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NICOLAS MACHIAVEL AU MAGNIFIQUE LAURENT DE MÉDICIS La coutume la plus fréquente

Publié le 01/10/2013

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NICOLAS MACHIAVEL AU MAGNIFIQUE LAURENT DE MÉDICIS La coutume la plus fréquente chez ceux qui veulent gagner la faveur d'un prince, c'est de se présenter à lui avec ceux de leurs biens dont ils font le plus de cas, ou dont ils le voient faire ses délices ; aussi leur voit-on très souvent être offerts des chevaux, armes, brocarts, pierres précieuses, et autres ornements dignes de leur grandeur. Comme donc je désirais m'offrir à Votre Magnificence avec quelque témoignage de ma soumission envers elle, je n'ai trouvé dans mon bagage chose dont je fasse plus de cas et d'estime que la connaissance des actions des grands hommes, connaissance que m'ont enseignée une longue expérience des choses modernes et une lecture continuelle des anciennes. Et les ayant longuement, avec le plus grand soin, recueillies et analysées, et réduites à présent en un petit volume, je les envoie à Votre Magnificence. Et encore que je juge cette oeuvre indigne de lui être présentée, j'ai cependant pleine confiance que, grâce à son humanité, elle le recevra en bonne part, considérant que de moi ne lui peut venir plus grand don que de lui offrir le moyen de pouvoir en très peu de temps comprendre tout ce que j'ai, moi, mis tant d'années, au prix de tant de fatigues et de périls, à connaître et comprendre. Cette oeuvre, je ne l'ai pas ornée et chargée de formules amples, de paroles ampoulées et magnifiques, ou de ces autres paria-es ou ornements extrinsèques dont beaucoup ont coutume d'illustrer et broder leurs écrits ; car j'ai voulu ou que rien ne lui fit honneur, ou que seules la différence de la matière et la gravité du sujet la fassent agréer. Et je ne veux pas qu'on parle de présomption si un homme de basse et infime condition a la hardiesse d'examiner et régler le gouvernement des princes ; car comme ceux qui dessinent les paysages se placent en bas dans la plaine pour observer la nature des montagnes et des lieux élevés, et pour observer celle des lieux bas se placent en haut sur la montagne, de même, pour bien connaître la nature des peuples, il faut être prince, et pour bien connaître celle des princes, il faut être du peuple. Que donc Votre Magnificence prenne ce petit présent dans l'esprit où je le lui envoie. S'il est par elle examiné et lu avec soin, elle y apercevra l'extrême désir que j'ai qu'elle parvienne à cette grandeur que la fortune 2 et ses autres qualités lui promettent. Et si Votre Magnificence, du faîte de son élévation, tourne quelquefois les yeux vers ces lieux bas, elle connaîtra combien il est indigne que je supporte une grande et continuelle malignité de fortune. I COMBIEN DE SORTES DE MONARCHIES IL Y A, ET COMMENT ELLES S'ACQUIÈRENT Tous les États, toutes les puissances qui ont eu et ont autorité sur les hommes, ont été et sont ou républiques ou monarchies. Les monarchies sont, ou héréditaires, si la lignée du souverain y a régné longtemps, ou bien sont nouvelles. Les nouvelles, ou sont entièrement nouvelles, comme fut Milan pour François Sforza, ou sont comme des membres ajoutés à l'État héréditaire du prince qui les acquiert, tel le royaume de Naples pour le roi d'Espagne. Les territoires ainsi acquis sont, ou accoutumés à vivre sous un prince, ou habitués à être libres ; et ils s'acquièrent ou avec les armes d'autrui ou avec les siennes propres, par fortune ou par talent.
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« et broder leurs écrits ; car j'ai voulu ou que rien ne lui fit honneur, ou que seules la différence de la matière et la gravité du sujet la fassent agréer.

Et je ne veux pas qu'on parle de présomption si un homme de basse et infime condition a la hardiesse d'examiner et régler le gouvernement des princes ; car comme ceux qui dessinent les paysages se placent en bas dans la plaine pour observer la nature des montagnes et des lieux élevés, et pour observer celle des lieux bas se placent en haut sur la montagne, de même, pour bien connaître la nature des peuples, il faut être prince, et pour bien connaître celle des princes, il faut être du peuple.

Que donc Votre Magnificence prenne ce petit présent dans l'esprit où je le lui envoie.

S'il est par elle examiné et lu avec soin, elle y apercevra l'extrême désir que j'ai qu'elle parvienne à cette grandeur que la fortune 2 et ses autres qualités lui promettent.

Et si Votre Magnificence, du faîte de son élévation, tourne quelquefois les yeux vers ces lieux bas, elle connaîtra combien il est indigne que je supporte une grande et continuelle malignité de fortune.. »

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