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Michel Strogoff Quant à Nicolas Pigassof, il ne s'était jamais mieux porté.

Publié le 12/04/2014

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Michel Strogoff Quant à Nicolas Pigassof, il ne s'était jamais mieux porté. C'était une promenade pour lui que ce voyage, une excursion agréable, à laquelle il employait ses vacances de fonctionnaire sans fonction. «Décidément, disait-il, cela vaut mieux que de rester douze heures par jour, perché sur une chaise, à manoeuvrer un manipulateur!» Cependant, Michel Strogoff avait pu obtenir de Nicolas qu'il imprimât à son cheval une allure plus rapide. Pour arriver à ce résultat, il lui avait confié que Nadia et lui allaient rejoindre leur père, exilé à Irkoutsk, et qu'ils avaient grande hâte d'être rendus. Certes, il ne fallait pas surmener ce cheval, puisque très-probablement on ne trouverait pas à l'échanger pour un autre; mais, en lui ménageant des haltes assez fréquentes,--par exemple à chaque quinzaine de verstes,--on pouvait franchir aisément soixante verstes par vingt-quatre heures. D'ailleurs, ce cheval était vigoureux et, par sa race même, très-apte a supporter les longues fatigues. Les gras pâturages ne lui manquaient pas le long de la route, l'herbe y était abondante et forte. Donc, possibilité de lui demander un surcroît de travail. Nicolas s'était rendu a ces raisons. Il avait été très-ému de la situation de ces deux jeunes gens qui allaient partager l'exil de leur père. Rien ne lui paraissait plus touchant. Aussi, avec quel sourire il disait à Nadia: «Bonté divine! quelle joie éprouvera M. Korpanoff, lorsque ses yeux vous apercevront, quand ses bras s'ouvriront pour vous recevoir! Si je vais jusqu'à Irkoutsk,--et cela me paraît bien probable maintenant,--me permettrez-vous d'être présent a cette entrevue! Oui, n'est-ce pas?» Puis, se frappant le front: «Mais, j'y pense, quelle douleur aussi, quand il s'apercevra que son pauvre grand fils est aveugle! Ah! tout est bien mêlé en ce monde!» Enfin, de tout cela, il était résulté que la kibitka marchait plus vite, et, suivant les calculs de Michel Strogoff, elle faisait maintenant dix à douze verstes à l'heure. Il s'ensuit donc que, le 28 août, les voyageurs dépassaient le bourg de Balaisk, à quatre-vingts verstes de Krasnoiarsk, et le 29, celui de Ribinsk, à quarante verstes de Balaisk. Le lendemain, trente-cinq verstes au delà, elle arrivait à Kamsk, bourgade plus considérable, arrosée par la rivière du même nom, petit affluent de l'Yeniseï, qui descend des monts Sayansk. Ce n'est qu'une ville peu importante, dont les maisons de bois sont pittoresquement groupées autour d'une place; mais elle est dominée par le haut clocher de sa cathédrale, dont la croix dorée resplendissait au soleil. Maisons vides, église déserte. Plus un relais, plus une auberge habitée. Pas un cheval aux écuries. Pas un animal domestique dans la steppe. Les ordres du gouvernement moscovite avaient été exécutés avec une rigueur absolue. Ce qui n'avait pu être emporté avait été détruit. Au sortir de Kamsk, Michel Strogoff apprit à Nadia et à Nicolas qu'ils ne trouveraient plus qu'une petite ville de quelque importance, Nijni-Oudinsk, avant Irkoutsk. Nicolas répondit qu'il le savait d'autant mieux qu'une station télégraphique existait dans cette bourgade. Donc, si Nijni Oudinsk était abandonnée comme Kamsk, il serait bien obligé d'aller chercher quelque occupation jusqu'à la capitale de la Sibérie orientale. La kibitka put traverser à gué, et sans trop de mal, la petite rivière qui coupe la route au delà de Kamsk. D'ailleurs, entre l'Yeniseï et l'un de ses grands tributaires, l'Angara, qui arrose Irkoutsk, il n'y avait plus à redouter l'obstacle de quelque considérable cours d'eau, si ce n'est peut-être le Dinka. Le voyage ne pourrait donc être retardé de ce chef. CHAPITRE VIII. UN BIÈVRE QUI TRAVERSE LA ROUTE. 157 Michel Strogoff De Kamsk à la bourgade prochaine, l'étape fut très-longue, environ cent trente verstes. Il va sans dire que les haltes réglementaires furent observées, a sans quoi, disait Nicolas, on se serait attiré quelque juste réclamation de la part du cheval. Il avait été convenu avec cette courageuse bête qu'elle se reposerait après quinze verstes, et, quand on contracte, même avec des animaux, l'équité veut qu'on se tienne dans les termes du contrat. Après avoir franchi la petite rivière de Biriousa, la kibitka atteignit Biriousinsk dans la matinée du 4 septembre. Là, très-heureusement, Nicolas, qui voyait s'épuiser ses provisions, trouva dans un four abandonné une douzaine de «pogatchas», sorte de gâteaux préparés avec de la graisse de mouton, et une forte provision de riz cuit à l'eau. Ce surcroît alla rejoindre à propos la réserve de koumyss, dont la kibitka était suffisamment approvisionnée depuis Krasnoiarsk. Après une halte convenable, la route fut reprise dans l'après-dînée du 8 septembre. La distance jusqu'à Irkoutsk n'était plus que de cinq cents verstes. Rien on arrière ne signalait l'avant-garde tartare. Michel Strogoff était donc fondé à penser que son voyage ne serait plus entravé, et que dans huit jours, dans dix au plus, il serait en présence du grand-duc. En sortant de Biriousinsk, un lièvre vint à traverser le chemin, à trente pas en avant de la kibitka. «Ah! fit Nicolas. --Qu'as-tu, ami? demanda vivement Michel Strogoff, comme un aveugle que le moindre bruit tient en éveil. --Tu n'as pas vu?....» dit Nicolas, dont la souriante figure s'était subitement assombrie. Puis il ajouta: «Ah! non! tu n'as pu voir, et c'est heureux pour toi, petit père! --Mais je n'ai rien vu, dit Nadia. --Tant mieux! tant mieux! Mais moi... j'ai vu!.... --Qu'était-ce donc? demanda Michel Strogoff. --Un lièvre qui vient de croiser notre route!» répondit Nicolas. En Russie, lorsqu'un lièvre croisa la route d'un voyageur, la croyance populaire veut que ce soit le signe d'un malheur prochain. Nicolas, superstitieux comme le sont la plupart des Russes, avait arrêté la kibitka. Michel Strogoff comprit l'hésitation do son compagnon, bien qu'il ne partageât aucunement sa crédulité a l'endroit des lièvres qui passent, et il voulut le rassurer. «Il n'y a rien à craindre, ami, lui dit-il. --Rien pour toi, ni pour elle, je le sais, petit père, répondit Nicolas, mais pour moi!» Et reprenant: CHAPITRE VIII. UN BIÈVRE QUI TRAVERSE LA ROUTE. 158

« De Kamsk à la bourgade prochaine, l'étape fut très-longue, environ cent trente verstes.

Il va sans dire que les haltes réglementaires furent observées, a sans quoi, disait Nicolas, on se serait attiré quelque juste réclamation de la part du cheval.

Il avait été convenu avec cette courageuse bête qu'elle se reposerait après quinze verstes, et, quand on contracte, même avec des animaux, l'équité veut qu'on se tienne dans les termes du contrat. Après avoir franchi la petite rivière de Biriousa, la kibitka atteignit Biriousinsk dans la matinée du 4 septembre. Là, très-heureusement, Nicolas, qui voyait s'épuiser ses provisions, trouva dans un four abandonné une douzaine de «pogatchas», sorte de gâteaux préparés avec de la graisse de mouton, et une forte provision de riz cuit à l'eau.

Ce surcroît alla rejoindre à propos la réserve de koumyss, dont la kibitka était suffisamment approvisionnée depuis Krasnoiarsk. Après une halte convenable, la route fut reprise dans l'après-dînée du 8 septembre.

La distance jusqu'à Irkoutsk n'était plus que de cinq cents verstes.

Rien on arrière ne signalait l'avant-garde tartare.

Michel Strogoff était donc fondé à penser que son voyage ne serait plus entravé, et que dans huit jours, dans dix au plus, il serait en présence du grand-duc. En sortant de Biriousinsk, un lièvre vint à traverser le chemin, à trente pas en avant de la kibitka. «Ah! fit Nicolas. —Qu'as-tu, ami? demanda vivement Michel Strogoff, comme un aveugle que le moindre bruit tient en éveil. —Tu n'as pas vu?....» dit Nicolas, dont la souriante figure s'était subitement assombrie. Puis il ajouta: «Ah! non! tu n'as pu voir, et c'est heureux pour toi, petit père! —Mais je n'ai rien vu, dit Nadia. —Tant mieux! tant mieux! Mais moi...

j'ai vu!.... —Qu'était-ce donc? demanda Michel Strogoff. —Un lièvre qui vient de croiser notre route!» répondit Nicolas. En Russie, lorsqu'un lièvre croisa la route d'un voyageur, la croyance populaire veut que ce soit le signe d'un malheur prochain. Nicolas, superstitieux comme le sont la plupart des Russes, avait arrêté la kibitka. Michel Strogoff comprit l'hésitation do son compagnon, bien qu'il ne partageât aucunement sa crédulité a l'endroit des lièvres qui passent, et il voulut le rassurer. «Il n'y a rien à craindre, ami, lui dit-il. —Rien pour toi, ni pour elle, je le sais, petit père, répondit Nicolas, mais pour moi!» Et reprenant: Michel Strogoff CHAPITRE VIII.

UN BIÈVRE QUI TRAVERSE LA ROUTE.

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