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MAURICE LEENHARDT La « société primitive » est unifiée par le culte des

Publié le 21/10/2016

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MAURICE LEENHARDT La « société primitive » est unifiée par le culte des ancêtres et la communion avec la Nature L'incursion dans la mythologie et le dépouillement méthodique de toutes les données mythiques recueillies nous ont montré l'existence de trois couches de culture : l'une est en rapport avec le grand mythe de Pijeva lui-même, dégénéré, et presque oublié dans certaines régions. L'autre comporte le culte des ancêtres. L'une et l'autre de ces deux cultures nécessitent des notions relativement développées, un espace d'une certaine étendue, et la singularisation du cadavre. Et par-delà ces deux cultures, on en aperçoit une troisième, où l'espace est réduit au minimum, où le cadavre n'est pas singularisé, où l'homme s'adresse à l'ensemble de son habitat, avec ses montagnes où sont ses morts, ses arbres, ses sources, ses maisons, son foyer. Il vit indéterminé dans l'enveloppement de ce monde limité, qui est le sien. Dans une société ancienne et homogène comme est la société mélanésienne et où le culte des ancêtres a la prééminence actuelle, le dégagement de ces couches permet d'écarter ce qui appartient aux deux cultures les plus avancées, celle de Pijeva, et celle des ancêtres, pour laisser apparaître plus nette cette culture dont les traces se manifestent dans maints comportements et dans le langage. Nous voyons au travers d'elle l'homme encore incapable de se répandre dans le monde, mais envahi par celui-ci. L'Austro-Mélanésien vit indéterminé dans l'enveloppement de la nature. Il ne se répand pas dans la nature ; il est envahi par elle. C'est au travers d'elle qu'il se connaît. Ce n'est pas lui, par exemple, qui a découvert l'arbre, mais bien l'arbre qui s'est révélé à lui. Incapable d'avoir de la nature une vue anthropomorphique, il reste soumis, au contraire, aux effets d'une vue sans différenciation précise. Il n'y a pas de distance entre gens et choses ; l'objet adhère au sujet ; des participations imprévues se manifestent dans un monde que l'œil, encore inaccoutumé à saisir la profondeur, ne regarde que sous l'aspect de deux dimensions. Le Canaque embrasse ainsi le monde total en chacune de ses représentations, et il ne se dégage pas lui-même de ce monde ; il se fait du monde une image non point hétérogène et brisée comme il nous arrive, mais une image homogène, ou, pour mieux dire, une image cosmomorphique. À ses yeux, la roche, la plante, le corps humain, procèdent de structures analogues ; une identité de substance les confond dans le même flux de vie. Mais il ne parle point, à leur endroit, de vie. Il parle de vivant. Ce prédicat lui suffit pour désigner l'attribut essentiel de toute existence qu'il a devant soi. Bien que la vie se manifeste par une réalité organique et psychique dont il faut tenir compte, elle n'est pas dégagée. Elle demeure au fond de cette identité que le Mélanésien éprouve si fort, entre le monde et lui. Elle en est la réalité. Or, précisément, le Canaque ne retient pas la vie, il l'ignore ; mais il saisit le vivant, le monde, et soi-même, au travers de la seule identité : vivant = vivant. 00020000008A00000C0985,Maurice Leenhardt, Do Kamo, De la personne et le mythe dans le monde mélanésien (1947), Paris, Gallimard, « Tel », 1985, p. 120-121.

« il ne se d?gage pas lui-m?me de ce monde?; il se fait du monde une image non point h?t?rog?ne et bris?e comme il nous arrive, mais une image homog?ne, ou, pour mieux dire, une image cosmomorphique.

? ses yeux, la roche, la plante, le corps humain, proc?dent de structures analogues?; une identit? de substance les confond dans le m?me flux de vie. Mais il ne parle point, ? leur endroit, de vie.

Il parle de vivant.

Ce pr?dicat lui suffit pour d?signer l'attribut essentiel de toute existence qu'il a devant soi.

Bien que la vie se manifeste par une r?alit? organique et psychique dont il faut tenir compte, elle n'est pas d?gag?e.

Elle demeure au fond de cette identit? que le M?lan?sien ?prouve si fort, entre le monde et lui.

Elle en est la r?alit?.

Or, pr?cis?ment, le Canaque ne retient pas la vie, il l'ignore?; mais il saisit le vivant, le monde, et soi-m?me, au travers de la seule identit?: vivant =?vivant. 00020000008A00000C0985,Maurice Leenhardt, Do Kamo, De la personne et le mythe dans le monde m?lan?sien (1947), Paris, Gallimard, ??Tel??, 1985, p.?120-121.. »

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