d'autres projets; et comme l'espoir du succès ne
pouvait venir à l'ennemi que du côté de l'armée russe, il conjectura aisément que les deuxième et troisième
armées étaient arrivées, ou sur le point d'arriver à Olmutz, et que les négociations n'étaient plus qu'une ruse de
guerre pour endormir sa vigilance.
Le 7, à neuf heures du matin, une nuée de cosaques, soutenue par la cavalerie russe, fit plier les avant-postes
du prince Murat, cerna Vischau, et y prit cinquante hommes à pied du sixième régiment de dragons.
Dans la
journée, l'empereur de Russie se rendit à Vischau, et toute l'armée russe prit position derrière cette ville.
L'empereur avait envoyé son aide-de-camp, le général Savary, pour complimenter l'empereur de Russie dès
qu'il avait su ce prince arrivé à l'armée.
Le général Savary revint au moment où l'empereur faisait la
reconnaissance des feux de bivouac ennemis placés à Vischau.
Il se loua beaucoup du bon accueil, des grâces
et des bons sentimens personnels de l'empereur de Russie, et même du grand-duc Constantin, qui eut pour lui
toute espèce de soins et d'attentions; mais il fut facile de comprendre, par la suite des conversations qu'il eut
pendant trois jours avec une trentaine de freluquets qui, sous différens titres, environnent l'empereur de
Russie, que la présomption, l'imprudence et l'inconsidération régneraient dans les décisions du cabinet
militaire, comme elles avaient régné dans celles du cabinet politique.
Une armée ainsi conduite ne pouvait tarder à faire des fautes.
Le plan de l'empereur fut dès ce moment de les
attendre et d'épier l'instant d'en profiter.
Il donna sur-le-champ l'ordre de retraite à son armée, se retira de
nuit, comme s'il eût essuyé une défaite, prit une bonne position à trois lieues en arrière, fit travailler avec
beaucoup d'ostentation à la fortifier et à y établir des batteries.
Oeuvres de Napoleon Bonaparte, TOME III
Austerlitz, le 12 frimaire an 14 (2 décembre 1805) 272.
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